Question a comprendre au regard de la Nouvelle CPDI belgo-française en remplacement de la CPDI franco-belge
Dès la diffusion du texte de la nouvelle convention belgo-française signée le 9 novembre 2021, une rumeur s'est rapidement propagée : les secondes résidences françaises pourraient être imposées en Belgique lorsqu’aucun revenu de location n’aurait été effectivement imposé en France ! Analyse.
Si le texte prévoit bien que la Belgique se réserve le droit d’imposer tout revenu autre qu’un dividende, intérêt ou redevance qui n’a pas été effectivement imposé en France, il y a lieu de douter que la nature de ces revenus soit immobilière. Pour rappel, les dispositions de la loi du 17 février 2021 ont, pour les immeubles situés à l'étranger, instauré un mode identique de détermination du revenu immobilier à celui appliqué pour les immeubles belges. Elles ont aussi prévu qu’un immeuble d'habitation génère un revenu similairement imposable selon sa mise en location ou non. Après avoir été condamnée deux fois par la CJUE pour maintien d’une discrimination et avoir été contrainte au paiement d’astreintes, il serait hautement périlleux pour le fisc belge de se retrancher derrière ce texte indigeste pour réintroduire une ségrégation dans le traitement de l’imposition en Belgique d’un immeuble français non loué !
Mais, alors, quels seraient les revenus visés par cette nouvelle disposition qui semble être une revanche du fisc belge ?
Fin des années '90, il était notoire qu’une domiciliation en France, peu avant le versement d’un capital d’assurance-groupe, permettait d’éviter, en Belgique, la retenue du précompte professionnel sur le montant de la pension extra-légale et de bénéficier ainsi du capital sans ponction fiscale, suite à un vide juridique du côté français.
Une disposition anti-émigration fût inscrite à l’art. 346bis CIR92 et appliquée par l’administration, mais deux arrêts de la Cour d’Appel de Bruxelles, en février et octobre 2002, ont estimé que le recours à cet article litigieux outrepassait la CPDI franco-belge, ce qui fût confirmé par un arrêt de la Cour de cassation du 5 décembre 2003. L’administration se résigna ainsi le 12 juillet 2007 dans une circulaire dans laquelle elle indiquait ne plus se référer à l’art. 346bis mais fixait, avec une précision sourcilleuse, la notion de domicile fiscal et de siège de la fortune. Ainsi, il avait été escompté que la multiplication des conditions à remplir, pour pouvoir être reconnu par l’assureur débiteur du capital comme un résident français, devait dissuader certains citoyens de s'y domicilier pour y percevoir leur pension complémentaire en franchise d'impôts. Ladite circulaire précisa que les services de taxation étaient chargés de vérifier pendant les trois périodes imposables postérieures au déménagement si la domiciliation en France était bien restée effective.
Dans l’entre-temps, la France, qui ne conçoit comme prestation de retraite complémentaire que la seule forme d’une rente, constata qu'une inégalité de traitement était survenue entre les bénéficiaires du régime français et les travailleurs frontaliers qui bénéficiaient de retraites d’origine suisse sous forme de capitaux. Le législateur intervint en instituant, à compter du 31 juillet 2011, un prélèvement de 7,5% sur les capitaux de retraite versés à tous les résidents français. Toutefois, ce prélèvement forfaitaire ne s’applique qu'en cas de demande préalable, en alternative au mécanisme du quotient prévu à l’article 163-0 A CGI.
Ainsi, le citoyen belge domicilié en France au moment de la perception de son capital-pension doit, non seulement prouver que sa domiciliation fiscale est bien française, mais aussi opter, lors de la déclaration desdits capitaux en France, pour le régime d’imposition qui lui est le plus favorable.
Aujourd'hui déjà, le SPF Finances entend, lors de contrôles à l’impôt des non-résidents personnes physiques domiciliées en France, vouloir imposer en Belgique les capitaux et valeurs de rachat en faisant fi des règles de territorialité et en s’abstenant de toute référence légale. Mais, la remise au contrôleur belge de la preuve de l'imposition française desdits revenus semble clore la procédure contentieuse.
Avec l'entrée en vigueur de la nouvelle convention, l’administration sera en droit, après un retour en Belgique dans les délais légaux, d’imposer lesdits capitaux lorsque l’impôt français n’aura pas été effectivement réglé. Et le contribuable ne pourra plus invoquer l’arrêt de la C.Cass.2003 pour justifier l’attribution à la France du droit d’imposition au moment du paiement des capitaux.