Circulaire 2024/C/42 concernant l’ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 6 juillet 2023 modifiant le Code des droits de succession et le Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe en vue d’adapter le droit fiscal bruxellois...

L' Administration générale de la Documentation patrimoniale a publié ce 18/06/2024 la Circulaire 2024/C/42 concernant l’ordonnance de la Région de Bruxelles-Capitale du 6 juillet 2023 modifiant le Code des droits de succession et le Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe en vue d’adapter le droit fiscal bruxellois aux nouvelles structures familiales et de faciliter les transmissions entre générations.

Commentaires administratifs relatifs à l’ordonnance 6 juillet 2023 modifiant le Code des droits de succession et le Code des droits d’enregistrement en vue d’adapter le droit fiscal bruxellois aux nouvelles structures familiales et de faciliter les transmissions entre générations Région de BruxellesCapitale Droits de succession Droits d’enregistrement

Table des matières

1. Introduction

2. Modifications du Code des droits de succession

2.1. Extension de l’exception prévue à l’article 8, alinéa 9, 3°, du C. succ. au cohabitant légal survivant

2.2. Extension de la notion de partenaire à certains cohabitants de fait (art. 48 du C. succ.)

2.2.1. Conditions d’application

2.2.1.1. Cohabitation de fait effective

2.2.1.2. Formation et tenue d’un ménage commun

2.2.1.3. Durée de la cohabitation

2.2.1.3.1. Principe

2.2.1.3.2. Exceptions

2.2.1.4. Exception à la cohabitation au moment du décès en raison d’un cas de force majeure

2.2.2. Conséquences de l’extension de la notion de partenaire aux cohabitants de fait

2.2.2.1. Assimilation de personnes non parentes à des descendants en ligne directe du défunt (art. 50, § 1er, du C. succ.)

2.2.2.2. Maintien du tarif entre partenaires en cas de fin de la cohabitation de fait en présence d’enfants ou de descendants communs (art. 50, § 2, du C. succ.)

2.2.2.3. Prise en compte du lien de parenté en cas d’adoption simple (art. 52² du C. succ.)

2.2.2.4. Adaptations techniques

2.2.2.4.1. Modification de l’article 55bis du C. succ. – Exemption du logement familial

2.2.2.4.2. Abrogation du Chapitre VIIbis du C. succ.

2.3. Modification de l’article 60ter du C. succ. – Tarif réduit sur la résidence principale du défunt

2.3.1. Extension du champ d’application personnel

2.3.1.1. Cohabitants de fait

2.3.1.2. Personnes assimilées aux ascendants ou descendants du défunt

2.3.2. Suppression du délai d’établissement de la résidence principale du défunt

2.4. Instauration d’un nouveau tarif réduit à l’article 60quinquies, nouveau, du C. succ.

2.4.1. Champ d’application personnel

2.4.2. Portée du tarif réduit

2.4.3. Conditions d’application

2.4.3.1. Désignation des personnes bénéficiaires par le défunt

2.4.3.2. Demande explicite d’application de l’article 60quinquies du C. succ.

2.4.4. Modalités de calcul

2.4.4.1. Règles de globalisation

2.4.4.2. Exemples

2.5. Abrogation de l’article 68 du C. succ.

2.6. Abrogation de l’article 69 du C. succ.

2.7. Entrée en vigueur

3. Modifications du Code des droits d’enregistrement, d’hypothèques et de greffe

3.1. Tarif des donations enregistrées (art. 131 du C. enr.)

3.2. Prise en compte du lien de parenté en cas d’adoption simple (art. 1322 du C. enr.)

3.3. Réduction du droit de donation (art. 135 du C. enr.)

3.4. Modification de l’article 140/1 du C. enr.

3.5. Entrée en vigueur

1. Introduction

Lordonnance du 6 juillet 2023 modifiant le Code des droits de succession et le Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe en vue d’adapter le droit fiscal bruxellois aux nouvelles structures familiales et de faciliter les transmissions entre générations (ci-après « ordonnance ») a été publiée dans le Moniteur belge du 27 septembre 2023 et apporte des modifications au Code des droits de succession tel qu’il est applicable en Région de BruxellesCapitale (ciaprès « C. succ. ») et au Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe tel qu’il est applicable en Région de BruxellesCapitale (ciaprès « C. enr. »).

L’objectif du législateur bruxellois est de moderniser et de simplifier le régime des droits de succession et de mutation par décès (ciaprès visés ensemble par les mots "droits de succession") afin qu’il corresponde mieux aux évolutions des structures familiales.

