La taxation étalée est un mécanisme fiscal permettant aux entreprises de répartir le paiement de l’impôt sur une plus-value réalisée. Il est avantageux en termes de gestion de trésorerie et d’optimisation fiscale.
Lorsqu’une société réalise une plus-value sur un immeuble rénové en profondeur, il est ainsi légitime de se demander si cette plus-value peut bénéficier de cette taxation étalée. La réponse dépend de plusieurs facteurs : la nature de la plus-value (volontaire ou forcée), la durée écoulée depuis la fin des travaux de rénovation, et la proportion des travaux de transformation dans la valeur de marché du bâtiment. Nous vous proposons ici d'en décoder les arcanes.
La taxation étalée permet à une entreprise qui réalise une plus-value lors de la vente d’un actif immobilisé (comme un immeuble, du matériel ou des équipements) de reporter l’imposition de cette plus-value sur plusieurs années. Plutôt que d’être imposée sur la totalité de la plus-value l’année de sa réalisation, l’entreprise peut étaler cette imposition sur la durée de vie des nouveaux investissements réalisés avec le produit de la vente.
Les plus-values peuvent être imposées de manière étalée si certaines conditions sont remplies (Art. 47, CIR 92):
Il n’est pas exigé que le remploi (actif de remplacement) soit effectué en éléments neufs de l’actif, mais les actions ou parts, les valeurs de portefeuille et les actifs circulants sont exclus à ce titre.
Les actifs de remplacement mixtes (qui ne sont que partiellement affectés à la profession) ne sont pris en considération comme remploi qu’à concurrence de la valeur fiscalement amortissable de la quotité professionnelle.
Lorsque le montant à investir est dépassé, le contribuable peut désigner les investissements qu’il souhaite utiliser pour atteindre exactement le montant à remployer. Le montant de l’investissement qu’il désigne en dernier lieu est réduit pour atteindre le montant exact du remploi à effectuer. L’excédent peut, le cas échéant et aux conditions ordinaires, servir d’actif de remplacement pour une autre plus-value à imposer de manière étalée.
Lorsqu’un (ou plusieurs) actif(s) de remplacement est (sont) aliéné(s) ou mis hors d’usage durant une période imposable, la plus-value devient imposable proportionnellement à la valeur non encore amortie de cet (ces) actif(s), c’est-à-dire en proportion de la valeur résiduelle fiscale. Dans ce cas, on agit donc comme si la valeur résiduelle de ces éléments de l’actif avait été totalement amortie durant cette période imposable.
Ce n’est que «lorsqu’un montant égal à l’indemnité ou à la valeur de réalisation (qui) est remployé» que le réemploi s’opère.
Lorsque la plus-value réalisée concerne une voiture, une voiture mixte ou un minibus et n’est imposée qu’à concurrence d’une quote-part, il suffit que le contribuable apporte la preuve qu’il a remployé un montant au moins égal à cette quote-part du prix de réalisation ou de l’indemnité.
Pour les plus-values réalisées en 2024, vous devez vous assurer que l’intégralité du produit de la vente est réinvestie avant le 31 décembre 2026. Dans le cas contraire, votre société sera redevable d’un impôt unique de 25 % (20% si vous bénéficier des taux réduits), majoré d’un intérêt calculé à partir du 1er janvier 2025. Cependant, il est possible de repousser cette échéance au 31 décembre 2028 en réinvestissant d’ici là dans un bâtiment.
Votre réinvestissement peut vous permettre permettre de bénéficier d’une déduction pour investissement. Penez-y!
Supposons qu’une entreprise vend un immeuble pour 1 000 000 € et réalise une plus-value de 300 000 €. Plutôt que de payer l’impôt sur ces 300 000 € immédiatement, l’entreprise décide de réinvestir cette somme dans un nouvel immeuble dont la durée d’amortissement est de 20 ans.
Une plus-value est réalisée lorsque le prix ou l’indemnité de sortie d’un bâtiment de la société excède sa valeur comptable (valeur d’acquisition moins les amortissements).
Réponse: Les travaux de rénovation sont comptabilisés distinctement des dépenses d’entretien ou de réparation (Art. 2, §1er, 9°, CIR 92). Ils sont amortis séparément du bâtiment lui-même, avec des périodes d’amortissement spécifiques selon le type de travaux.
Si les travaux de rénovation ont été réalisés au cours des cinq années précédant la vente, la partie de la plus-value relative à ces travaux ne peut pas bénéficier de la taxation étalée. Cette position est confirmée par la jurisprudence (Cass., 15.03.2024 ; Bruxelles, 19.05.2022).
La part de la plus-value éligible peut être déterminée :
La société ABC a acheté un immeuble pour 500 000 € il y a 10 ans. Au cours des deux dernières années, elle a effectué des travaux de rénovation pour un montant total de 200 000 €. La valeur comptable du bâtiment avant vente, après amortissement, est de 300 000 €, et celle des travaux de rénovation est de 150 000 €.
La société décide de vendre l’immeuble pour 800 000 €. La plus-value totale réalisée est donc de 800 000 € - (300 000 € + 150 000 €) = 350 000 €.
Selon les principes établis :
Quels conseils et recommandations retenir de cet article?
En suivant ces conseils, votre société pourra mieux gérer les aspects fiscaux liés aux plus-values sur des biens rénovés, tout en restant conforme à la législation en vigueur.
Nous sommes à vos côtés pour vous accompagner dans cette démarche. Vous trouverez une documentation complète sur la fiscalité de l'impôt des personnes physiques dans notre Manuel IPP 2024, Tax & Management éditions.