Circulaire 2023/C/58 relative à l’introduction d’un délai de conservation de dix ans, d’un délai de prescription pour l’action en recouvrement de la taxe, des intérêts de retard et des amendes administratives...

L' Administration générale de la Fiscalité – Taxe sur la valeur ajoutée a publié ce 14/06/2023 la Circulaire 2023/C/58 relative à l’introduction d’un délai de conservation de dix ans, d’un délai de prescription pour l’action en recouvrement de la taxe, des intérêts de retard et des amendes administratives...

Cette circulaire porte sur les modifications apportées par la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses (MB du 30.11.2022) sur le plan de la TVA au délai de conservation pour les livres et documents et au délai de prescription de l’action en recouvrement de la taxe, des intérêts de retard et des amendes administratives.

Table des matières

1. Introduction
2. Dispositions légales

2.1. Conservation des livres et documents
2.2. Prescription
2.3. Entrée en vigueur

3. Commentaire

3.1. Délai de conservation de dix ans des livres et documents

3.1.1. Portée
3.1.2. Calcul du délai de conservation
3.1.3. Entrée en vigueur

3.2. Délai de prescription prolongé à quatre ans

3.2.1. Délai prolongé à quatre ans en cas de non dépôt ou de dépôt tardif
3.2.2. Déclarations visées
3.2.3. En cas de non dépôt ou de dépôt tardif
3.2.4. Lien entre le recouvrement et la déclaration non déposée ou déposée tardivement
3.2.5. Fin du délai de prescription prolongé
3.2.6. Aucune autre condition à remplir

3.3. Délai de prescription de dix ans en cas de fraude

3.3.1. Délai de prescription de dix ans
3.3.2. Notification préalable
3.3.3. Entrée en vigueur

1. Introduction

Cette circulaire commente les modifications apportées par la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses (MB du 30.11.2022) au délai de conservation des livres et documents visé à l’article 60 du Code de la TVA, au délai ordinaire de prescription de trois ans de l’action en recouvrement de la taxe, des intérêts de retard et des amendes administratives visé à l’article 81bis, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA, ainsi qu’au délai de prescription de sept ans en matière de fraude.

2. Dispositions légales

2.1. CONSERVATION DES LIVRES ET DOCUMENTS

L’article 103 de la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses (MB du 30.11.2022) détermine que :

« A l'article 60 du Code de la taxe sur la valeur ajoutée, remplacé par la loi du 17 décembre 2012 et modifié par la loi du 25 avril 2014, aux paragraphes 3 et 4, les mots "sept ans" sont chaque fois remplacés par les mots "dix ans" ».

L’article 60, § 3, du Code de la TVA tel que modifié par l’article 103 de la loi du 20 novembre 2022, précité, est libellé comme suit :

“§ 3. Les factures et copies de factures visées au paragraphe 1er doivent être conservées pendant dix ans à compter du 1er janvier de l’année qui suit leur date d’émission.”

L’article 60, § 4, du Code de la TVA tel que modifié par l’article 103 de la loi du 20 novembre 2022, précité, est libellé comme suit :

« § 4. Les livres et autres documents dont la tenue, la rédaction ou l’émission sont prescrits par le présent Code ou en exécution de celui-ci doivent être conservés par les personnes qui les ont tenus, dressés, émis ou reçus pendant dix ans à partir du 1er janvier de l’année qui suit leur clôture s’il s’agit de livres, leur date s’il s’agit d’autres documents ou l’année au cours de laquelle le droit à déduction a pris naissance dans les situations visées à l’article 58, § 4, 7°, alinéa 2, s’il s’agit des documents visés à l’article 58, § 4, 7°, alinéa 4.

La même obligation incombe aux assujettis et aux personnes morales non assujetties, établis en Belgique, en ce qui concerne les factures ou documents en tenant lieu relatifs aux acquisitions intracommunautaires de biens ou aux achats effectués à l’étranger, les livres et documents comptables, les contrats, les pièces relatives à la commande des prestations de services et des livraisons de biens, à l’expédition, à la remise et à la livraison de biens, les extraits de compte, les documents de paiement et les autres livres et documents relatifs à l’activité.

Par dérogation à l’alinéa 2, en ce qui concerne la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l’exploitation de systèmes informatisés, le délai de conservation prend cours à partir du 1er janvier de l’année qui suit la dernière année pendant laquelle le système décrit dans cette documentation a été utilisé.

