Numéro un de la taxation des rémunérations en Europe, plan cafétaria et politiques de rémunérations " flexibles " dévoyés, cash for cars et prime de mobilité, rulings fiscaux dénoncés… Quand le refus d’admettre le problème mène à l’impasse…
Il faut les voir ces hommes politiques, ces juristes, ces spécialistes en " compensation et benefits " tellement heureux de nous vendre le cash for cars, les primes de mobilité, les plans cafétaria, la rémunération à " points " comme LA bonne solution qui fera plaisir à tout le monde.
La vérité crue c’est Eurostat et l’OCDE qui la dévoilent, au premier la Belgique doit la seconde place des pays qui taxent le plus et au second la première place pour la taxation des revenus du travail (cotisations de sécurité sociales et impôts confondus). Ce malgré le tax shift…
Alors qu’au même moment, l’administration fiscale belge elle-même remet en cause des rulings fiscaux en matière d’options sur action ou de plan cafétaria (BNP Paribas est actuellement en pleine discussion concernant son système de rémunération). Au point d’avoir nécessité une sortie du Ministre des Finances.
Si aujourd’hui, la Belgique est le paradis des rémunérations alternatives c’est bien car la rémunération y est trop taxée. Et depuis longtemps...
Les plans cafétaria et autres systèmes de rémunérations en points ou " flexibles " sont à la mode eux qui permettent soi-disant aux travailleurs de choisir selon leurs besoins de vie entre divers avantages " plus favorablement taxées " tels que voiture de société, plan d’assurance de groupe, options sur action ou warrants, allocations familiales complémentaires, jours de congés supplémentaires, services de petites travaux, etc. Pourtant, il ne s’agit en réalité que d’une hypocrisie masquant un glissement constant et qui s’accélère des rémunérations cashs – lourdement taxées – vers " autre chose ".
Je le dis, les travailleurs préféreraient - s’ils avaient le choix - disposer d’argent cash en poche avec la liberté d’en faire ce qu’ils veulent et quand ils le veulent plutôt que de devoir opter pour des formules pré-établies, des paniers d’avantages soi-disant dans leur intérêt.
Toutes ces formules n’aboutissent qu’à restreindre la liberté du travailleur de disposer de sa rémunération librement. Et cela car celle-ci est tellement taxée que chacun en Belgique cherche désespérément le moyen d’améliorer son pouvoir d’achat quitte à accepter de voir cette liberté rabotée.
Pire, avec le cash for cars ou les primes de mobilité, on en arrive à fictivement traiter de la rémunération cash plus favorablement en lui accolant une autre étiquette avec toutes les questions et difficultés que cela suscite. On en viendrait à ne plus savoir ce qui est du cash ou ne l’est pas et on ouvre la voie à des abus.
Et ce que l’on donne d’une main, on essaie de le reprendre de l’autre avec des rulings dénoncés en douce (témoin d’une véritable guerre interne au fisc), avec des conditions – je pense au bonus CCT 90 par exemple - rendues années après années plus strictes -, avec des conditions supplémentaires inventées (je pense à la limite à 20% sur l’octroi d’options sur actions qui ne trouve aucune base légale), etc.
Nous sommes, je pense, aux limites du système. Quand la sécurité juridique devient aléatoire, la liberté des travailleurs entamée, les rentrées budgétaires incertaines et les employeurs poussés dans une course en avant à l’optimalisation des rémunérations.
Discussion étrange avec un spécialiste des plans cafétaria, qui reconnaît effectivement l’atteinte à la liberté de disposer librement de sa rémunération, mais vante l’instrument d’éducation des comportements que l’état peut utiliser pour encourager qui à prendre une voiture plus petite et plus écologique (pour palier à l’inertie du gouvernement face aux voitures de société, cauchemar écologique mais soupape de sécurité du système des rémunérations en Belgique), qui à épargner pour sa pension (pour palier aux déficiences de la pension légale), qui à prendre une assurance vie (pour palier aux déficiences de la sécurité sociale), qui a obtenu une intervention dans les frais de crèche (pour palier à une politique de dénatalité), etc.
Tout travail mérite salaire. On devrait ajouter, tout travail mérite un salaire raisonnablement taxé. Cela éviterait cette surenchère de créativité en matière de rémunérations alternatives qui ne profite finalement qu’aux spécialistes du secteur.