La direction d'Audi Brussels a mis fin unilatéralement à la phase d’information et de consultation des travailleurs dans le cadre de la fermeture du site. Est-ce légal?
Le 27 février, Audi Bruxelles fermera ses portes. Le 12 décembre dernier, la direction annonçait mettre fin unilatéralement à la phase d’information et de consultation, au grand dam des syndicats, qui parlent d’un contournement de la procédure et appellent à revenir à la table des négociations. Ce qui pose la question de la légalité de cette décision de clôture de l’information et de la consultation.
Pour rappel, dans le cadre de la fameuse "procédure Renault" instituée il y a près de 25 ans suite à la fermeture de l’usine Renault de Vilvorde et organisée par la loi du 13 février 1998 (article 66), il faut distinguer deux phases.
La première est la phase d’information et de consultation, qui débute par l’annonce de l’intention de procéder à un licenciement collectif et au cours de laquelle l’employeur doit informer les travailleurs des raisons justifiant cette intention, permettre à ceux-ci de poser des questions à propos du licenciement collectif envisagé et de formuler des arguments ou de faire des contre-propositions à ce sujet et y répondre.
La seconde phase est la phase de négociation du plan social, qui démarre par l’annonce de la décision de procéder à un licenciement collectif.
Ces deux phases sont différentes quant à leur objet, mais surtout quant au timing. En effet, la loi ne fixe aucun délai limite pour accomplir la première phase alors qu’elle prévoit un délai maximum de 30 jours (extensible à 60) pour la seconde.
Stratégiquement, les syndicats essaient donc de "polluer" la phase d’information et de consultation en tentant d’entamer la négociation du plan social pour ne pas être tenus par un calendrier contraignant. Aussi, ils pourront tenter de faire traîner cette première phase – dans certains cas jusqu’à six, voire neuf mois.
Rien dans la loi n’interdit à l’employeur de clôturer unilatéralement la phase d’information et de consultation même si, en général, il cherchera à obtenir un consentement des représentants des travailleurs. Une clôture de commun accord est, en effet, la solution la plus "safe" pour l’employeur, mais en cas de refus des représentants des travailleurs, il pourra décider sous sa responsabilité de mettre fin à l’information et la consultation s’il estime avoir suffisamment informé les travailleurs et répondu à toutes leurs questions et interrogations.
Dans ce cas, l’employeur aura pris soin de s’en ménager la preuve, notamment via les minutes du conseil d’entreprise.
En effet, si les représentants du personnel ne marquent pas leur accord sur la fin de la phase d’informations et de consultations (ou émettent des contestations sur celle-ci), cela ouvre la possibilité pour les travailleurs de contester celle-ci individuellement, par exemple, afin d’obtenir des dommages et intérêts comme dans le cas de la fermeture de Continental à Herstal en 2001. Ceci sans compter les risques de sanction pour le non-respect de la législation sur le licenciement collectif avec, depuis le 1ᵉʳ juillet 2024, une sanction aggravée de niveau 3, conformément à l’article 193 du Code Pénal Social.