Travaux de rénovation : TVA à 6% ou 21% ?

Le taux de TVA (21% ou 6%) applicable aux travaux de construction réalisés sur des bâtiments d’habitation fait l’objet de nombreux litiges.

La réponse à cette question dépend notamment de la qualification de ces travaux :

  • ont-ils donné lieu à une construction nouvelle (TVA à 21%)
  • se sont-ils limités à la transformation, la rénovation, la réhabilitation, l’amélioration, la réparation ou l’entretien d’un immeuble existant (TVA à 6%) ?

La distinction entre « construction nouvelle » et « rénovation » a notamment été clarifiée par une circulaire administrative n° 6 du 22 août 1986 et par une décision E.T. 106.933 du 1er septembre 1994. Il en résulte plusieurs critères pour que des travaux de construction puissent bénéficier du taux réduit :

  • (i) Le critère de la structure : les travaux réalisés reposent d’une manière pertinente sur des murs porteurs existants et plus généralement sur la structure réelle du bâtiment existant.
  • (ii) Le critère de superficie : la superficie de la partie ancienne est supérieure à la moitié de la superficie totale de l'habitation ou du complexe d'habitation après l'exécution des travaux.
  • (iii) Le critère de la fonctionnalité : la partie nouvelle ne peut fonctionner indépendamment de la partie ancienne mais complète celle-ci et forme donc avec elle un ensemble quant à l'utilisation du bâtiment.

En pratique, le critère de la fonctionnalité est très régulièrement un obstacle, en particulier, dans les situations où un étage a été ajouté à un immeuble déjà subdivisé en appartements. L’administration semble alors systématiquement considérer qu’il y a construction nouvelle rendant applicable le taux ordinaire de 21%. Les appartements seraient indépendants et pourraient fonctionner de manière autonome après les travaux (et même être revendus séparément).

Cette position mérite d’être nuancée à la suite de réponses du Ministre des finances à deux questions parlementaires concernant la notion de rénovation.

Les parlementaires souhaitaient déterminer si cette notion visait également « l'adjonction de pièces nouvelles et l'extension de pièces existantes » (Question nr. 1350 de J.-J. Viseur du 29 juin 2006, Q.R., Ch., 2006, p. 26247) et si la transformation d’un logement privé en un bâtiment avec un certain nombre d'unités d'habitation (immeuble à appartements) pouvait bénéficier du taux réduit (Question nr. 1481 de Van De Velde du 8 février 2017, Q.R., Ch., 2017, p. 460-461).

Dans sa réponse à la deuxième question le Ministre a tout d’abord reformulé la question en précisant qu’il allait s’exprimer par rapport au cas où les « unités d’habitation distinctes (appartements) sont réalisées partiellement au sein de la partie conservée de l’ancien bâtiment et partiellement par l’agrandissement de l’ancien bâtiment (nouvelle construction et/ou surélévation) ».

Après avoir rappelé les critères de structure, de superficie et de fonctionnalité (cfr supra), le Ministre a ajouté la considération fondamentale suivante : « Eu égard à l’utilisation de parties communes dans un immeuble d’appartements, cette condition est considérée comme satisfaite en cas de transformation d’une habitation privée en un immeuble d’appartements ».

Cette réponse du Ministre peut également être lue à la lumière du récent arrêt de la Cour de cassation du 25 juin 2020 (Cass., 25 juin 2020, F.19.0069.N) concernant un immeuble de bureaux transformé en immeuble d’appartements comprenant trois bureaux et un certain nombre d'appartements à usage résidentiel privé. La Cour d’appel de Gand avait notamment constaté que les travaux supposaient une transformation importante et que des appartements qui n’existaient pas auparavant avaient été créés. Elle en avait conclu que l’administration avait à bon droit appliqué le taux de 21%. La Cour de cassation a toutefois cassé l’arrêt de la Cour d’appel en se basant sur le fait que le respect du critère de la structure n’avait pas été contrôlé.

Sur la base des réponses du Ministre des Finances, de l’arrêt de la Cour de cassation du 25 juin 2020 et d’un nombre important de décisions du Service des Décisions Anticipées, il nous semble clair que lorsqu’un immeuble à bureaux est transformé en immeuble à appartements ou qu’une maison unifamiliale est rehaussée, le critère de la fonctionnalité est rempli.

La question est vraisemblablement plus délicate dans l’hypothèse où un immeuble est déjà subdivisé en appartements et serait rehaussé pour créer un nouvel appartement. En effet, dans de nombreux cas, l’administration semble ne pas suivre la position adoptée par le Ministre en 2017 et remet en cause l’application du taux réduit de 6% sur les travaux. Mais la différence entre la rehausse d’un immeuble déjà subdivisé (TVA à 21%) de la rehausse d’une maison unifamiliale (TVA à 6%) n’est-elle pas discriminatoire ?

Le critère de la fonctionnalité tel qu’interprété par le Ministre en 2017 n’est-il pas respecté dans les deux cas ?

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