À quelques jours d’un conclave budgétaire important, certains esprits s’échauffent, et c’est normal. Voici une cinquantaine d’économistes qui annoncent la banqueroute du pays tandis que d’autres parlent de faillite du pays dans 5 à 10 ans.
Dans le grand respect de la multiplicité des opinions, de quoi parle-t-on, de manière non polémique? Peut-on affiner les chiffres ?
La dette publique pourrait atteindre 120 % du PIB en 2028, selon le FMI. C’est bien sûr un chiffre très (trop) élevé… mais il gomme le fait que près de 30 % de la dette publique belge est refinancée à un taux qui sera maintenu très bas par la BCE. C’est aussi oublier que le PIB ne tient pas compte d’une économie informelle de l’ordre de 15 % de ce même PIB. Si on tient compte de ces deux paramètres, le ratio dette/PIB tombe à 80 %.
Il est vrai qu’il ne suffit pas de trouver un créancier, encore faut-il que le taux d’intérêt soit faible !
Et c’est le cas : l’État s’endette à un taux d’intérêt NÉGATIF après déduction de l’inflation. La dette se dissout donc dans le temps, et ce sont les déposants bancaires qui financent cette dissolution par une rémunération insuffisante de leur épargne.
Mais la vraie question n’est pas là : en connaissant les opinions d’un grand nombre, ces économistes se prononcent plutôt pour une baisse de la fiscalité : ils s'insurgent contre la pression fiscale.
Donc le redressement de la Belgique qu’ils préconisent implicitement sans oser l’articuler explicitement, c’est une baisse des dépenses publiques ? Et lesquelles ? Les pensions, déjà rabotées ? Les salaires ou le nombre des fonctionnaires ? Ou bien, ce qui me semble intuitif dans leur raisonnement, les dépenses sociales?
Car c’est à cela qu’on arrive avec les mentons prognathes et mussoliniens de la virilité budgétaire : à un démantèlement de l’État social.
Loin de moi l’idée d’avancer qu’il est parfaitement géré : ce n’est pas le cas. Mais brandir la menace d’une débâcle du pays ne peut pas être dissociée de l’expression d’un modèle de société. De surcroît, ces mêmes économistes clament tous la nécessité d’une transition énergétique et d’une remédiation environnementale. Mais comment, sinon par l’utilisation de l’épargne privée et de l’endettement public ? Là aussi, il faut être clair.
Et si certains assimilent à la Grèce, il faut se rappeler que les mesures qui lui furent imposées mirent ce pays dans une très grave récession qui conduisit à un désinvestissement public dont la Grèce constate aujourd’hui avec effroi les conséquences.
Moi, je veux dire paisiblement une chose, car je passe mon temps en conférences dans des milieux très différents : la population vit une GRANDE ANGOISSE liée à tous les défis qui l'enserrent. Cette population a besoin de calme, d'apaisement, de prévisibilité et de protection étatique. Pas d'agitation liée à une hypothétique faillite du pays. Ou alors, il faut immédiatement une quantification précise des mesures envisagées.