Cette ordonnance étend la notion de partenaire à certains cohabitants de fait et apporte des modifications à la règle d’assimilation de personnes non parentes à des descendants en ligne directe du défunt. Elle prévoit également l’instauration d’un taux réduit pour les personnes imposées aux droits de succession selon les tarifs des tableaux II, III et IV. Afin de faciliter les transmissions à la génération suivante, l’ordonnance abroge l’article 68 du C. succ. Elle adapte aussi le C. enr. à l’extension de la notion de partenaire à certains cohabitants de fait.

2. Modifications du Code des droits de succession

2.1. Extension de l’exception prévue à l’article 8, alinéa 9, 3°, du C. succ. au cohabitant légal survivant

L’article 8 du C. succ. crée une fiction légale par laquelle certaines stipulations pour autrui sont imposées à titre de legs.

Toutefois, certaines prestations constitutives de stipulation pour autrui sont exclues du champ d’application de cette fiction légale. L’article 8, alinéa 9, 3°, du C. succ. prévoit une exception pour les capitaux et rentes constitués à l’intervention de l’employeur du défunt au profit de son conjoint survivant. Cette exception vise plus particulièrement les capitaux et rentes constitués en exécution :

  • d’un contrat d’assurance de groupe souscrit en vertu d’un règlement obligatoire de l’entreprise ;
  • du règlement obligatoire d’un fonds de prévoyance institué au profit du personnel de l’entreprise.

Le nouveau texte de l’article 8, alinéa 9, 3°, du C. succ. dispose désormais que l’exception est applicable au "partenaire survivant du défunt au sens de l'article 48, alinéa 7, a) ou b)", soit le conjoint survivant mais également le cohabitant légal survivant. Cette exception était limitée au conjoint survivant du défunt. Elle est désormais étendue au cohabitant légal survivant du défunt. Cette extension ne bénéficie toutefois pas aux cohabitants de fait.

2.2. Extension de la notion de partenaire à certains cohabitants de fait (art. 48 du C. succ.)

L’article 48 du C. succ. comprend le tarif général des droits de succession et notamment le tarif I en ligne directe, et entre partenaires. L’alinéa 7 détermine les partenaires pouvant bénéficier de ce tarif, à savoir :

  • la personne qui, au jour de l’ouverture de la succession, était mariée avec le défunt ;
  • la personne qui, au jour de l’ouverture de la succession, était en situation de cohabitation légale avec le défunt au sens du titre Vbis du livre III du Code civil (ancien).

L’ordonnance étend cette définition à certains cohabitants de fait. Le nouvel art. 48, al. 7, du C. succ., dispose ainsi que l’on entend par « partenaire » également « la personne qui, au jour de l’ouverture de la succession, cohabitait avec le défunt de façon ininterrompue et formait avec lui un ménage commun depuis au moins un an ou, pour l’application des articles 60bis à 60bis/3 et 60ter, trois ans ».

Toutefois, bien que le tarif en ligne directe s’applique désormais également au cohabitant de fait, il ne devient pas pour autant un hériter légal du défunt. Ainsi, en l’absence d’un testament instituant le cohabitant de fait légataire du défunt, celuici ne recueille rien dans la succession.

2.2.1. Conditions d’application

La nouvelle définition du partenaire de l’article 48 du C. succ. s’applique aux cohabitants de fait qui « forment, ensemble, une communauté de vie, assimilable à celle que formeraient deux conjoints ou deux cohabitants légaux ensemble » (Doc., Parl. Rég. Brux.Cap., 20222023, n° A709/1, p. 8).

2.2.1.1. Cohabitation de fait effective

Pour bénéficier du Tarif I, le défunt et son partenaire doivent avoir vécu dans la même habitation et donc avoir cohabité effectivement ensemble.

L’alinéa 8, nouveau, de l’article 48 du C. succ. présume que cette condition est respectée par l’inscription dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers à la même adresse que le défunt. Cette présomption de cohabitation de fait effective est néanmoins réfragable et permet à l’administration d’apporter la preuve que la cohabitation n’est en réalité pas effective malgré l’inscription dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers.

Voici quelques exemples extraits des documents parlementaires (Doc., Parl. Rég. Brux.Cap., 20222023, n° A-709/1, p. 89) :

  • situation de fausse domiciliation ;
  • adresse administrative unique constituée en réalité de deux unités d’habitation indépendantes l’une de l’autre, où chacun des « cohabitants » vit seul en toute autonomie.

2.2.1.2. Formation et tenue d’un ménage commun

Pour entrer dans la nouvelle définition du partenaire, il faut, en plus de la cohabitation à la même adresse, qu’il y ait également tenue d’un ménage commun. Ceci implique que les membres du ménage doivent prendre soin l’un de l’autre et que chacun contribue également aux tâches liées au ménage.

