Une directive de l’Union 1 prévoit que tous les intermédiaires et, à défaut, le contribuable, impliqués dans des dispositifs fiscaux transfrontières potentiellement agressifs (pouvant notamment conduire à l’évasion et la fraude fiscales) doivent les déclarer aux autorités fiscales compétentes (ci-après l’« obligation de déclaration »).
En 2020, des organisations d’avocats et de fiscalistes ainsi que des barreaux ont saisi la Cour constitutionnelle belge. Ils estiment que la loi belge qui transpose la directive doit être annulée étant donné que la directive viole, selon eux, un certain nombre de dispositions de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de principes généraux du droit de l’Union.
La Cour constitutionnelle belge a décidé de poser des questions préjudicielles à la Cour de justice.
Dans son arrêt, la Cour constate, tout d’abord, que la circonstance que la directive ne limite pas l’obligation de déclaration au seul domaine de l’impôt sur les sociétés n’affecte pas la validité de cette directive au regard des principes d’égalité de traitement et de non-discrimination ainsi que des articles 20 et 21 de la charte des droits fondamentaux.
Elle constate, ensuite, que le degré de précision et de clarté de la terminologie utilisée dans les dispositions de la directive soumises à son examen ne met pas en cause la validité de cette dernière au regard des principes de sécurité juridique et de légalité en matière pénale, et elle considère, de même, que l’ingérence dans la vie privée de l’intermédiaire et du contribuable qu’implique l’obligation de déclaration est définie de manière suffisamment précise eu égard aux informations que cette déclaration doit contenir.
Par ailleurs, dans son arrêt du 8 décembre 2022 (Orde van Vlaamse Balies e.a.), la Cour avait jugé que l’obligation imposée à l’avocat, dispensé de l’obligation de déclaration en raison de son secret professionnel, de notifier aux autres intermédiaires impliqués dans le dispositif fiscal leurs propres obligations de déclaration (ci-après l’« obligation de notification ») violait ledit secret professionnel 2 .
Dans l’arrêt de ce jour, la Cour explique que l’arrêt du 8 décembre 2022 vaut seulement à l’égard des avocats au sens de la directive visant à faciliter l’exercice permanent de la profession d’avocat dans un État membre autre que celui où la qualification a été acquise 3 et non à l’égard des autres professionnels éventuellement habilités à assurer la représentation en justice.
La confidentialité de la relation entre l’avocat et son client bénéficie d’une protection tout à fait spécifique, qui tient à la position singulière qu’occupe l’avocat au sein de l’organisation judiciaire des États membres, ainsi qu’à la mission fondamentale qui lui est confiée et qui est reconnue par tous les États membres. Enfin, la Cour constate que l’obligation de déclaration, qui incombe aux intermédiaires ne bénéficiant pas de la dispense de cette obligation en raison du secret professionnel auquel ils sont tenus et, à défaut, au contribuable concerné, constitue une ingérence proportionnée et justifiée dans le droit au respect de la vie privée, compris comme le droit de toute personne d’organiser sa vie privée.
1 Directive 2011/16/UE du Conseil, du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799/CEE, telle que modifiée par la directive (UE) 2018/822 du Conseil, du 25 mai 2018.
2 Voir également communiqué de presse n° 198/22.
3 Directive 98/5/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 février 1998, visant à faciliter l’exercice permanent de la profession d’avocat dans un État membre autre que celui où la qualification a été acquise, telle que modifiée par la directive 2013/25/UE du Conseil, du 13 mai 2013
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