Le Roi peut prolonger le délai de conservation visé à l’alinéa 1er et au paragraphe 3 en vue d’assurer le contrôle des révisions des déductions qui sont opérées en exécution de l’article 49, 2° et 3°. Dans les cas qu’Il détermine et selon les modalités qu’Il fixe, Il peut réduire le délai de conservation des documents autres que les factures et les livres ».

2.2. PRESCRIPTION

L’article 104 de la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses (MB du 30.11.2022) dispose que :

A l'article 81bis, § 1er, du même Code, inséré par la loi du 15 mars 1999, remplacé par la loi du 22 décembre 2008 et modifié en dernier lieu par la loi du 1er juillet 2016, les modifications suivantes sont apportées :

1° un alinéa rédigé comme suit est inséré entre l'alinéa 1er et l'alinéa 2 :
"En cas d'absence de déclaration visée à l'article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, ou de remise tardive de celle-ci, le délai visé à l'alinéa 1er est prolongé jusqu'à l'expiration de la quatrième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d'exigibilité de ces taxe, intérêts et amendes fiscales est intervenue." ;

2° dans l'alinéa 2, devenu l'alinéa 3, le 4° est abrogé ;

3° un alinéa rédigé comme suit est inséré entre l'alinéa 2, devenu l'alinéa 3 et l'alinéa 3, devenu l'alinéa 4 :
"Par dérogation aux alinéas 1er à 3, cette prescription est acquise à l'expiration de la dixième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d'exigibilité est intervenue, lorsque l'infraction visée aux articles 70 ou 71 a été commise dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire." ;

4° l'alinéa 3, devenu l'alinéa 5, est remplacé par ce qui suit :
"Pour l'application des alinéas 3 et 4, la réception du renseignement venant de l'étranger, l'action judiciaire, la prise de connaissance des éléments probants ou des indices de fraude fiscale, visées respectivement aux alinéas 3, 1° à 3° et 4, peuvent intervenir tant avant qu'après l'expiration du délai de prescription visé aux alinéas 1er et 2.".

L’article 81bis, § 1er, du Code de la TVA, introduit par la loi du 15 mars 1999, remplacé par la loi du 22 décembre 2008 et (en dernier lieu) modifié par l’article 104 de la loi du 20 novembre 2022, précité, détermine que :

« § 1er. La prescription de l’action en recouvrement de la taxe, des intérêts de retard et des amendes fiscales est acquise à l’expiration de la troisième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d’exigibilité de ces taxe, intérêts de retard et amendes fiscales est intervenue.

En cas d'absence de déclaration visée à l'article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, ou de remise tardive de celle-ci, le délai visé à l'alinéa 1er est prolongé jusqu'à l'expiration de la quatrième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d'exigibilité de ces taxe, intérêts et amendes fiscales est intervenue.

Par dérogation à l’alinéa 1er, cette prescription est toutefois acquise à l’expiration de la septième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d’exigibilité est intervenue, lorsque :

un renseignement, une enquête ou un contrôle, communiqués, effectués ou requis soit par un autre Etat membre de l'Union européenne selon les règles établies en la matière par le présent Code ou par la législation de cette Union, soit par une autorité compétente de tout pays avec lequel la Belgique a conclu une convention préventive de la double imposition ou pour lequel un fondement juridique existe qui règle les échanges de renseignements et se rapportant à l'impôt visé par cette convention ou ce fondement juridique, font apparaître que des opérations imposables n'ont pas été déclarées en Belgique, que des opérations y ont été exemptées à tort ou que des déductions de la taxe y ont été opérées à tort ;

une action judiciaire fait apparaître que des opérations imposables n’ont pas été déclarées, que des opérations ont été exemptées à tort ou que des déductions de la taxe ont été opérées, en Belgique, en violation des dispositions légales et réglementaires qui leur sont applicables ;

des éléments probants, venus à la connaissance de l’administration, font apparaître que des opérations imposables n’ont pas été déclarées en Belgique, que des opérations y ont été exemptées à tort ou que des déductions de la taxe y ont été opérées en infraction aux dispositions légales et réglementaires qui régissent la matière.

Par dérogation aux alinéas 1er à 3, cette prescription est acquise à l'expiration de la dixième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d'exigibilité est intervenue, lorsque l'infraction visée aux articles 70 ou 71 a été commise dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire.

