Coronavirus : conséquences pour les entreprises ...

Le SPF Economie vient de publier sur son site deux documents intéressants. D'une part, une synthèse des règles en matière de chômage temporaire; d'autre part, une première analyse exploratoire des conséquences du coronavirus pour les entreprises. Ce dernier document sera régulièrement mis à jour.



Chômage temporaire suite au coronavirus

Afin de prévenir la propagation du coronavirus, les entreprises chinoises et étrangères ont temporairement suspendu à grande échelle leurs activités non seulement à Wuhan, mais aussi dans toute la Chine. Par conséquent, ces mesures affectent également les entreprises belges qui dépendent des approvisionnements de la région. En raison de l'impact du coronavirus, les entreprises touchées pourront invoquer le système de chômage temporaire pour force majeure.


L'impact du coronavirus sur les entreprises devient de plus en plus évident. En raison de la suspension temporaire mais massive des activités en Chine, de nombreuses autres entreprises dans le monde entier sont également en difficulté. Comme il est difficile de prévoir quand la situation se redressera en Chine, la ministre de l'Emploi, Nathalie Muylle, a décidé que la force majeure pourrait être invoquée dans le cadre de l'application du régime de chômage temporaire.


Concrètement, cela signifie que les entreprises peuvent s'adresser à l'Office National de l'Emploi (ONEM) pour avoir recours à ce système. L'entreprise devra démontrer clairement qu'il existe un lien entre le coronavirus et la force majeure. De plus, le chômage temporaire pour force majeure est soumis à certaines conditions :

  • Il doit s’agir d’un événement soudain et imprévisible.
  • Les faits doivent survenir en dehors de la volonté = faute de l'employeur et/ou du travailleur.
  • L'exécution du contrat de travail est rendue totalement impossible par la force majeure invoquée.
  • L'impossibilité de travailler doit avoir un caractère temporaire. Si l'événement est de nature telle que l'exécution du contrat devient définitivement impossible, le chômage temporaire pour force majeure ne peut pas être invoqué. Dès lors, il y a lieu, éventuellement, de mettre fin au contrat de travail pour force majeure.
  • L’employeur doit se conformer à ses obligations administratives envers l’ONEM.
  • Cette forme de chômage temporaire peut s’appliquer tant aux ouvriers qu’aux employés.


Voyez également Onem - Chômage temporaire pour cause de force majeure à la suite de l'épidémie …

Première analyse exploratoire de l’impact économique du coronavirus


Le coronavirus (COVID-19) a fait son apparition en décembre 2019 dans la ville chinoise de Wuhan, située dans la province de Hubei (centre de la Chine).


Le 2 mars 2020, le bilan officiel de l'Organisation mondiale de la santé faisait état de 3.043 personnes décédées et de 88.948 personnes infectées. La propagation du virus s’intensifie en dehors de la Chine : 8.774 personnes ont été infectées dans 64 pays, principalement en Corée du Sud (4.212) et en Italie (1.689) où l’on a enregistré respectivement 476 et 561 nouveaux cas par rapport à la veille. 128 personnes ont succombé au virus (soit 24 de plus que la veille). En termes de progression du nombre de décès à un jour d’écart, alors que le taux de croissance chinois a considérablement fléchi pour s’établir à +1 %, celui du reste du monde demeure élevé ; après avoir augmenté et ralenti, il atteint désormais +23 % le 2 mars (+21 % la veille).


Alors que le nombre de nouveaux cas enregistrés en Chine a considérablement diminué, les bilans établis depuis le 26 février soulignent que le nombre de nouveaux cas enregistré dans le Reste du monde excède désormais celui de la Chine. Ainsi au 2 mars, ces derniers s’élevaient respectivement à 1.598 nouveaux cas pour le Reste du monde et à 206 cas pour la Chine. Selon les dernières données du SPF Santé publique (3 mars, 10h), 13 patients ont été testés positifs en Belgique.


L'impact du virus est-il déjà ressenti par l'économie belge ?


