Le gouvernement fédéral réuni en kern est parvenu à un accord sur un vaste ensemble de mesures visant à moderniser notre marché du travail. Plus de liberté, d'opportunités et de croissance : ce train de mesures doit aider notre pays à atteindre un taux d'emploi de 80 % d'ici 2030.
« Après deux années entachées par le coronavirus, nous mettons le cap sur une économie plus solide, plus durable, plus numérique et plus innovante, en réalisant des investissements et des réformes. Le renouvellement de notre marché du travail y occupe une place de choix. Les réformes quant à elles devraient élargir le champ des possibles pour les travailleurs et les entreprises », a indiqué le Premier ministre Alexander De Croo.
Le paquet contient des mesures qui donnent aux employés plus de liberté et de flexibilité pour mieux concilier vie privée et vie professionnelle. Les personnes qui le souhaitent pourront travailler plus d'heures par jour en échange d'un jour de congé supplémentaire pendant la semaine. Ainsi, elles pourront effectuer un travail à temps plein en quatre jours. Il sera également possible de travailler un peu plus une semaine et un peu moins la suivante, ce qui offre une certaine souplesse aux personnes en situation de coparentalité.
Un accès accru et facilité à la formation est également au cœur des mesures : renforcer les capacités de chacun·e en investissant dans les talents et les compétences, avec entre autres un droit individuel à la formation et des projets de formation.
L’ensemble de mesures concernant le travail vise également à aider les personnes qui perdent leur emploi à en retrouver un plus rapidement. Par exemple, les travailleurs pourront commencer à travailler pour un autre employeur dès leur période de préavis. Les personnes ayant un long préavis se verront proposer des possibilités supplémentaires d’outplacement. Le droit à la formation sera par ailleurs élargi.
Enfin, notre marché du travail sera également plus en phase avec la réalité actuelle et adapté à la nouvelle économie numérique : le travail nocturne dans le cadre du commerce électronique sera facilité et la protection des travailleurs dans l'économie de plateformes sera améliorée. Le droit à la déconnexion sera aussi étendu.
L'un des défis structurels de notre marché du travail est le manque de formation des travailleurs tout au long de leur carrière. C’est en particulier le cas pour les travailleurs qui ont les niveaux de qualification initiaux les plus faibles. Aujourd'hui, nous travaillons plus longtemps dans des métiers qui évoluent rapidement, ce qui a accru l'importance d'une formation permanente.
Afin de garantir que chaque travailleur ait accès à la formation, un droit individuel à la formation sera mis en place. Il sera de 3 jours en 2022, de 4 jours en 2023 et de 5 jours à partir de 2024.
Il est important qu'il s'agisse d'un droit individuel. Tous les travailleurs se voient ainsi désormais offrir des opportunités de formation. En effet, celles et ceux qui ont le plus besoin de formation sont actuellement les moins susceptibles d'en bénéficier. Grâce au droit individuel, les travailleurs moins qualifiés, les travailleurs âgés, les femmes et les personnes issues de l'immigration pourront en pratique bénéficier de plus de formations qu’aujourd’hui.
Au moins une fois par an, toute entreprise sera tenue d’établir un plan de formation, qui sera soumis pour avis au conseil d'entreprise ou à la délégation syndicale. Le plan doit conduire à un renforcement des compétences de tous les salariés de l’entreprise.
L’employeur élabore le plan en accordant une attention particulière aux salariés qui ne reçoivent actuellement que peu de formation.
L'économie de plateforme a connu une forte croissance ces dernières années, accélérée par la pandémie. Toutefois, de nombreuses recherches universitaires ont montré que les problèmes liés aux conditions de travail des personnes qui travaillent dans l'économie de plateforme ont également augmenté de manière significative. En outre, des questions se posent concernant le statut exact de ces travailleurs.
Afin de garantir de meilleures conditions de travail aux travailleurs des plateformes et la clarté concernant leur statut, la loi sur la nature des relations de travail (2006) sera adaptée pour tenir compte de la situation spécifique de ce secteur.
L’objectif du gouvernement est de garantir une meilleure sécurité juridique et d’obliger celles des plateformes qui jouent effectivement le rôle d’employeur à assumer toutes les responsabilités sociales que cela implique.
Cette modification se fera à l’avantage des travailleurs concernés mais aussi à l’avantage des entreprises qui respectent les règles et sont aujourd’hui soumises à une concurrence parfois déloyale.
Tous les travailleurs actifs dans l'économie de plateformes seront mieux protégés en cas d'accident du travail. En effet, la loi sur les accidents du travail du 10 avril 1971 sera étendue à ces travailleurs. C'est très important. On sait qu’un coursier travaillant dans l'économie des plateformes a 15 fois plus de risques d'avoir un accident du travail.
Or, aujourd'hui, la plupart des travailleurs de l'économie de plateformes ne bénéficient pas toujours d’assurance ou bénéficient d’une assurance limitée, avec des conséquences parfois terribles pour ceux qui subissent un accident grave.
Par le passé, la flexibilité était uniquement considérée comme un outil permettant d'accroître la productivité de l'entreprise et les bénéfices des actionnaires. L'approche adoptée aujourd'hui place le salarié au centre des mesures et part de ses intérêts.
Un travailleur qui le souhaite aura la possibilité d'effectuer son temps de travail hebdomadaire sur 4 jours au lieu de 5 en bénéficiant d’un jour de congé supplémentaire par semaine.
Par exemple, le salarié peut prolonger son week-end d'un jour ou prévoir un jour de repos au milieu de la semaine de travail, prolonger son week-end d'un jour ou intégrer un jour de repos au milieu de la semaine de travail.
