Budget 2024 : mise en conformité avec le droit européen de deux mesures anti-abus

L’administration fiscale dispose d’un arsenal de mesures #anti-#abussusceptible de déjouer les stratégies de #planification #fiscale internationale, consistant pour une société belge à transférer des bénéfices imposables vers des juridictions où la fiscalité est plus faible qu’en Belgique, notamment:

  • L’article 54 du CIR, qui soumet à des conditions fort strictes la déduction d’intérêts, de redevances ou de rémunérations de prestations payés à des sociétés bénéficiant d’un régime de faveur.
  • L’article 344,§2 du CIR, qui instaure un régime d’inopposabilité des transferts d’actifs vers des sociétés bénéficiant d’un régime de faveur.

Violation du droit européen

A l’heure actuelle, ces dispositions restent quasiment lettre morte en pratique, en raison d’un problème de violation du #droit #européen. Dans son célèbre arrêt SIAT rendu en 2012, la Cour européenne de justice a en effet estimé que les conditions spéciales de déduction de l’article 54 du CIR constituaient une restriction illicite à la libre circulation des services au sein de l'Union européenne. La Cour s'est essentiellement fondée sur le fait que ses conditions d’application (et notamment celle liée au niveau d’imposition du bénéficiaire) n’étaient pas rédigées avec une précision suffisante. Ce raisonnement peut être transposé à l'article 344,§2 du CIR. Le tribunal de première instance de Bruxelles a déjà jugé à plusieurs reprises (jugements du 13 avril 2013 et du 22 juin 2020) que l’article 344,§2 du CIR n’était pas applicable à des schémas de transferts d’actifs vers des entités luxembourgeoises faiblement taxées, car l’article 344,§2 du CIR est contraire au droit européen (argumentation fondée sur l’arrêt SIAT).

Mise en conformité avec le droit européen

Dans le cadre de la confection du budget fédéral 2024, le gouvernement a décidé de mettre ces deux dispositions en conformité avec le droit européen (ce qui est en soi une bonne chose, même s'il a fallu plus de 10 ans...), en apportant les modifications suivantes aux deux dispositions :

En visant désormais seulement les transactions entre sociétés liées.

En précisant la condition liée au niveau d'imposition du bénéficiaire des paiements/actifs transférés (soumission à un taux d'impôt effectif inférieur à la moitié de l'impôt belge)

En libellant la preuve contraire comme suit: "à moins que le contribuable ne prouve par tous moyens qu'elles ont été réalisées dans le cadre d'opérations réelles et sincères et avec des personnes autres que des constructions artificielles".

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