Nouveautés en droit social en 2024 : extension des flexi-jobs mais renforcement des conditions

Introduits par la loi du 16 novembre 2015 portant des dispositions diverses en matière sociale, les flexi-jobs permettent d’une part aux employeurs actifs dans certains secteurs (jusqu’en 2018 uniquement le secteur de l’Horeca), confrontés de par la nature de leur activité (généralement saisonnière ou liée aux conditions météorologiques) à des périodes de pic fluctuantes, de lutter contre le manque de main d’œuvre, et permettant d’autre part à certains travailleurs (ou pensionnés) d’exercer une activité salariée complémentaire à des conditions (para)fiscales avantageuses.

Outre le but de stimuler le recours flexible à des travailleurs salariés, l‘objectif du législateur était de toute évidence de lutter contre le travail au noir.


Objectif du projet de loi-programme du 23 novembre 2023

Le projet de loi a, notamment, pour objectif d’une part de mettre en place un meilleur cadre juridique afin d’empêcher le abus et usages inappropriés du régime des flexi-jobs et d’autre part de l’élargir à d’autres secteurs, également confrontés à des périodes de pic fluctuantes.

Voici un aperçu des principales nouveautés devant entrer en vigueur au 1er janvier 2024 en cas d’adoption du projet de loi

Secteurs concernés

Actuellement

Commerce alimentaire (CP 119); Commerce de détail indépendant (CP 201) ;Employés du commerce de détail alimentaire (CP 202); Moyennes entreprises d’alimentation (CP 202.01) ; Sports (CP 223); Horeca (CP 302); Exploitation des salles de cinéma (CP 303.03) ;Spectacle (CP 304 - ! exclusions); Grandes entreprises de vente au détail (CP 311); Grands magasins (CP 312);Coiffure et des soins de beauté (CP 314); Etablissements ou services de santé (CP 330) ; Industrie alimentaire (CP 118) si activité principale le commerce de détail de chocolat artisanal en magasin spécialisé; boulangerie, pâtisserie et salons de consommation annexés (CP 118),Travail intérimaire (CP 322), si l’utilisateur ressort d’un des secteurs précédents ;

Extension à de nouveaux secteurs àpd 2024

  • Sous-secteurs de l’industrie alimentaire (CP 118) : boulangeries industrielles et artisanales, pâtisseries artisanales, glaciers artisanaux et salons de consommation d’une pâtisserie artisanale ; brasseries et malteries ; industrie des boissons, maraichère, fruitière, de la viande, de transformation et d’épluchage de pommes de terre ; produits laitiers ; chocolaterie et confiserie ;
  • Entreprises de garage (CP 119)
  • Pompes funèbres (CP 320)
  • Entreprises de travaux techniques agricoles et horticoles (CP 132)
  • Agriculture (CP 144)
  • Horticulture (CP 145)
  • Ecoles de conduite de véhicules à moteurs (CP 200)
  • Gestion immeubles, agents immobiliers et travailleurs domestiques (CP 323)
  • Déménagement (SCP 140.01)
  • Autobus & autocars (SCP 140.01)
  • Evènementiel (activités spécifiquement visées par le projet de loi)
  • Sur demande de l’entité fédérée et après adoption d’un arrêté royal : Garde d’enfants, Enseignement, Sport et Culture (activités spécifiquement visées par le projet de loi)

Àpd 2024 : Opting-in et opting-out

Les nouveaux secteurs visés pourront conclure une CCT sectorielle interdisant l’usage des flexi-jobs (sauf ceux qui se trouvent déjà dans le champ d’application), tandis que les secteurs n’ayant pas encore la possibilité de conclure des contrats flexi-jobs pourront conclure une CCT sectorielle introduisant l’usage des flexi-jobs.

