Le principe de courtoisie

De nombreuses circulaires récentes publiées par l’administration ne sont guère intelligibles, notamment par ce qu’elles traduisent une méfiance du fisc vis-à-vis du contribuable et une méconnaissance du monde de l’entreprise.


Il faudrait suggérer à l’administration d’adopter un autre regard sur l’entreprise et ses conseillers. Il m’a toujours paru regrettable que dans leur formation permanente, les fonctionnaires ne suivent jamais le moindre cours sur la gestion et le fonctionnement de l’entreprise et de la vie des affaires. Le fonctionnaire qui a cet énorme privilège de disposer d’un des biens devenus le plus précieux, à savoir le temps, ne devrait-il pas aussi comprendre quelquefois que le dirigeant d’une PME, noyé dans mille obligations administratives ou contraintes financières et toujours à la conquête de marchés nécessaires à la survie de son entreprise, peut ignorer telle ou telle réglementation fiscale sans avoir à subir les foudres administratives ?


Laissons respirer les entreprises et ses dirigeants.


Le contrôleur ne pourrait-il manifester aussi de temps à autre un peu plus de compréhension pour les comptables et autres professionnels du chiffre qui sont tenus à veiller sans arrêt au respect de délais contraignants et agissent sous la pression de clients de plus en plus exigeants. Il n’échappera à personne que la profession d’expert-comptable, de conseil fiscal ou de comptable est devenue de plus difficile, en raison de la multiplicité et la complexification des tâches que requiert la fonction.


Aux côtés des principes de bonne administration, de sécurité juridique et de légitime confiance qui ont été maintes fois consacrés par la jurisprudence, il ne me paraîtrait pas inutile d’adjoindre un nouveau principe, assorti de sanction en cas de non-respect et destiné à pallier d’éventuelles situation abusives : le principe de courtoisie.


Face à des contribuables (voire leurs comptables) souvent désorientés par la diversité des dispositions et obligations fiscales et la multiplicité croissante des dispositions fiscales, l’administration, titulaire de l’imperium, se doit d’avoir une attitude plus conciliante.


Ce n’est pas faire preuve d’angélisme que de plaider pour une vision plus humaniste de la relation contrôleur/ contrôlé.


Il ne s’agit bien sûr nullement de contester au fisc le droit de faire appliquer toutes les lois fiscales et de veiller à la correcte perception de l’impôt, mais de rappeler qu’il doit le faire dans des limites acceptables et raisonnables.


Comme l’écrit le professeur Baltus, « une administration ne peut user de ses pouvoirs que pour réaliser les objectifs en vue desquels ces pouvoirs lui ont été données et doit proportionner son action à ces objectifs »[1]. Les circulaires récemment émises révèlent que certaines limites ont pourtant été dépassées.


[1] Principes de droit fiscal, cours de l’ESSF, 1992, p.37


Pierre-François COPPENS

Secrétaire Général at Ordre des Experts Comptables et Comptables Brevetés de Belgique et Conseil fiscal

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