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Reporting de durabilité: un report confirmé de deux ans pour de nombreuses entreprises belges

Le 16 septembre 2025, un projet de loi a été déposé à la Chambre des représentants afin de reporter de deux ans l’entrée en vigueur des obligations de reporting en matière de durabilité (Corporate Sustainability Reporting Directive – CSRD), pour certaines catégories d’entreprises belges¹.

Ce texte, qui transpose en droit belge la directive européenne dite « stop the clock », constitue une mesure d’adaptation essentielle. Elle tient compte du retard de préparation de nombreuses sociétés, tout en confirmant la progressive mise en œuvre de la transparence extra-financière en Belgique².

En synthèse : ce report apporte une bouffée d’oxygène aux entreprises, mais il n’annule pas l’objectif central d’intégrer la durabilité dans l’information financière.


1. Cadre juridique : de la CSRD au projet de loi belge

1.1. La CSRD et sa transposition en Belgique

La directive (UE) 2022/2464 (CSRD) impose aux grandes entreprises européennes de publier des informations détaillées sur la durabilité dans leur rapport de gestion. Elle couvre :

  • les enjeux environnementaux (émissions de gaz à effet de serre, biodiversité, etc.),
  • les aspects sociaux (conditions de travail, diversité, droits humains),
  • la gouvernance (éthique, contrôle interne, gestion des risques).

En Belgique, la loi du 2 décembre 2024 a transposé cette directive, fixant un calendrier par vagues selon la taille et la nature des entreprises¹.

Ce calendrier prévoyait initialement :

  1. Vague 1 : organisations d’intérêt public (OIP) > 500 salariés, application dès l’exercice 2025 ;
  2. Vague 2 : autres grandes entreprises (> 250 salariés), application dès l’exercice 2025 (publication en 2026) ;
  3. Vague 3 : PME cotées, petits établissements de crédit et entreprises captives d’assurance, application dès l’exercice 2026 (publication en 2027).

1.2. L’intervention européenne « stop the clock »

Face à l’ampleur du chantier, le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne ont adopté, en avril 2025, la directive dite **« stop the clock »**³.

Elle impose aux États membres de reporter de deux ans l’entrée en application des obligations de reporting pour les entreprises des vagues 2 et 3, sans modifier les exigences pour les OIP.

1.3. Le projet de loi belge du 16 septembre 2025

Pour se conformer à cette directive, la Belgique a déposé un projet de loi modifiant l’article 116 de la loi du 2 décembre 2024¹.

Le texte prévoit que :

  • les autres grandes entreprises devront publier leur premier rapport de durabilité en 2028 (sur l’exercice 2027, au lieu de 2026 sur l’exercice 2025) ;
  • les PME cotées, petits établissements de crédit non complexes et entreprises captives d’assurance/réassurance devront publier en 2029 (sur l’exercice 2028, au lieu de 2027 sur l’exercice 2026)¹.

Le projet devrait être adopté avant fin 2025, pour permettre une sécurité juridique immédiate, comme le recommande l’Institut des Réviseurs d’Entreprises (IRE)².


2. Conséquences pratiques pour les entreprises

2.1. Grandes entreprises (vague 2)

Les sociétés de plus de 250 salariés qui ne sont pas des OIP disposent désormais d’un délai supplémentaire de deux ans pour :

  • finaliser leurs processus de collecte des données extra-financières ;
  • déployer des systèmes de contrôle interne ;
  • former leur personnel et impliquer le conseil d’administration.

Cette extension répond à une réalité de terrain souvent relevée par les réviseurs : la préparation aux standards ESRS (European Sustainability Reporting Standards) exige du temps et des ressources².

2.2. PME cotées et entités financières spécifiques (vague 3)

Les PME cotées, les petits établissements de crédit non complexes et les entreprises captives d’assurance/réassurance bénéficient d’un report équivalent.

Elles devront publier leur premier rapport de durabilité en 2029 sur l’exercice 2028¹.

Ce délai leur permet de :

  • mieux évaluer le coût des investissements en systèmes de reporting,
  • progresser dans l’analyse de double matérialité, exigence clé de la CSRD².

2.3. Organisations d’intérêt public (vague 1)

Les OIP de plus de 500 salariés restent tenues de publier pour les exercices 2025 et 2026. Aucune modification ne les concerne³.

En synthèse : le report offre un espace de mise en conformité, mais ne réduit pas l’ampleur des obligations de contenu, qui demeurent inchangées.


3. Portée économique et stratégique

3.1. Un soulagement budgétaire et organisationnel

Ce décalage représente une bouffée d’oxygène pour les entreprises, en particulier celles de la vague 2, souvent confrontées à :

  • des investissements technologiques importants,
  • un manque de ressources humaines spécialisées,
  • une coordination complexe de la chaîne de valeur.

3.2. Un engagement environnemental maintenu

La directive européenne rappelle que ce report ne doit pas freiner les objectifs climatiques et sociaux³.

Les entreprises sont encouragées à :

  • poursuivre leur analyse de double matérialité,
  • anticiper les exigences de transparence sur leur chaîne d’approvisionnement,
  • préparer des processus de vérification externe.


4. Tableau de synthèse

Catégorie d’entreprise

Obligation initiale (loi 2/12/2024)

Nouveau calendrier (projet 16/09/2025)

Première publication attendue

Organisations d’intérêt public (OIP > 500 salariés)

Exercice 2025

Inchangé

2026

Grandes entreprises (> 250 salariés, non OIP)

Exercice 2025

Exercice 2027

2028

PME cotées, petits établissements de crédit non complexes, entreprises captives d’assurance/réassurance

Exercice 2026

Exercice 2028

2029


5. Recommandations Deg & Partners

  1. Anticiper malgré le report : utiliser ce délai pour mettre en place des processus robustes de collecte et de contrôle des données de durabilité.
  2. Impliquer la gouvernance : intégrer le reporting ESG dans la stratégie du conseil d’administration et dans les politiques de risque.
  3. Former les équipes : renforcer les compétences en reporting extra-financier et en ESRS.
  4. Préparer la certification : dialoguer avec les réviseurs d’entreprises afin de sécuriser l’audit futur des informations de durabilité.
  5. Surveiller l’adoption de la loi belge : suivre de près le processus législatif pour éviter toute incertitude juridique entre la publication de la directive européenne et sa transposition nationale.

Notes et références

¹ Projet de loi modifiant l’article 116 de la loi du 2 décembre 2024, déposé à la Chambre des représentants le 16 septembre 2025.
² Institut des Réviseurs d’Entreprises, communiqué du 10 avril 2025 sur la directive « stop the clock ».
³ Parlement européen, approbation de la directive (UE) dite « stop the clock », séance du 3 avril 2025.

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