Le délai de 3 mois pour solliciter l’effacement des dettes du failli est inconstitutionnel

La réforme du droit de l’insolvabilité était notamment dictée par la volonté de promouvoir la seconde chance afin d’encourager un nouveau départ et l’entreprenariat des entreprises ayant connu des difficultés. Dans cette optique, le système de l’excusabilité du failli (malheureux et de bonne foi) a été remplacé par le système de l’effacement.


Cette procédure dépend d’une démarche proactive du failli personne physique puisqu’il doit en faire la demande dans les 3 mois de la publication du jugement de faillite. En effet, l’article XX.173 du CDE précise que : « l’effacement est uniquement octroyé par le tribunal à la requête du failli, requête qu’il doit ajouter à son aveu de faillite ou déposer dans le registre au plus tard trois mois après la publication du jugement de faillite, même si la faillite est clôturée avant l’expiration du délai ».


Ce délai de 3 mois est un délai de forclusion, c’est-à-dire un délai qui a une échéance fixe et dans lequel, un droit doit être exercé ou une demande introduite sous peine d’être perdu.


Lorsqu’il s’agit d’un aveu de faillite, la situation est assez simple puisque la demande en effacement est généralement déposée en même temps que l’aveu. Par contre lorsque le débiteur est cité en faillite, il n’est pas toujours avisé de la situation et il se peut que le délai de 3 mois soit expiré au moment où il en prend conscience et qu’il perde alors le droit à l’effacement de sa dette.


La loi donne également la possibilité au curateur, au ministère public et à tout intéressé de s’opposer en tout ou en partie à la demande en effacement et pour autant qu’il puisse être démontré que le failli a commis des fautes graves et caractérisées qui ont contribué à la faillite. Si l’opposition est fondée ou si le failli manque à solliciter l’effacement de ses dettes dans le délai de trois mois, alors les créanciers recouvrent leurs droits et peuvent obtenir le paiement de leurs créances.


Par contre, si une demande d’effacement est introduite et qu’aucune réclamation n’est formulée par un tiers intéressé, le juge ne dispose d’aucune marge d’appréciation et doit ordonner l’effacement du solde des dettes qui a été demandé dans les délais. Raison pour laquelle, il est généralement considéré que l’effacement est pratiquement automatique.


Une requête en effacement a donc une importance capitale pour le failli qui, en l’absence d’une telle demande, se verrait contraint de devoir apurer le solde de ses dettes malgré sa faillite. En d’autres termes, ses actifs auront été vendus pour apurer ses dettes et il devra tout de même rembourser ses créanciers pour le solde.


La Cour constitutionnelle a estimé que dans l’hypothèse où le failli néglige de demander l’effacement dans le délai de 3 mois, l’objectif du législateur considéré comme essentiel et consistant à promouvoir l’entreprenariat et la seconde chance serait compromis. La Cour ajoute que le moment auquel le failli demande l’effacement n’a aucune incidence sur la gestion de la masse, sur la déclaration et la vérification des créances ou sur la liquidation de la faillite.


A cet égard, il faut également rappeler que le moment auquel le curateur, le ministère public ou un tiers intéressé s’oppose à la demande en effacement n’a pas non plus d’impact puisqu’il est possible de contester l’effacement sans qu’une demande n’ait été introduite par le failli et si une demande est introduite, la tierce opposition est toujours possible dans les trois mois de la décision. Partant, la partie qui souhaite s’opposer à l’effacement peut le faire à tout moment de la procédure et encore trois mois après la clôture de faillite.


La Cour a donc jugé que le délai de 3 mois prévu par l’article XX.173, § 2 du CDE produit des effets disproportionnés pour le failli personne physique qui perd de ce fait toute possibilité qu’un juge se prononce sur l’effacement du solde de ses dettes et qui doit dès lors irrévocablement continuer à supporter sur l’ensemble de son patrimoine les dettes qui n’ont pas été réglées par la liquidation de la masse.

Nul doute que ce délai de trois mois va rapidement disparaitre de la loi. Ceci étant, la prudence commande toujours d’introduire la demande d’effacement dans les plus brefs délais.


Source : LawTax

Mots clés

Articles recommandés

Pouvoirs instantanés : comment l'autoritarisme s'invite sur les réseaux sociaux

10 signaux d’alerte pour l’économie belge

Quelle est la situation des travailleurs en cas de faillite avec reprise d'actifs?