Pour l'application des alinéas 3 et 4, la réception du renseignement venant de l'étranger, l'action judiciaire, la prise de connaissance des éléments probants ou des indices de fraude fiscale, visées respectivement aux alinéas 3, 1° à 3° et 4, peuvent intervenir tant avant qu'après l'expiration du délai de prescription visé aux alinéas 1er et 2 ».

2.3. ENTRÉE EN VIGUEUR

L’article 105 de la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses (MB du 30.11.2022) dispose que :

« Les articles 60 et 81bis, § 1er, du Code de la taxe sur la valeur ajoutée, tels que modifiés par les articles 103 et 104 de la présente loi, sont applicables aux taxes qui sont devenues exigibles à partir du 1er janvier 2023.

Les taxes dont l'exigibilité est intervenue avant le 1er janvier 2023 restent soumises aux délais de prescription de l'action en recouvrement visée à l'article 81bis du code tel qu'il était applicable avant l'entrée en vigueur de la présente loi. »

3. Commentaire

3.1. DÉLAI DE CONSERVATION DE DIX ANS DES LIVRES ET DOCUMENTS

3.1.1. Portée

L’article 103 de la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses (MB du 30.11.2022) a porté de sept à dix ans le délai de conservation des factures, copies de factures, livres et autres documents que les factures (ci-après « livres et documents ») visé à l’article 60 du Code de la TVA.

Le délai de conservation des livres et documents a donc été adapté au nouveau délai de prescription de l’action en recouvrement de la taxe, des intérêts de retard et des amendes administratives en cas d’intention frauduleuse ou de dessein de nuire. Ce délai a également été porté à dix ans (voir à ce sujet le titre 3.3. « Délai de prescription de dix ans en cas de fraude », ci-après).

Le délai de conservation de dix ans est applicable :

- aux factures et copies de factures visées à l’article 60, § 1er, alinéas 1 et 2, du Code de la TVA, c’est-à-dire :

* aux copies de factures que l’assujetti a émises, qui ont été émises par son acquéreur ou preneur ou qui ont été émises en son nom et pour son compte par un tiers ;

* aux factures reçues par un assujetti, une personne morale non assujettie ou un particulier.

- aux livres et autres documents dont la tenue, la rédaction ou l’émission sont prescrits par le Code de la TVA ou en exécution de celui-ci visés à l’article 60, § 4, alinéa 1er, du Code de la TVA (à conserver par les assujettis et les non assujettis) ;

- à tous les autres livres et documents relatifs à l’activité exercée visés à l’article 60, § 4, alinéa 2, du Code de la TVA (à conserver par les assujettis et les personnes morales non assujetties) ;

- aux données relatives aux analyses, à la programmation et à l’exploitation de systèmes informatisés (à conserver par les assujettis et les personnes morales non assujetties).

Le nouveau délai de conservation s’applique tant aux livres et documents sur papier que digitalisés.

Les règles générales applicables en matière d’obligation de conservation des livres et documents ne sont pas modifiées.

En ce qui concerne les copies de factures visées à l’article 60, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA, il est rappelé que le délai de conservation déterminé à l’article 60, § 3, du Code de la TVA (désormais dix ans) est également applicable dans la situation où l’assujetti émet des factures pour des opérations pour lesquelles il n’est légalement pas tenu d’en émettre.

Le même principe s’applique à la personne morale non assujettie. Bien que celle-ci ne soit pas tenue d’émettre des factures, elle est en effet également tenue en vertu de l’article 60, § 4, alinéa 2, du Code de la TVA, lorsqu’elle émet des factures sur base volontaire, de conserver les copies de ces factures émises sur base volontaire durant dix ans.

Le délai de conservation de dix ans est applicable aux factures reçues visées à l’article 60, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA. L’obligation de conservation des factures reçues s’applique quelle que soit la qualité de celui qui a reçu la facture et qu’il y ait ou non obligation d’émettre une facture. L’administration a toutefois accepté que les factures émises sur base volontaire par les assujettis aux particuliers et pour lesquelles un assujetti renonce, pour quelque raison que ce soit, à la dispense de l’obligation de facturer, ne doivent pas être conservées par ces particuliers pour l’application de la réglementation en matière de TVA (circulaire 16/2008 (E.T.112.081) du 13.05.2022 numéro 15). Dans les situations où un assujetti est tenu d’émettre des factures à un particulier (v. article 1er de l’arrêté royal n° 1, article 53, § 2, 2° et 4°, du Code de la TVA), le particulier est par contre tenu de conserver ces factures. L’administration a toutefois accepté que pour les factures reçues par des particuliers, le délai de conservation soit ramené à cinq ans (décision n° E.T.91.858 du 16.12.1997 et circulaire n° 16/2008, précitée, numéro 27).

