Exploitation d’une salle de fitness: 6 ou 21% de TVA? – Arrêt de la CJUE du 22 septembre 2022

Les faits

Dans l’affaire que la Cour de Justice de l’Union européenne eut à connaître, un exploitant de salle de sport exerçait une activité consistant à permettre au public d’accéder à des installations sportives et d’utiliser du matériel aux fins de l’entrainement physique. Cela se déroulait avec ou sans accompagnement personnalité, seul ou en groupe, les clients pouvaient aussi accéder à des cours collectifs.

Lesdites activités étaient soumises au taux normal de la TVA, soit 21%. A la suite d’une jurisprudence nationale, l’exploitant a décidé qu’en réalité, le taux réduit de 6% de TVA, prévu par l’arrêté royal n°20, trouvait à s’appliquer. En conséquence, l’assujetti concerné a introduit une demande de remboursement de l’excédent de TVA de 15% acquitté jusqu’alors. L’administration de la TVA n’étant pas de cet avis, le litige fut porté devant le juge, qui a décidé de poser une question préjudicielle à la Cour de Justice :

Est-ce qu’une prestation de services consistant en l’octroi du droit d’utilisation d’infrastructures sportives et en la fourniture d’un accompagnement individuel ou collectif peut être soumise à un taux réduit de TVA ?

Le raisonnement de la CJUE

En premier lieu, il est rappelé que le taux normal de TVA est la règle, le taux réduit étant une exception à interpréter de manière stricte. Selon la Cour, le taux réduit de 6% prévu par la législation européenne vise à encourager la pratique du sport et ne se limite pas au simple octroi d’accès à des infrastructures sportives, mais comprend aussi l’utilisation qui en est faite.

Dès lors, il convient de se demander si les activités d’accompagnement personnalisé et de cours collectifs, impliquant l’utilisation des infrastructures sportives, forment une prestation unique avec l’octroi du droit d’accéder et d’utiliser les installations sportives en cause. Rappelons que nous sommes en présence d’une « prestation unique » lorsque deux actes fournis par l’assujetti sont si étroitement liés qu’ils forment, une seule prestation économique indissociable dont la décomposition revêtirait un caractère artificiel [arrêt Levob Verzekeringen et OV Bank, C-41/04, point 22].

Cela vaut aussi en cas de prestations accessoires à une prestation principale. Une prestation est accessoire lorsqu’elle constitue pour la clientèle non pas une fin en soi, mais le moyen de bénéficier dans les meilleures conditions du service principal du prestataire [arrêt Mailat, C-17/18, point 34].

En l’espèce, les formules proposées aux clients permettent d’accéder tant à la salle de sport qu’aux cours collectifs, sans distinction aucune, ce qui constitue un indice attestant de l’existence d’une prestation unique.

Dès lors, selon la Cour, rien ne s’oppose à l’application du taux réduit aux prestations de l’exploitant d’infrastructures sportives.

En conclusion, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, sur base des données factuelles dont elle dispose et de l’arrêté royal n°20 :

  • S’il s’agit d’une prestation de service unique bénéficiant du taux réduit de 6% ;
  • S’il s’agit de plusieurs prestations de services, certaines bénéficiant du taux réduit de 6%, d’autres restant soumises au taux normal de 21%.


Conclusion

Selon la CJUE, une prestation de services consistant en l’octroi du droit d’utilisation des installations sportives d’une salle de sport et en la fourniture d’un accompagnement individuel ou en groupe peut être soumise à un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, lorsque cet accompagnement est lié à l’utilisation de ces installations et est nécessaire à la pratique du sport et de l’éducation physique ou lorsque cet accompagnement est accessoire au droit de l’utilisation desdites installations ou à leur utilisation effective.

Il revient au juge national, en l’occurrence au juge belge, de trancher sur cette base. Wait & See…

Aurélie Soldai, Camille De Neyer et Karim Tourmous, Avocats au Barreau du Brabant Wallon – Aurélie Soldai SRL

Source: https://curia.europa.eu; CJUE C-330/21, 22 septembre 2022

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