Via AR après demande unanime de la (sous-) commission paritaire compétente

Conditions dans le chef du travailleur ou pensionné

Actuellement

  • Avoir été occupé, durant le trimestre T-3, chez un ou plusieurs employeurs à concurrence d’au moins 4/5ème d’une occupation temps plein ou avoir acquis durant le T-2 la qualité de pensionné
  • Ne pas être en préavis ou dans une période couverte par une indemnité de rupture ou d’une indemnité en compensation du licenciement à charge de l’employeur auprès duquel le travailleur exerce son flexi job

À partir de 2024 :

- Interdictions de cumul et disposition anti-abus

Ne pas être occupé, au même moment, sous un autre contrat de travail pour une occupation d’au moins 4/5 d’un emploi à temps plein au sein de la même entreprise où le flexi-job est exercé

Ne pas être occupé, au même moment, sous un autre contrat de travail pour une occupation d’au moins 4/5 d’un emploi à temps plein au sein d’une entreprise liée à l’entreprise (au sens de l’article 1.20 CSA) où le flexi-job est exercé

- Délai de carence :

Les travailleurs qui passent d’un emploi à temps plein à un emploi à 4/5e temps devront respecter un délai de carence de trois trimestres avant de pouvoir travailler en tant que flexi-jobistes.


Formalités et obligations

1) Conclusion de deux contrats :

- Contrat cadre :

Obligatoirement écrit, à durée déterminée ou indéterminée, le contrat-cadre doit être conclu au plus tard avant le début de la première occupation. Il doit contenir une série de mentions obligatoires (identité des parties ; manière et délai suivant lesquels le contrat flexi-job doit être proposé par l’employeur au travailleur ; sommaire description des fonctions ; rappel des conditions d’occupation du travailleur).

- Contrat Flexi job :

Il est conclu, pour une durée déterminé ou pour un travail nettement défini, pour chaque occupation comme flexi-jobiste. Il peut être oral pour une occupation d’une journée.

  1. En cas de non-respect de ces formalités : occupation ordinaire et perte du traitement (para)fiscal avantageux
  2. Copies des contrats à conserver par l’employeur sur le lieu de travail du travailleur concerné
  3. Déclaration Dimona « FLX » pour chaque période (max. un trimestre) avec enregistrement heure de début et de fin des prestations (an cas de contrat oral : Dimona journalière) + déclaration trimestrielle DmfA
  4. Vérification trimestrielle si le travailleur remplit les conditions d’occupation comme flexi-jobiste


Salaire

Actuellement

  • Flexi-salaire (indexé) : minimum 11, 81 €/h, sauf dans le secteur des soins de santé où il est majoré à 15,39 €/h (le cas échéant complété de suppléments, primes et avantages sectoriels)
  • Flexi-pécule (7,67% du flexi-salaire.)

À partir de 2024 :

Alignement du salaire des flexi-jobistes sur le barème salarial en vigueur dans le secteur (en l’absence de barèmes sectoriels : RMMMG)

Exception : Secteur de l’Horeca où le salaire minimum de 11,81 €/h reste d’application.


Traitement (para)fiscal avantageux


Employé

Employeur

+

Salaire brut (en ce compris les avantages, primes et suppléments normalement assujetties à l’ONSS dans le cadre d’un contrat de travail ordinaire) = salaire net (salaire non assujetti aux cotisations ONSS personnelles et non-imposable)

Actuellement :Cotisation ONSS patronale de 25 %

Àpd 2024 : augmentation à 28 %

Apd 2024 : Limite des montants défiscalisés

  • Travailleurs au moins à 4/5e : 12 000 €/an
  • Travailleurs RCC (anciennement prépension) : 7 190 €/an.
  • Pensionnés : pas de plafond

Adp 2024 : Introduction de sanctions pénales

En cas d’occupation d’un flexi-jobiste alors que les prestations effectuées par ce travailleur ne rentrent pas dans le champ d’application : Sanction de niveau 3 (amende administrative de 400 à 4.000 € ou amende pénale de 800 à 8.000 €)

En cas de non-respect des obligations relatives à la conclusion d’un contrat-cadre ou la conservation sur le lieu de travail des contrats: Sanction de niveau 2 (amende administrative de 200 à 2.0000 € ou amende pénale de 400 à 4.000 €)

Notre avis ?

Voici une initiative louable du gouvernement avec l’objectif de flexibiliser le marché du travail, qui ne peut qu’être applaudie par les entreprises actives dans les secteurs visés, qui sont, tout comme le secteur Horeca, confrontées à des pics d’activité.

Force est cependant de constater qu’elle n’est pas accueillie aussi favorablement par les organisations syndicales, qui y voient une transformation en généralité de ce qui devait rester une exception, au détriment de la concertation, de la sécurité sociale et de l’égalité entre les travailleurs, afin de, toujours selon les organisations syndicales, servir les intérêts des fédérations patronales et d’ atteindre, à n’importe quel prix, le taux d’emploi de 80%.

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