Entre des politiques locales et une économie mondialisée, il faut retrouver le sens de l’économie politique. Il faut qu’au risque de l’impopularité, les dirigeants démocratiquement élus relèvent de plusieurs années leur vision politique. Il faut étouffer ce sentiment répandu de gouvernants qui n’anticipent pas posément les défis futurs et entretiennent un rapport instantané au temps.
En vérité, ce ne sont pas les élites qui sont écartées, c’est leur incapacité à exprimer une réponse sociopolitique crédible qui est en joue. Il faut aussi que les teneurs de légitimités citoyennes (universitaires, chercheurs, responsables syndicaux et patronaux) portent la voix de constructions humanistes. Leur silence serait coupable et le piège de l’histoire. Sans cela, nos démocraties seront, je le crains, emportées dans un ordre marchand chaotique qui finira par secréter ses monstres politiques dans un anéantissement eschatologique que de nombreux conflits ont déjà illustré au 20e siècle.
La synthèse est peut-être dans ce constat. En tous cas, c’est la mienne. Aujourd’hui, la guerre, tel un poison, s’insinue. Elle se cherche, se contracte. Se dilate. Et les risques systémiques environnementaux se dressent comme des parois infranchissables.
C’est la fin d’un modèle. C’est un choc de civilisation. Une brisure. Notre confort était pour partie indu.
Nos temps sont ceux d’un bouleversement structurel. C’est une rupture et une prise de conscience. Je veux parler d’une véritable prise de conscience, et non de l’expression mondaine ou convenue de ceux qui disent que tout change en espérant que rien ne les affectera. C’est un adieu au XXe siècle. C’est l’abandon au monde de l’inertie, de la tétanie. Cette charnière qui grince avec le siècle qui s’est refermé. Cette crise n’est donc plus souveraine ni monétaire : elle porte sur l’exercice des États.