Reprise de sociétés en difficulté, une aubaine fiscale

La reprise des sociétés en difficulté s’analyse généralement sous l’ange du transfert d’entreprise au sens de la loi sur la continuité des entreprises. Cependant, d’autres perspectives peuvent s’envisager, présentant un intérêt fiscal certain.


La reprise de sociétés en difficulté peut s’avérer être une aubaine tant pour un groupe de sociétés que pour un entrepreneur ayant perçu dans les activités de la société en difficulté un potentiel certain.


Par la présente contribution, nous allons envisager deux hypothèses intéressantes qui peuvent se créer à côté d’une simple reprise d’activité au travers d’un transfert d’entreprise.


Ces deux solutions offrent notamment la possibilité de récupérer les pertes fiscales présentent au sein de la société en difficulté qui seraient purement et simplement perdues en cas de transfert d’activité.


En effet, dans un tel cas de figure la société qui a transféré ses activités fait, la plupart du temps, aveu de faillite après ce transfert d’activité.


Les activités sont quant à elles reprises dans une structure qui est, en principe, saine et donc ne possède pas de pertes fiscales.


Or, la disparition de ces pertes fiscales représente un avantage fiscal qui aurait pu représenter un levier financier intéressant pour la reprise des activités.


Les deux solutions parallèles au transfert d’activités qui vont être envisagées sont les suivantes :


  • Filialisation de sociétés en difficulté


Imaginons qu’une société dispose d’une créance importante sur une autre société qui ne fait pas partie de son groupe.


La société créancière constate qu’elle ne pourra jamais récupérer sa créance mais que l’activité développée par la société
débitrice pourrait être un complément idéal de son activité principale.


Dans ces conditions, il pourrait être intéressant pour la société créancière d’envisager la conversion de sa créance en capital et si
celle-ci est conséquente, cela lui permettrait de noyer l’actionnariat historique et ainsi de devenir l’actionnaire majoritaire de cette
société en difficulté.


Cette opération s’apparente en réalité à une filialisation de la société en difficulté.


  • Un rachat des parts d’une société en difficulté


Imaginons qu’un entrepreneur constate dans les activités de la société en difficulté un réel potentiel économique qu’il pourrait développer à court terme, voire à moyen terme.


Il pourrait être plus intéressant pour cet entrepreneur d’acquérir les parts de cette société et de cette façon, changer l’actionnariat.

Le timing pourrait s’avérer idéal en ce qu’il pourrait négocier un plan de réorganisation pour réduire fortement le passif de la société, ce qui n’engendrerait aucune imposition complémentaire par le jeu de l’article 48/1 du C.I.R./92.


De cette façon, l’entrepreneur pourra acquérir les parts de la société en difficulté pour un prix minime et pourrait limiter son apport en capital à un montant assez faible qui correspondrait aux dettes historiques après vote du plan.



D’un point de vue fiscal, ces deux solutions permettraient de récupérer les pertes de la société.


En effet, l’obstacle principal pour la récupération des pertes fiscales en cas de changement de direction est la disposition anti-abus de l’article 207, al. 3 du C.I.R./92 disposant qu’en cas de survenance, au cours de la période imposable, de prise ou de changement de contrôle d’une société ne répondant pas à des besoins légitimes aux caractères financiers ou économiques, les pertes reportées ne sont pas déductibles des bénéfices de cette période ni d’aucune autre période imposable ultérieure.


Or, dans les deux cas expliqués ci-dessus, force serait de constater que l’arrivée d’un nouvel actionnariat répondrait à des besoins légitimes de caractères financiers ou économiques vu que celui-ci aurait pour but de sauver les activités de la société.


De cette façon, les pertes récupérables de la société en difficulté pourraient être conservées et pourraient donc immuniser les futures impositions sur les résultats à venir.


Il est clair que dans un tel cas de figure, il conviendrait d’apprécier objectivement l’importance du capital à réinjecter dans la société pour faire face au plan de réorganisation par rapport à l’impact fiscal provenant de la récupération des pertes fiscales.


A notre sens, une telle réflexion s’avère obligatoire pour envisager une opération de reprise la moins coûteuse possible.


Ludovic Marnette

Avocat au Barreau de LIEGE

Association d’avocats DEFENSO

Mots clés