Plusieurs modifications importantes vont impacter la vie de ceux qui sont chargés de l’administration des personnes morales (qu’il s’agisse de sociétés, d’associations ou de fondations).
La présente brève est consacrée aux nouveaux plafonds de responsabilité des administrateurs (art. 2:57 CS&A).
Le CS&A plafonne désormais la responsabilité des administrateurs de toutes les personnes morales et ce, en fonction de leur taille.
L’objectif poursuivi est double :
En d’autres termes, on veut permettre aux administrateurs de couvrir plus facilement leur responsabilité auprès d’une compagnie d’assurance (sans rendre pour autant cette couverture obligatoire).
Le CS&A prévoit différents plafonds de responsabilité qui dépendent de la taille de la personne morale dans laquelle la personne assure un mandat d’administrateur.
La taille de la personne morale sera elle déterminée en fonction des critères habituels que sont son chiffre d’affaires et le total de son bilan (le nombre de personnes qui travaillent pour la personne morale n’intervient par contre pas).
Ce sont ces critères qui serviront de référence pour déterminer le plafond applicable.
Ils seront automatiquement indexés en tenant compte de l’indice des prix à la consommation.
Seront sans influence sur l’application des plafonds :
Or, il est possible que les victimes n’agissent pas conjointement. Par conséquent, les dernières à agir risquent de constater qu’en raison de l’accueil d’actions antérieures, le plafond de responsabilité soit atteint.
Puisqu’on se réfère à des critères de taille, il faut bien qu’on détermine sur quelle période. Le CS&A retient, comme période de référence, les trois années précédant l’intentement de l’action en responsabilité.
Sachant qu’aucun dépassement de seuil ne peut avoir eu lieu durant cette période de trois ans. Si tel est le cas, on se réfère alors au plafond supérieur.
Une exception concernant le premier plafond de 125.000,00 EUR : la période de référence sera l’exercice précédant l’intentement de l’action en responsabilité (et non pas les trois années précédant l’intentement de l’action).
Comme toutes les personnes morales ne sont pas âgées d’au moins trois ans, il fallait bien prévoir une exception pour ce qui les concerne. On prendra alors la période écoulée depuis leur constitution, en reconstituant le chiffre d’affaires et le bilan moyens d’une année.
Pour les personnes morales qui tiennent une comptabilité simplifiée, il convient d’entendre par chiffre d’affaires, le montant des recettes « autres que non récurrentes » (dixit le CS&A… on vise donc les recettes récurrentes…) et par total du bilan, le plus grand des deux montants figurant sous les avoirs et les dettes.
Le bénéfice de ces nouveaux plafonds ne se fait pas sans contrepartie (art. 2:58 CS&A) :
Dit autrement, les plafonds ne pourront être réduits en-deçà de ceux retenus par le CS&A.
Ce qui ne veut pas dire que la société ne pourra couvrir à ses frais la responsabilité de ses administrateurs auprès d’une compagnie d’assurances.
En outre, le CS&A a explicitement prévu qu’une société-mère pourra couvrir la responsabilité d’une personne qu’elle a désignée comme administrateur de l’une de ses filiales.
Les plafonds ne pourront pas trouver à s’appliquer dans un certain nombre de cas (art. 2:57, § 3, CS&A) :
Dans les travaux préparatoires, on cite, à titre d’exemple, le transfert d’actifs ou de chiffre d’affaires du patrimoine de la société vers le patrimoine de l’administrateur, transfert ayant conduit à la faillite de la société ; on cite également le cas de l’abus de biens sociaux s’il conduit à la faillite.
Enfin, on relèvera que par la voie d’un amendement, la Chambre des représentants a inséré une nouvelle exception à l’application des plafonds, et elle est de taille. Les plafonds ne trouvent pas à s’appliquer aux fautes légères habituelles plutôt qu’accidentelles ainsi qu’aux fautes graves.
Les premières réactions doctrinales sont assez vives et critiques face à cette nouvelle exception dont on peut craindre qu’elle prive le régime d’une bonne partie de son intérêt. Tout dépendra de l’interprétation que la jurisprudence donnera à ces notions, et plus particulièrement, à la notion de faute grave.