La notion de contribution aux tâches liées au ménage est appréciée largement et ne vise pas uniquement la contribution financière.

La formation d’un ménage commun est présumée par l’inscription dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers à la même adresse que le défunt. Cette présomption de formation d’un ménage commun est réfragable et permet à l’administration d’apporter la preuve contraire (art. 48, alinéa 8, nouveau, du C. succ.).

La notion de ménage commun est appréciée largement et prend en compte toute forme de vie commune sans qu’elle soit limitée aux situations de vie amoureuse. Cette notion pourrait donc s’appliquer notamment aux situations de cohabitation entre membres de la même famille (frère, sœurs, …) ou entre amis. En outre, elle n’est pas limitée uniquement à la cohabitation entre deux personnes et peut viser la cohabitation entre plusieurs personnes qui forment un ménage commun. L’objectif du législateur bruxellois est ainsi « de prendre en compte les nouvelles formes de vie en communauté, tant amoureuses (couples polyamoureux) que non amoureuses (cohabitation durable) » (Doc., Parl. Rég. BruxCap., 20222023, n° A-709/1, p. 9).

2.2.1.3.Durée de la cohabitation

2.2.1.3.1.Principe

Les conditions de cohabitation effective et de formation d’un ménage commun s’apprécient sur une période minimale d’une année ininterrompue précédant le décès du défunt (art. 48, alinéa 7, c) nouveau, du C. succ.).

2.2.1.3.2. Exceptions

Toutefois, pour l’application du tarif réduit applicable aux acquisitions d’actifs investis à titre professionnel par le défunt ou son partenaire dans une entreprise familiale ou dans une société familiale visé aux articles 60bis à 60bis/3 du C. succ., ces conditions doivent être respectées pendant une durée ininterrompue d’au moins trois ans avant le décès du défunt (art. 48, alinéa 7, c) nouveau, du C. succ.).

Aussi, pour l’application de l’article 60ter du C. succ. qui prévoit, sous certaines conditions, un tarif progressif préférentiel en faveur notamment du partenaire cohabitant de fait du défunt sur la résidence principale de ce dernier (v. 2.3., infra), les conditions de cohabitation effective et de formation d’un ménage commun doivent être respectées pendant une durée ininterrompue d’au moins trois ans avant le décès du défunt (art. 48, alinéa 7, c) nouveau, du C. succ.).

2.2.1.4.Exception à la cohabitation au moment du décès en raison d’un cas de force majeure

Les personnes qui ont respecté les conditions de cohabitation et de tenue d’un ménage commun pendant une durée ininterrompue d’au moins un an ou, le cas échéant, trois ans, avec le défunt seront également considérées comme partenaires si, au jour du décès, elles ne cohabitaient plus ensemble en raison d’un cas de force majeure (art. 48, alinéa 8, nouveau, du C. succ.).

Il y a force majeure quand un événement postérieur à la naissance de l’obligation, et indépendant de la volonté de celui qui l’invoque, qui n’a pu être prévu, ni empêché par lui, rend impossible l’exécution de son obligation.

La force majeure doit rendre impossible le maintien de la cohabitation effective des partenaires à la même adresse et la tenue d’un ménage commun.

Voici quelques exemples extraits des documents parlementaires (Doc., Parl. Rég. Brux.Cap., 20222023, n° A709/1, p. 10) :

  • seraient constitutifs d’un cas de force majeure :
  • le placement en maison de repos ;
  • le placement dans une institution de soins spécialisés ;
  • l’emprisonnement d’un des partenaires.
  • ne serait pas constitutive d’un cas de force majeure, l’inhabitabilité d’un immeuble (pour cause d’insalubrité ou d’incendie) suivie de l’inscription de la résidence principale des partenaires à des adresses différentes. En effet, l’inhabitabilité de l’immeuble évacué n’empêche pas le maintien d’une cohabitation effective ailleurs.

2.2.2. Conséquences de l’extension de la notion de partenaire aux cohabitants de fait

2.2.2.1. Assimilation de personnes non parentes à des descendants en ligne directe du défunt (art. 50, § 1er, du C. succ.)

L’extension de la notion de partenaire implique que le champ d’application de l’article 50, § 1er, du C. succ. est étendu aux cohabitants de fait et permet ainsi d’assimiler à des descendants en ligne directe du défunt :

  • les enfants du cohabitant de fait, y compris en cas de prédécès de ce dernier ;
  • une personne qui ne descend pas du défunt mais qui a vécu durant minimum 1 an sans interruption avec le défunt, et a reçu principalement du défunt et/ou de son cohabitant de fait, ou du défunt/du cohabitant de fait du défunt et d’autres personnes les secours et soins que les enfants reçoivent normalement de leurs parents.