Le délai de prescription de dix ans ne vaut en principe pas pour les plans et les cahiers des charges d’un bâtiment nouvellement construit ni pour les factures relatives à la construction qui doivent être conservés par le propriétaire d’un tel bâtiment. Le délai de conservation de ces documents est fixé à l’article 64, § 4, alinéa 2, du Code de la TVA. Le délai de conservation de ces documents s’élève à cinq ans à compter de la date de signification du revenu cadastral. Cependant, lorsque les plans, cahiers des charges et factures concernés doivent être conservés durant dix ans sur la base de l’article 60 du Code de la TVA, et que la date de fin de ce délai de prescription de dix ans est postérieure à celle de fin du délai de conservation visés à l’article 64, § 4, du Code de la TVA, le délai de conservation visé à l’article 60 doit être respecté. C’est le cas pour les factures reçues par les assujettis et les personnes morales non assujetties (article 60, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA) ainsi que pour les plans et cahiers des charges relatifs à la construction, par ces personnes, dans le cadre de leur activité économique, d’un nouveau bâtiment (article 60, § 4, alinéa 2, du Code de la TVA). Sauf en cas d’application d’un délai de conservation plus long (voir par exemple le paragraphe ci-après), les assujettis et les personnes morales non assujetties sont dès lors tenues de conserver les plans, cahiers des charges et factures qui se rapportent à l’activité professionnelle exercée durant dix ans par application de l’article 60 du Code de la TVA.

Pour être complet, l’attention est attirée sur l’existence d’un délai de conservation dérogatoire de quinze ans pour les livres et documents qui se rapportent à la déduction de la taxe ayant grevé les biens d’investissement immobiliers opérée par l’assujetti et de vingt-cinq ans pour les livres et documents relatifs à la déduction, par l’assujetti, de la taxe ayant grevé des bâtiments ou fractions de bâtiments donnés en location dans les conditions de l’article 44, § 3, 2°, d), du Code de la TVA.

3.1.2. Calcul du délai de conservation

La date de commencement pour le calcul du délai de conservation visé à l’article 60 du Code de la TVA n’est pas modifiée.

Par conséquent, le délai de conservation de dix ans doit, comme l’était le délai de conservation de sept ans, être calculé à compter du 1er janvier qui suit :

- leur date d’émission pour les factures ou copies de factures ;

- leur date pour les documents autres que les factures et les copies de factures ;

- l’année au cours de laquelle le droit à déduction a pris naissance pour les documents visés à l’article 58, § 4, 7°, alinéa 4, du Code de la TVA, dans les cas visés au deuxième alinéa de ce même 7° ;

- leur clôture pour les livres ;

- la dernière année au cours de laquelle le système décrit dans la documentation est utilisé pour la documentation relative aux analyses et à la programmation.

Pour obtenir la date d’expiration du délai de conservation de dix ans, il faut désormais compter dix ans au lieu de sept à partir du 1er janvier qui suit la date visée ci-dessus (la date d’émission de la facture pour les factures et leur copie, leur date pour les autres documents, la date de clôture des livres, etc.).

3.1.3. Entrée en vigueur

En vertu de l’article 104 de la loi du 20.11.2022, précitée, l’article 60 du Code de la TVA tel que modifié par l’article 103 de la loi concernée est applicable aux taxes qui sont devenues exigibles à partir du 01.01.2023.

Le nouveau délai de conservation de dix ans est donc applicable dès que les livres et documents se rapportent (en tout ou en partie) à des taxes devenues exigibles à partir du 01.01.2023.

Exemple (1)

Le 23.12.2022, l’assujetti X, établi en Belgique, livre un bien meuble à un assujetti Y, également établi en Belgique, pour un montant de 5.000 euros hors TVA. La facture relative à cette livraison est émise par l’assujetti X le 07.01.2023. La taxe est exigible le 07.01.2023 (par application de l’article 17, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA), à la date d’émission de la facture. Par application de l’article 60, § 3, du Code de la TVA, la copie de la facture concernée doit être conservée par l’assujetti X durant dix ans à compter du 1er janvier de l’année qui suit la date de son émission, c’est-à-dire jusqu’au 31.12.2033 inclus.

