Pourquoi les ATN forfaitaires ne doivent surtout pas être supprimés !

Les ATN (avantages de toute nature) forfaitaires font l’objet actuel de discussion au sein du gouvernement. Ils pourraient dans un salut budgétaire être tout simplement supprimé, ce dont les praticiens de la f​iscalité s’inquiètent. Les mauvaises langues associent cette inquiétude à un souhait ultime des fiscalistes de baisser l’impôt, mais en réalité la motivation est tout autre. Décodage !

Qu’est-ce qu’un ATN forfaitaire ?

Un avantage de toute nature (ATN) est un avantage en biens ou services fourni par l’employeur à un salarié ou à un dirigeant, en plus de son salaire. Cela peut inclure l’usage privé d’une voiture de société, un logement de fonction, ou des équipements électroniques comme un téléphone ou un ordinateur portable. L’ATN représente donc une forme de rémunération en nature, qui doit être évaluée et soumise à l’impôt.

La méthode forfaitaire permet d’évaluer cet avantage sur une base standardisée, en utilisant des barèmes prédéfinis par l’administration fiscale. Plutôt que de calculer précisément l’avantage reçu en fonction de son utilisation réelle, le régime forfaitaire simplifie la procédure en attribuant un montant fixe ou un pourcentage de la valeur de l’avantage. L’avantage est généralement favorable.

Pourquoi opter pour un ATN forfaitaire ?

Le principal avantage de l’ATN forfaitaire est la simplicité qu’il apporte à la gestion administrative. Contrairement à une évaluation au cas par cas qui peut s’avérer complexe et chronophage, la méthode forfaitaire applique des règles claires et précises pour déterminer la valeur imposable de l’avantage.

Par exemple, pour une voiture de société, l’ATN est calculé sur la base d’un pourcentage de la valeur catalogue du véhicule et de son émission de CO2. Cette approche simplifie le travail pour les entreprises qui n’ont pas à calculer chaque mois l’utilisation réelle du véhicule pour des fins privées, mais peuvent s’en remettre à un montant prédéfini.

Le calcul forfaitaire rend également les ATN plus prévisibles pour les employeurs et les salariés. Ils savent à l’avance quels montants seront imposés, ce qui permet une meilleure gestion budgétaire tant pour l’entreprise que pour le bénéficiaire. Cela évite également les mauvaises surprises lors des contrôles fiscaux, où les évaluations au réel pourraient donner lieu à des révisions importantes et parfois complexes.

Un autre bénéfice notable de l’ATN forfaitaire est la réduction des litiges avec le fisc. Les barèmes étant prédéfinis et uniformes, l’interprétation est plus simple et laisse moins de place aux erreurs ou aux malentendus. L’administration fiscale est familiarisée avec ces barèmes, ce qui facilite la conformité et réduit le risque de sanctions ou de révisions coûteuses pour l’entreprise.

Enfin, La gestion des avantages de toute nature via un calcul réel nécessite souvent la collecte et l’analyse de nombreux documents et informations (factures, relevés de consommation, trajets professionnels vs privés, etc.). Avec l’ATN forfaitaire, les entreprises peuvent éviter ce travail fastidieux. Cela libère du temps pour les équipes comptables et administratives, qui peuvent se concentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.

Les ATN sont conformes avec la pyramide de l’OCDE

la pyramide de conformité fiscale de l’OCDE, organise sous quatre niveaux les mesures de lutte contre la fraude fiscale.

1. Au premier niveau, l’OCDE recommande l’éducation et l’assistance des contribuables via des règles simples et compréhensibles. Les ATN forfaitaires s’inscrivent parfaitement dans ce cadre en offrant des barèmes prédéfinis et standardisés, comme pour les voitures de société, où le calcul est basé sur la valeur catalogue et les émissions de CO2. Cette approche permet de réduire la complexité administrative et d’éviter les erreurs involontaires de déclaration.
2. Le deuxième niveau de la pyramide met l’accent sur les incitations et simplifications pour encourager la conformité. Les ATN forfaitaires remplissent ce rôle en rendant la déclaration des avantages simples et prévisibles pour les entreprises. Ils réduisent également les opportunités de sous-évaluation ou de manipulation de l’avantage, car les montants sont déterminés à l’avance, sans qu’il soit nécessaire de suivre l’utilisation réelle de l’avantage en nature.
3. Au troisième niveau, qui concerne les contrôles et vérifications, les ATN forfaitaires permettent aux autorités fiscales de réaliser des contrôles plus rapides et efficaces. Les barèmes étant déjà établis, il n’y a plus besoin d’analyser en détail chaque utilisation personnelle ou professionnelle, ce qui limite le risque de litige et laisse davantage de temps pour se concentrer sur des fraudes plus complexes.
4. Enfin, le quatrième niveau, qui prévoit des sanctions pour les fraudeurs, est renforcé grâce à la simplicité et à la transparence des ATN forfaitaires. Le manque de flexibilité dans le calcul rend plus difficile la fraude, et les tentatives de manipulation sont plus facilement détectables, permettant des sanctions ciblées.

Retour aux sources

L’ATN forfaitaire est arrivé progressivement dans la législation à la demande du fisc qui souhaitent réduire les litiges et obtenir un cadre législatif clair. Pour le rendre attractif, il bénéficiait d’un calcul favorable. Le gain était partagé, car le contexte engageant permettait à la fois au Trésor de récupérer plus simplement ses deniers et l’impôt dû se voyait mieux respecté grâce à sa facilité et sa simplicité.

Depuis les ministres se succèdent et l’administration changent sous leur impulsion. Il leur est demandé de ramener du rendement et de remplir les caisses à n’importe quel prix. Quant aux cabinets ministériels qui sont à la manœuvre, on à l’impression que l’inexpérience et la distance des réalités inspirent des décisions totalement inadéquates et contre-productive.

Ce malaise est patent et les contrôleurs en souffrent également. Dans notre secteur de l’expertise comptable et du conseil fiscal nous plaidons largement pour un retour à l’équilibre : facilitons la préparation du calcul de l’impôt, réduisons les sources de litiges, améliorons la prévisibilité d’un mécanisme fiscal. Tel est notre souhait.

Le monde politique devrait absolument prendre un compte cet outil plutôt que d’y renoncer, ce qui ne l’empêche nullement d’en élever le prix, avec le risque de le rendre moins attractif et donc moins performant.

Un équilibre à trouver en dialogue avec les praticiens !

Cette opinion a également été publiée dans L’Écho