L'impact économique se fera sentir par de multiples canaux. Un certain nombre de secteurs des loisirs, tels que HoReCa, les événements, ... seront certainement touchés. Le nombre de nuitées dans les hôtels belges, dont la moitié environ relève de réservations d’étrangers, risque d'être fortement amoindri. En outre, l’impact de ce virus en Belgique sera renforcé par l’ouverture importante et le degré élevé d'interconnexion de notre pays par rapport à l’économie mondiale. D'une part, le commerce direct de biens et de services entre des régions contaminées et la Belgique est sous pression. Le transport maritime et aérien entre la Belgique et les zones infectées (principalement la Chine, mais aussi le nord de l'Italie pour les déplacements de passagers) a fortement fléchi. Des entreprises de différentes branches d’activité font face à une diminution de la demande ou à des problèmes d’approvisionnement, notamment selon des enquêtes réalisées par les fédérations Agoria et FeviaD'autre part, un effet en cascade apparaît du fait de notre forte intégration dans les chaînes de valeur mondiales : lorsque l'activité économique ralentit quelque part dans le monde, des répercussions sont aussi relevées dans notre pays, en raison des interconnections avec de nombreux intermédiaires. Les entreprises belges pourraient être confrontées à des problèmes de personnel. Des mesures sont actuellement prises dans certaines entreprises pour éviter que le virus n'affecte le personnel : les voyages d'affaires sont découragés et le télétravail est encouragé.


Quel est l'ancrage de la Belgique dans l'économie mondiale ?


Traditionnellement, le commerce extérieur belge se focalise avant tout sur les pays de l'UE ; l'Allemagne, la France et les Pays-Bas étant nos principaux partenaires commerciaux. L'économie chinoise a, quant à elle, un impact moins prononcé sur l'économie belge : la demande finale totale de la Chine représente 1,9 % de la valeur ajoutée belge dont 1,5 % provient de la demande intérieure chinoise et 0,4 % de produits exportés par la Chine. A titre de comparaison, la demande finale française s’élève à 6,2 % de la valeur ajoutée belge, contre 5,6 % pour l’Allemagne et 4,0 % pour les Pays-Bas. L'Italie, elle-même durement touchée par le virus actuellement, génère 2,4 % de notre valeur ajoutée. Ces chiffres montrent la fragilité de l'économie belge ouverte dictée par sa grande interdépendance dans la chaîne de valeur mondiale. Lorsque l'impact économique du virus se fera sentir chez nos principaux partenaires commerciaux (dû à la stagnation de la production ou du commerce avec la Chine ou avec un autre pays infecté), l'économie belge en subira aussi rapidement les conséquences négatives


Toutefois, un certain nombre d'entreprises belges ressentiront également des effets directs à travers leur commerce avec la Chine. En 2018, le marché chinois représentait 1,9 % de nos exportations de biens contre 2,4 % pour nos importations en provenance de Chine. Notre balance commerciale vis-à-vis de la Chine se solde toujours par un déficit. Au cours des cinq dernières années, les exportations de la Belgique vers la Chine étaient principalement constituées de produits chimiques et pharmaceutiques (30 %), de machines et d'équipements électriques et électroniques (15 %) et de métaux de base tels que le fer, l'acier et le cuivre (11 %). Au cours des cinq dernières années, la moitié des importations en provenance de Chine se composait des catégories suivantes : machines et équipements électriques/électriques (30 %), produits chimiques (12 %) et meubles, éclairage et jouets (10 %). Le commerce entre la Belgique et d’ autres régions contaminées est aussi sous pression.


Que savons-nous de l'impact économique en Chine ?


Jusqu'à présent, l'impact économique se fait essentiellement sentir en Chine et résulte d’un choc de l'offre et d’un choc de la demande. A l’instar de l'épidémie de SRAS (dont l’impact négatif sur le PIB a été de 1,05 point de pourcentage en 2003), le coronavirus aura un effet à la baisse sur l’expansion de l'économie chinoise à court terme. Il va sans dire que les dépenses de consommation privée (transports, loisirs et commerce de détail) seront affectées au cours du premier trimestre 2020. En outre, l'activité industrielle, notamment la production de voitures et de leurs composants (de nombreux constructeurs automobiles internationaux sont implantés à Wuhan), de matériel, d'équipements électriques, etc. s'est pratiquement arrêtée dans certaines provinces chinoises. Les premières données du PMI (Purchasing Managers Index) de février 2020 montrent que l'épidémie de corona a eu un impact sévère sur l'industrie chinoise, en raison de la réduction des volumes de production et des perturbations dans les chaînes d'approvisionnement. Les effets négatifs devraient toutefois être temporaires, les entreprises prévoyant une reprise rapide de la production une fois que les restrictions visant à stopper la propagation du coronavirus seront levées.