Exemple (2)

L’assujetti X est épicier. Il tient son journal des recettes débuté le 01.01.2022 sur papier. Ce journal des recettes, dans lequel les recettes de plusieurs années peuvent être reprises, continue à être utilisé durant les années 2023 et 2024. Le délai de conservation du journal des recettes tenu par l’assujetti X pour les années 2022 à 2024 inclus s’élève à dix ans étant donné qu’y sont reprises des opérations pour lesquelles la taxe est devenue exigible après le 31.12.2022. Puisque le journal des recettes est clôturé le 31.12.2024, il doit être conservé jusqu’au 31.12.2034 inclus (dix années à compter du 1er janvier de l’année qui suit sa clôture, c’est-à-dire à partir du 01.01.2025).

Le nouveau délai de conservation de dix ans pour les livres et documents n’est pas applicable aux livres et documents qui se rapportent à des taxes qui sont devenues exigibles avant le 01.01.2023.

L’administration attire néanmoins l’attention sur le fait que dans le cadre de la problématique de la preuve, il est recommandé de conserver les livres et documents visés à l’article 60 du Code de la TVA qui se rapportent aux opérations imposables visées à l’article 2 du Code de la TVA (livraison de biens, service, importation de biens, acquisition intracommunautaire de biens) reprises dans une déclaration périodique ou une déclaration spéciale à la TVA relative à une période de déclaration postérieure au 31.12.2022 jusqu’au 31 décembre de la dixième année qui suit la période à laquelle se rapporte la déclaration, même dans la situation où la date d’exigibilité d’une telle opération se situerait avant le 01.01.2023 et que le délai de conservation légal de sept ans serait donc applicable.

Il en va d’ailleurs de même pour les livres et documents visés à l’article 60 du Code de la TVA qui justifient le droit à déduction, le droit à restitution, la révision en faveur de l’assujetti ou toute autre inscription d’un montant en faveur de l’assujetti lorsque :

- ce droit est exercé ou ce montant est repris dans une déclaration périodique ou une déclaration spéciale à la TVA relative à une période de déclaration postérieure au 31.12.2022 ;

- OU que ce droit ou ce montant est repris dans une déclaration périodique ou une déclaration spéciale à la TVA relative à une période de déclaration antérieure au 01.01.2023 mais qui est déposée après le 31.12.2022 ;

- ET que le délai de conservation de sept ans s’applique étant donné que la date d’exigibilité est antérieure au 01.01.2023.

Dans ce dernier cas, il est recommandé, dans le cadre de la problématique de la preuve, de conserver les livres et documents jusqu’au 31 décembre de la dixième année qui suit la date de dépôt de la déclaration dans laquelle le droit est exercé ou le montant est repris.

3.2. DÉLAI DE PRESCRIPTION PROLONGÉ À QUATRE ANS

3.2.1. Délai prolongé à quatre ans en cas de non dépôt ou de dépôt tardif

Conformément à l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA, en cas de non dépôt de la déclaration visée à l'article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, du même Code ou de dépôt tardif de celle-ci, le délai visé à l'alinéa 1er est prolongé jusqu'à l'expiration de la quatrième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d'exigibilité de ces taxe, intérêts et amendes administratives est intervenue.

3.2.2. Déclarations visées

L’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA vise exclusivement les déclarations périodiques à la TVA prévues à l’article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, du même Code.

En vertu de l’article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, du Code de la TVA, l'assujetti, à l'exclusion de celui qui n'a aucun droit à déduction, est tenu de remettre, chaque mois, une déclaration. En utilisant le pouvoir qui lui est octroyé par l’article 53octies, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA, le Roi a, sous certaines conditions, autorisé que par dérogation à l'article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, précité, la déclaration périodique soit déposée trimestriellement (voir article 18, § 2, de l’arrêté royal n° 1 du 29 décembre 1992 relatif aux mesures tendant à assurer le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée). L’article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, du Code de la TVA vise dès lors à la fois la déclaration périodique mensuelle et la déclaration périodique trimestrielle.