En outre, un travailleur peut opter pour un régime de travail hebdomadaire variable. Dans ce cas, il travaille plus d'heures une semaine, et moins la suivante. En cas de garde alternée, par exemple, il sera ainsi possible de réserver plus de temps aux enfants.
Ces mesures de souplesse sont systématiquement activées à l’initiative du salarié, qui en formule une demande écrite en ce sens à son employeur. L'employeur doit alors donner son accord ou motiver son refus.
Afin d'éviter que le travailleur ne reste bloqué dans son choix, il pourra décider de ne pas renouveler sa demande, qui sera valable 6 mois.
Nous communiquons plus que jamais par une multitude de canaux. Même le soir, le week-end ou pendant les vacances, de nombreux travailleurs sont régulièrement contactés, ce qui rend la frontière entre le travail et la vie privée de plus en plus poreuse, avec des effets néfastes pour le travailleur (stress, burn-out, organisation familiale plus difficile, …).
Tout employeur d'une entreprise d'au moins 20 salariés sera tenu de respecter le droit à la déconnexion pour ses salariés. Les accords à ce sujet seront conclus au sein de l'entreprise, en concertation avec les syndicats, et fixés dans une convention collective de travail. L’employeur devra s'engager à ne pas attendre explicitement des salariés qu'ils lisent ou répondent à des messages en dehors des heures de travail. Cela devrait alléger la pression que de nombreux travailleurs subissent au travail.
En outre, les travailleurs et les managers seront sensibilisés à l'utilisation raisonnée des outils numériques.
Pour ceux qui travaillent à temps partiel avec des horaires variables, comme les caissiers ou les travailleurs agricoles, les horaires précis de travail ne sont pas fixés dans le contrat de travail et varient régulièrement. Le travailleur est souvent informé seulement quelques jours à l'avance de ses horaires de travail.
Le délai d’information des horaires de travail est actuellement fixé à 5 jours ouvrables. Toutefois, par CCT, une période minimale d'1 jour ouvrable seulement peut être utilisée. Il est donc difficile pour les travailleurs concernés de planifier leur vie en dehors du travail.
Afin de permettre une meilleure conciliation entre vie privée et vie professionnelle, les périodes sont augmentées. Désormais, une période d'au moins 7 jours ouvrables doit être respectée pour communiquer le calendrier exact du travail, sauf CCT sectorielle qui prévoit un nombre de jours plus réduit.
Un ensemble de mesures destinées à faciliter la participation et la mobilité sur le marché du travail, à lutter contre la discrimination et à trouver des solutions aux métiers en pénurie, sont également introduites dans le projet de loi.
Lorsqu'un travailleur est licencié et doit prester un préavis, il peu demander de se voir offrir par l'employeur un trajet de transition vers un nouvel emploi. Dans un trajet de ce type, le travailleur peut alors commencer à travailler dans ce nouvel emploi pendant son préavis.
Il s'agit d'une situation où tout le monde est gagnant : le travailleur en question peut accéder directement à un nouveau poste, le nouvel employeur peut bénéficier plus rapidement d’un nouveau travailleur et l'ancien employeur peut éventuellement recevoir une compensation de la part du nouvel employeur. Ce trajet de transition se fait sur base purement volontaire dans le chef du travailleur. Le nouvel employeur devra, à l’issue du trajet, offrir un contrat de travail à durée indéterminée.
Lorsqu'un travailleur est licencié avec un préavis d'au moins 30 semaines, il a le droit de consacrer le dernier tiers de cette période à des activités qui renforcent son employabilité, tout en conservant son salaire.
Les mesures d'amélioration de la mise à l’emploi sont financées par les cotisations sociales payées par l'employeur pendant cette période. Cela augmente les chances qu'un travailleur licencié après une longue période de travail puisse rapidement redevenir actif sur le marché du travail.
La mesure visant le travail entre 20h et minuit dans le commerce électronique, introduit par la loi-programme du 25 décembre 2017 et qui a expiré à la fin de 2019, et est réintroduite. Cela permet d’introduire du travail entre 20h et minuit dans l’e-commerce via une convention collective de travail mais sans avoir à modifier le règlement de travail de l’entreprise. Cette mesure sera évaluée après 2 ans par le Conseil national du travail.
Dans les entreprises de l’e-commerce, des expériences pilotes peuvent concluent qui prévoient une possibilité de travailler entre 20 et minuit de manière ponctuelle (durée maximum 18 mois et uniquement 1 expérience par entreprise) pour les travailleurs qui émettent le souhait de participer à cette expérience.
Ces 2 mesures ne modifient en rien l’obligation pour l’employeur de payer un sursalaire ou une prime en cas de travail de nuit.
Notre marché du travail a besoin de tous les talents. Or, les recherches montrent que le manque de diversité et la discrimination sur le lieu de travail est un phénomène important.
Une nouvelle cellule est créée au sein du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale qui fournira tous les deux ans aux commissions et sous-commissions paritaires (partenaires sociaux) des données sur la diversité dans leur secteur. Un rapport sur la situation au sein de l'entreprise doit être établi sur cette base. En cas de différences inexpliquées entre les résultats sectoriels et ceux de l’entreprise, les entreprises devront élaborer un plan d'action pour les éliminer.
Notre marché du travail fait face à un nombre important d’emplois vacants. Afin de lutter contre ce phénomène, un monitoring des causes des pénuries sera mis en place.
Tous les 2 ans, les partenaires sociaux sectoriels seront invités à débattre et à émettre un rapport sur la problématique des métiers en pénuries. Ce rapport devra expliquer les causes des pénuries et proposer des mesures pour y remédier.
Par ailleurs, une plateforme interfédérale a été mise en place avec les Régions afin d’analyser et mettre en œuvre des mesures pour lutter contre les emplois vacants.