Il est difficile d'estimer, actuellement, l'impact du coronavirus sur le PIB chinois en 2020. Selon différents scénarios de l'Economist Intelligence Unit, le taux de croissance annuel du PIB de la Chine en 2020 se situerait entre 4,5 % et 5,7 % en raison du coronavirus au lieu des 5,9 % estimés précédemment. Selon les prévisions plus récentes de l’OCDE pour 2020 (2 mars 2020), la croissance chinoise attendrait 4,9 %, ce qui représente une baisse de 0,8 point de pourcentage par rapport à la prévision de novembre 2019.


Le virus peut-il impacter l'économie mondiale ?

La Chine est devenue un acteur économique mondial majeur. En effet, elle est désormais la deuxième économie mondiale (avec une part de 15,8 % dans le PIB mondial (Calculs du SPF Economie sur la base des chiffres de la World Bank Data) et de 12,8 % dans les exportations mondiales de marchandises (Données chiffrées issues de UNCTAD)) et la Chine est fortement intégrée dans les chaînes de valeurs mondiales. Toutefois, la propagation du virus affectera également l'activité économique dans d’autres zones géographiques, comme le nord de l'Italie par exemple, ce qui peut entraîner de perturbations économiques additionnelles.


Il est néanmoins encore trop tôt pour mesurer l'impact négatif de l'épidémie de coronavirus sur l'économie mondiale. La Banque mondiale a déjà annoncé qu'elle réviserait ses prévisions de croissance à la baisse. Oxford Economics revoit l’accroissement du PIB mondial pour l'année 2020 à 2,3 % (un repli de 0,2 point de pourcentage, soit le niveau de progression le plus bas depuis la crise financière de 2008-2009. Oxford Economics corrige la croissance prévue de la zone euro pour 2020 de 0,2 point de pourcentage (à 0,8 %). Le FMI souligne par ailleurs que la propagation du virus pourrait compromettre la reprise de l’économie mondiale. L’OCDE envisage à présent une croissance du PIB mondial de 2,4 % en 2020, soit 0,5 point de pourcentage de moins que sa précédente prévision. La révision à la baisse de la croissance pour la zone euro (-0,3 point de pourcentage) étant plus prononcée que pour les Etats-Unis (-0,1 point de pourcentage). L’OCDE a cependant tenu à mettre en garde contre un scénario encore plus noir si l'épidémie devait s'aggraver. En effet, cette perte d'un demi-point de pourcentage repose sur l'hypothèse que "le pic épidémique sera atteint en Chine au premier trimestre 2020 et que dans les autres pays, l'épidémie se révélera plus modérée et circonscrite". Une épidémie plus durable, qui s'étendrait largement en Asie-Pacifique, en Europe et en Amérique du Nord, pourrait diviser par deux la croissance mondiale de cette année, avertit l'organisation.


Les marchés financiers, les taux de change et les cotations des prix des matières premières sont actuellement à nouveau soumis à des fortes fluctuations en raison du coronavirus, bien que cet impact puisse être de courte durée. La contraction de la demande chinoise a également entraîné la chute du prix mondial du pétrole (pétrole Brent). L'économie européenne étant plus étroitement liée à la Chine que l'économie américaine, l'euro est soumis à une pression plus forte que le dollar.

Cette analyse a été clôturée le 3 mars 2020.


Pour cette analyse d’impact économique, le SPF Economie suit de près les développements économiques résultant du coronavirus sur la base des statistiques officielles et mettra régulièrement à jour cette analyse.


Voyez également FEB - Quelles sont les conséquences du coronavirus en Chine ? Et quelles mesures…


Source : SPF Economie, Nouveautés, fin février, début mars 2020


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