Par conséquent, l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA ne vise que les déclarations périodiques mensuelles et trimestrielles. Toute déclaration autre que la déclaration périodique mensuelle ou trimestrielle visée ci-avant est exclue de l’application du délai de prescription prolongé prévu à l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA.

3.2.3. En cas de non dépôt ou de dépôt tardif

Pour l’application du délai de prescription prolongé de quatre ans visé à l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA, il est requis que la déclaration périodique mensuelle ou trimestrielle n’ait pas été déposée ou ait été déposée tardivement.

Dans le cadre de l’application de l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA, l’administration part du principe qu’une déclaration n’est pas déposée lorsqu’au moment de recouvrer la taxe, elle n’est effectivement pas déposée et pour autant qu’à ce moment, le dépôt encoure un retard de plus de neuf mois (à mettre en comparaison avec la distinction qui ressort des points A. et B. de la Section 1 « Obligations déclaratives », Rubrique I « Déclaration visée à l’article 53, § 1er, alinéa 1er, 2°, du Code » de l’annexe à l’arrêté royal n° 44 du 09.07.2012 fixant le montant des amendes fiscales non proportionnelles en matière de taxe sur la valeur ajoutée).

Ensuite, le délai de prescription prolongé visé à l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA est applicable lorsque la déclaration périodique mensuelle ou trimestrielle est déposée tardivement. L’administration part du principe qu’une telle déclaration est déposée tardivement lorsqu’au moment du recouvrement, elle est déposée et que la date de dépôt se situe après l’expiration du 20e jour qui suit la période de déclaration.

Par tolérance administrative, l’administration n’appliquera pas le délai de prescription visé à l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA lorsque l’assujetti fait usage d’une mesure d’assouplissement du délai de dépôt qui lui est également octroyée par tolérance administrative. Est en particulier visé ici le régime d’été publié chaque année à destination du grand public par le biais d’un avis sur le site internet du SPF Finances.

3.2.4. Lien entre le recouvrement et la déclaration non déposée ou déposée tardivement

Pour que le délai de prescription ordinaire de l'article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA soit prolongé jusqu’à la quatrième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d’exigibilité de ces taxe, intérêts et amendes administratives est intervenue, le ratio legis de l'article 81bis, § 1er, alinéa 2, du même Code requiert que l’action en recouvrement puisse être reliée à la déclaration périodique à la TVA non déposée ou déposée tardivement.

L'administration part du principe qu'un tel lien existe et, par conséquent, que le délai de prescription prolongé de quatre ans visé à l'article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA s'applique, à l'égard de l’action en recouvrement de la taxe :

- dont l’exigibilité ressort d’une déclaration périodique à la TVA (taxe reprise dans la déclaration), lorsque la déclaration concernée est déposée tardivement ;

- qui aurait dû être reprise dans une déclaration périodique mais qui ne l’a pas été (recouvrement a posteriori de la taxe), lorsque par application des articles 16, § 1er, alinéa 1er, 17, 22, 22bis, 24 ou 25sexies, § 2, du Code de la TVA, l’exigibilité de cette taxe est intervenue au cours d’une période pour laquelle la déclaration périodique n’a pas été déposée ou a été déposée tardivement ;

- née en raison d’un exercice à tort du droit à déduction ou du droit à restitution, lorsque la déclaration périodique à la TVA dans laquelle ce droit a été exercé a été déposée tardivement (recouvrement a posteriori de la taxe). Il en va de même lorsque dans la déclaration concernée, l’assujetti a procédé à tort à une révision en sa faveur ou a repris à tort tout autre montant en sa faveur ;

- le délai de prescription prolongé de quatre ans de l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA est applicable à l’égard du recouvrement des amendes administratives proportionnelles dues suite au recouvrement par l’administration des taxes visées ci-avant.

Le délai de prescription prolongé de quatre ans visé à l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA est en outre applicable aux intérêts de retard dus suite au recouvrement ou au recouvrement a posteriori des taxes visées ci-avant.

3.2.5. Fin du délai de prescription prolongé

Sauf suspension ou interruption de la prescription, la prescription visée à l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA commence à courir le 31 décembre de la quatrième année civile qui suit celle au cours de laquelle la cause d’exigibilité de la taxe, des intérêts et des amendes administratives est intervenue.

