Dans la planification patrimoniale des couples mariés ou cohabitants en séparation de biens, la donation réciproque de portefeuilles mobiliers reste une solution fréquemment envisagée pour anticiper le décès de l’un des partenaires. Mais cette pratique, bien que populaire, est aujourd’hui scrutée de près par l’administration fiscale, en particulier en Flandre. Face à cette insécurité croissante, la clause d’accroissement se révèle être une alternative à la fois plus robuste juridiquement et fiscalement plus avantageuse.
La donation croisée permet aux conjoints de s’échanger leurs biens propres afin que, lors du décès du premier, le survivant recueille les deux patrimoines. Souvent structurée via un don bancaire ou un acte notarié, elle s’accompagne généralement d’une clause de retour (ou de révocation).
Exemple : Didier et Joëlle, mariés sous le régime de séparation des biens, possèdent chacun un portefeuille de 500.000 €. Ils se les donnent mutuellement, avec clause de retour. Si Didier décède en premier, Joëlle garde son propre portefeuille et récupère celui de Didier sans droits de succession, grâce à cette clause.
Mais si le portefeuille est détenu conjointement (ce qui est fréquent), le fisc – notamment le Vlabel – assimile souvent cette double donation à un abus fiscal¹. La sécurité juridique devient donc fragile, surtout en cas de contrôle.
La clause d’accroissement, aussi appelée « tontine », permet au survivant de devenir plein propriétaire de la totalité d’un bien indivis (portefeuille, actions, œuvres d’art…) dès le décès du premier contractant. Il ne s’agit pas d’une donation mais d’un contrat à titre onéreux et aléatoire, fondé sur un événement incertain : l’ordre du décès.
Avantage fiscal majeur : ce transfert n’est pas soumis aux droits de succession, ni – en cas de biens mobiliers – aux droits de donation ou d’enregistrement².
Pour être valide, la clause doit respecter deux principes :
Exemple : deux partenaires apportent chacun 500.000 € dans un portefeuille commun. L’un décède, l’autre devient plein propriétaire sans droits de succession. Même une différence d’âge de 6 à 8 ans peut être tolérée³.
Contrairement aux biens immobiliers (soumis aux droits d’enregistrement à la vente en cas d’accroissement), la clause d’accroissement sur biens mobiliers (portefeuilles, œuvres d’art, actions de sociétés) ne génère aucun droit d’enregistrement. Elle peut être conclue par acte sous seing privé ou notarié⁴. Elle échappe ainsi aux effets civils de la succession.
De plus, aucune révocation unilatérale n’est possible, contrairement à une donation classique entre époux. C’est un engagement ferme, réciproque et juridiquement sûr.
Certaines clauses prévoient que le survivant peut choisir, après le décès, de faire jouer ou non l’accroissement. Il doit alors lever l’option, souvent dans un délai de quatre mois, par acte authentique ou enregistré.
Or, depuis le 1er janvier 2023, le nouveau droit des obligations impose un effet prospectif aux conditions suspensives⁵. Ce qui signifie que, sans effet rétroactif explicite, le bien tombe dans la succession du défunt, avec imposition à la clé.
Recommandation : il est crucial de stipuler dans l’acte que la levée de l’option a un effet rétroactif au jour du décès, afin d’éviter tout droit de succession⁶.
✔Juridiquement sécurisée (contrat ferme, non révocable)
✔Fiscalement avantageuse (pas de donation, pas de succession sur les biens mobiliers)
✔Pratique (applicable aux biens indivis, sans alourdissement administratif)
✔Flexible (clause optionnelle possible, moyennant rédaction rigoureuse)
Chez Deg & Partners, nous recommandons une attention particulière à la rédaction des clauses d’accroissement. Chaque situation mérite une analyse sur mesure, mais dans un contexte de pression fiscale accrue, cette solution mérite clairement d’être (re)considérée.
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