2.2.2.2. Maintien du tarif entre partenaires en cas de fin de la cohabitation de fait en présence d’enfants ou de descendants communs (art. 50, § 2, du C. succ.)

L’article 50, § 2, du C. succ. prévoit que le tarif entre partenaires continue à s’appliquer lorsque les conjoints sont divorcés ou séparés de corps si ceux-ci ont des enfants ou des descendants communs. Le tarif entre partenaires est également maintenu lorsque la cohabitation légale a pris fin avant le décès du défunt si les cohabitants légaux ont des enfants ou des descendants communs.

Le champ d’application de l’article 50, § 2, du C. succ. est désormais étendu aux cohabitants de fait qui ont des enfants ou des descendants communs lorsque la cohabitation de fait a cessé avant le décès du défunt. Il est toutefois requis que la cohabitation et la tenue d’un ménage commun aient duré pendant une année au moins, sans interruption, avant la séparation ou pendant trois années pour l’application des articles 60bis à 60bis/3 et 60ter du C. succ.

2.2.2.3. Prise en compte du lien de parenté en cas d’adoption simple (art. 522 du C. succ.)

L’article 522 du C. succ. permettait notamment de tenir compte du lien de parenté résultant de l’adoption simple :

  • lorsque l’enfant adopté est un enfant du conjoint de l’adoptant ;
  • lorsque l’enfant adopté a, pendant trois années ininterrompues, reçu de de l'adoptant ou de l'adoptant et de son conjoint ensemble ou encore de l’adoptant et de son cohabitant ensemble, les secours et les soins que les enfants reçoivent normalement de leurs parents.

L’ordonnance adapte le texte à la nouvelle définition de la notion de partenaire contenue dans l’article 48, alinéa 7, du C. succ. et en étend l’application tant à la personne qui, au jour de l’ouverture de la succession, était en situation de cohabitation légale avec le défunt au sens du titre Vbis du livre III du Code civil, qu’à la personne qui, au jour de l’ouverture de la succession, cohabitait avec le défunt de façon ininterrompue et formait avec lui un ménage commun depuis un an. Ainsi, le texte stipule désormais qu’il peut être tenu compte du lien de parenté en cas d’adoption simple :

  • lorsque l’enfant adopté est un enfant du partenaire de l’adoptant ;
  • lorsque l’enfant adopté a, pendant une année ininterrompue, reçu de l'adoptant ou de l'adoptant et de son partenaire ensemble, les secours et les soins que les enfants reçoivent normalement de leurs parents.

En outre, la durée de trois années ininterrompues pendant laquelle les enfants adoptés sous le régime de l’adoption simple devaient avoir reçu les secours et les soins de l’adoptant ou de l’adoptant et de son partenaire ensemble (art. 522, alinéa 2, 3°, du C. succ.) est désormais réduite à une année ininterrompue et est ainsi alignée sur la durée prévue à l’article 50, § 1er, 3 du C. succ.

2.2.2.4. Adaptations techniques

2.2.2.4.1. Modification de l’article 55bis du C. succ. Exemption du logement familial

L’article 55bis du C. succ. est adapté à la nouvelle définition des partenaires contenue dans l’article 48 du C. succ. Toutefois, son champ d’application n’est pas étendu aux cohabitants de fait et seuls les conjoints et les cohabitants légaux (non exclus) bénéficient de l’exemption sur le logement familial.

Néanmoins, les cohabitants de fait peuvent désormais bénéficier du tarif réduit de l’article 60ter du C. succ. (v. 2.3., infra).

2.2.2.4.2. Abrogation du Chapitre VIIbis du C. succ.

Cette subdivision avait été ajoutée par l’ordonnance du 16 mai 2002 relative aux tarifs, exemptions et réductions des droits de succession applicables aux cohabitants légaux et contenait la définition de la notion de cohabitant légal (ancien texte de l’art. 60ter du C. succ.) et l’assimilation des cohabitants légaux aux époux (ancien texte de l’art. 60quater du C. succ.).

Les articles 60ter et 60quater du C. succ. ayant été remplacés par l’ordonnance du 20 décembre 2002 modifiant le Code des droits de succession et leur contenu déplacé dans l’article 48 du C. succ., le Chapitre VIIbis et son intitulé « Tarif, exemptions et réductions du droit de succession applicables aux cohabitants légaux » n’ont plus lieu d’être et sont abrogés.