La cause d’exigibilité de l’action en recouvrement de la taxe due qui devait être reprise dans une déclaration mais qui ne l’a pas été survient à la date d’exigibilité de la taxe comme prévu aux articles 16, § 1er, alinéa 1er (livraison de biens), 17 (livraison de biens), 22 (services), 22bis (services), 24 (importation de biens) et 25sexies, § 2 (acquisition intracommunautaire de biens), du Code de la TVA.

Dans la situation où l’assujetti a à tort repris un montant en sa faveur dans la déclaration périodique à la TVA, il y a également naissance d’une action en recouvrement de la taxe au sens de l’article 81bis, § 1er, du Code de la TVA. Il est rappelé que la cause d’exigibilité de cette action ne se produit pas au moment de l’exigibilité de la taxe tel que défini aux articles 16, § 1er, alinéa 1er, 17, 22, 22bis, 24 et 25sexies, § 2, du Code de la TVA, mais bien au moment où l’infraction est commise, c’est-à-dire au moment du dépôt de la déclaration à la TVA dans laquelle est repris le montant indu. En effet, l’administration prend au plus tôt connaissance de l’infraction au moment du dépôt de la déclaration et c’est au plus tôt à ce moment que l’administration peut recouvrer la TVA.

Exemple (3)

L’assujetti X dépose la déclaration relative au quatrième trimestre 2023 qui doit être déposée au plus tard le 20.01.2024, tardivement, le 03.03.2024. Le dépôt tardif de la déclaration a pour conséquence que le délai de prescription ordinaire de trois ans est prolongé par application de l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA.

L’exercice à tort du droit à déduction dans la déclaration du quatrième trimestre 2023 fait naître une action en recouvrement de la taxe dans le chef de l’administration. La cause d’exigibilité de l’action visée à l’article 81bis du Code de la TVA se produit dans ce cas à la date de dépôt de la déclaration dans laquelle le montant est repris indûment, c’est-à-dire le 03.03.2024. L’administration peut recouvrer la taxe pour laquelle un droit à déduction a été exercé à tort dans la déclaration du quatrième trimestre 2023 par application de l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA jusqu’au 31 décembre inclus de la quatrième année qui suit la cause d’exigibilité, à savoir jusqu’au 31.12.2028 inclus. Si la déclaration avait été déposée dans le délai, l’administration aurait pu recouvrer jusqu’au 31 décembre inclus de la troisième année qui suit la cause d’exigibilité, en l’occurrence jusqu’au 31.12.2027 inclus.

L’action en recouvrement des amendes administratives proportionnelles qui sont dues sur la base de l’article 70, § 1er, du Code de la TVA naît et la cause d’exigibilité intervient au moment où naît l’action en recouvrement de la TVA.

L’action en recouvrement des intérêts de retard naît et la cause d’exigibilité intervient de mois en mois.

3.2.6. Aucune autre condition à remplir

En vertu de l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA, le non dépôt ou le dépôt tardif d’une déclaration périodique a pour conséquence que le délai de prescription visé au premier alinéa de cet article est prolongé jusqu’au 31 décembre de la quatrième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d'exigibilité de ces taxe, intérêts et amendes administratives est intervenue.

Pour la prolongation du délai, il suffit que la déclaration n’ait pas été déposée ou ait été déposée tardivement et que le recouvrement soit lié à la déclaration périodique à la TVA non déposée ou déposée tardivement (voir titres 3.2.4. et 3.2.5. ci-avant).

Il n’y a pas d’autres conditions à remplir.

Il n’est dès lors pas requis que l’assujetti ait commis les mêmes infractions dans le délai de prescription ordinaire de trois ans visé à l’article 81bis, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA.

Exemple (4)

Un assujetti déposant trimestriel dépose tardivement ses déclarations périodiques à la TVA relatives aux premier et deuxième trimestres 2023. Les déclarations relatives aux troisième et quatrième trimestres sont déposées dans le délai.

L’administration effectue un contrôle en 2027 et constate des infractions au niveau de l’application de la législation en matière de TVA. Ces infractions, qui consistent en un exercice à tort du droit à déduction, ont un caractère systématique.

La taxe dont la cause d’exigibilité s’est produite en 2024, 2025 et 2026 est recouvrée par l’administration en application du délai de prescription ordinaire prévu à l’article 81bis, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA. L’administration peut recouvrer cette dette fiscale jusqu’au 31.12.2027 inclus (y compris les intérêts de retard dus jusqu’à cette date et les amendes administratives proportionnelles). Par contre, au moment du contrôle, l’administration ne peut plus recouvrer la taxe, les intérêts et les amendes administratives dont l’exigibilité est intervenue en 2023 en appliquant l’article 81bis, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA.

Toutefois, étant donné que l’assujetti a déposé tardivement les déclarations des premier et deuxième trimestres 2023, le délai de prescription ordinaire visé à l’article 81bis, § 1er, alinéa 1er, du Code de la TVA est prolongé et l’administration peut encore recouvrer la taxe non déclarée dont l’exigibilité est intervenue au cours du premier et du deuxième trimestre 2023, ainsi que les intérêts de retard y afférents dont la cause d’exigibilité s’est produite en 2023 et les amendes administratives proportionnelles qui s’y rapportent jusqu’au 31.12.2027 inclus, par application de l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA.

Il n’est pas requis que l’assujetti ait commis les mêmes infractions en 2024, 2025 et 2026. Pour la prolongation du délai de prescription ordinaire de trois à quatre ans, il suffit en effet que la déclaration dans laquelle la taxe due devait être reprise n’ait pas été déposée ou l’ait été tardivement. L’administration peut exercer l’action en recouvrement de la taxe (et des intérêts de retard y afférents dont la cause d’exigibilité s’est produite en 2023 ainsi que des amendes administratives proportionnelles qui y sont liées) jusqu’au 31.12.2027 inclus par application de l’article 81bis, § 1er, alinéa 2, du Code de la TVA, même lorsque les infractions ne présentent pas de caractère systématique et que la déduction n’a été effectuée à tort par exemple que dans la déclaration du premier et/ou du deuxième trimestre 2023.

Le fait que le législateur ait prévu, à l’article 81bis, alinéa 2, du Code de la TVA, une prolongation du délai de prescription ordinaire de trois ans prévu à l’article 81bis, alinéa 1er, du Code de la TVA, ne porte en aucun cas atteinte à l’autonomie des délais de prescription de sept ans repris à l’article 81bis, § 1er, alinéa 3, du Code de la TVA ni à l’autonomie du délai de dix ans de l’article 81bis, § 1er, alinéa 4, du Code de la TVA. Pour l’application de ces dispositions, la réception du renseignement venant de l'étranger, l'action judiciaire, la prise de connaissance des éléments probants ou des indices de fraude fiscale, visées respectivement aux alinéas 3, 1° à 3° et 4, peuvent intervenir tant avant qu'après l'expiration du délai de prescription visé aux alinéas 1er et 2 (article 81bis, § 1er, alinéa 5, du Code de la TVA).

3.3. DÉLAI DE PRESCRIPTION DE DIX ANS EN CAS DE FRAUDE

3.3.1. Délai de prescription de dix ans

L’article 104, 3°, de la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses, précitée, a porté de sept à dix ans le délai de prescription pour les infractions commises dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire.

Conformément à l’article 81bis, § 1er, alinéa 4, du Code de la TVA, par dérogation aux alinéas 1er à 3, cette prescription est acquise à l'expiration de la dixième année civile qui suit celle durant laquelle la cause d'exigibilité est intervenue, lorsque l'infraction visée aux articles 70 ou 71 a été commise dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire.

3.3.2. Notification préalable

Il est rappelé qu’en vertu de l’article 84ter du Code de la TVA que lorsqu’elle se propose d’appliquer le délai de prescription en cas de fraude ou d’intention de nuire, l’administration en charge de la taxe sur la valeur ajoutée est tenue, à peine de nullité du redressement, de notifier au préalable, par écrit et de manière précise, à la personne concernée, les indices de fraude fiscale qui existent, à son endroit, pour la période en cause.

3.3.3. Entrée en vigueur

En vertu de l’article 105 de la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses, l’article 81bis, § 1er, du Code de la TVA, tel que modifié par l’article 104 de cette même loi, est applicable aux taxes qui sont devenues exigibles à partir du 01.01.2023.

Les taxes dont l’exigibilité est intervenue avant le 1er janvier 2023 restent soumises aux délais de prescription de l’action en recouvrement visés à l’article 81bis du Code de la TVA tel qu’il était applicable avant l’entrée en vigueur de la loi du 20 novembre 2022 portant des dispositions fiscales et financières diverses.

Réf. interne : 140.017

Source : Fisconetplus

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