2.3. Modification de l’article 60ter du C. succ. Tarif réduit sur la résidence principale du défunt

2.3.1. Extension du champ d’application personnel

2.3.1.1. Cohabitants de fait

Pour rappel, l’article 60ter du C. succ. prévoit au niveau des droits de succession un tarif progressif préférentiel sur la résidence principale du défunt.

Les héritiers en ligne directe et les cohabitants légaux exclus du bénéfice de l’article 55bis du C. succ. peuvent bénéficier du tarif réduit visé à l’article 60ter du C. succ. L’exclusion portait uniquement sur les cohabitants légaux qui étaient un parent en ligne directe du défunt ou un ayant droit qui est assimilé à un parent en ligne directe pour l’application du tarif, ou un frère ou une sœur, ou un neveu ou une nièce, ou un oncle ou une tante du défunt.

Les partenaires cohabitant de fait étant également exclus du bénéfice de l’article 55bis du C. succ., ils sont désormais visés par l’article 60ter du C. succ. et peuvent bénéficier du tarif réduit sur la part qu’ils recueillent dans la résidence principale du défunt. Toutefois, il est requis pour l’application de l’article 60ter du C. succ. que les conditions de cohabitation effective et de formation d’un ménage commun soient respectées pendant une durée ininterrompue d’au moins trois ans avant le décès du défunt (art. 48, alinéa 7, c) nouveau, du C. succ.) (v. également 2.2.1.4. supra).

2.3.1.2. Personnes assimilées aux ascendants ou descendants du défunt

L’article 60ter du C. succ. réservait le bénéfice du tarif réduit au(x) :

  • héritiers en ligne directe du défunt autrement dit les ascendants et descendants du défunt ;
  • cohabitant du défunt non visé à l’article 55bis du C. succ. ;
  • enfants adoptés sous adoption simple visés à l’article 522 du C. succ.

Désormais, les personnes assimilées à des ascendants ou des descendants du défunt peuvent bénéficier également du bénéfice du tarif réduit. Ceci étend ainsi le champ d’application de l’article 60ter du C. succ. p. ex. aux enfants du partenaire cohabitant de fait – du défunt.

2.3.2. Suppression du délai d’établissement de la résidence principale du défunt

Il était requis que le défunt eût établi sa résidence principale dans l’immeuble depuis au moins cinq ans avant son décès afin de bénéficier du tarif réduit de l’article 60ter du C. succ.

Afin d’aligner le champ d’application matériel de l’article 60ter sur celui de l’article 55bis du C. succ., qui ne prévoit aucune condition de durée d’établissement de la résidence principale par le défunt, la condition de cinq ans est supprimée.

Désormais, pour l’application du tarif réduit, il suffit ainsi que l’immeuble soit affecté à la résidence principale du défunt au moment de son décès.

2.4. Instauration d’un nouveau tarif réduit à l’article 60quinquies, nouveau, du C. succ.

2.4.1. Champ d’application personnel

Le nouvel article 60quinquies du C. succ. introduit un nouveau tarif réduit de 3 p.c. dont peuvent bénéficier les personnes physiques imposées aux tarifs II, III et IV. Les personnes imposées au tarif I (en ligne directe et entre partenaires) ne sont pas visées par le nouvel article 60quinquies du C. succ.

Sont donc visés par le nouveau tarif réduit :

  • les frères et sœurs (tarif II) ;
  • les oncles, tantes, neveux et nièces (tarif III) ;
  • toutes les autres personnes (tarif IV).

2.4.2. Portée du tarif réduit

Le tarif réduit de 3 p.c. porte sur la première tranche de 15.000 euros que les personnes physiques imposées aux tarifs II, III et IV recueillent dans la succession du défunt.

Ce montant vaut pour toute la succession et doit, le cas échéant, être réparti entre les personnes que le défunt a désignées, en proportion de ce qu’elles reçoivent dans la succession (v. 2.4.4.1., infra).

2.4.3. Conditions d’application

2.4.3.1. Désignation des personnes bénéficiaires par le défunt

Il est requis que le défunt ait désigné, avec certitude, les personnes physiques qui bénéficieront du tarif réduit dans un testament définitif non révoqué.

La forme du testament n’importe pas et il peut s’agir d’un testament olographe, authentique ou international.

Ainsi, plusieurs personnes peuvent être désignées par le défunt et ce, même, si elles sont imposées à des tarifs différents.

2.4.3.2. Demande explicite d’application de l’article 60quinquies du C. succ.

La déclaration de succession doit comporter la demande explicite d’application du tarif réduit prévu par l’article 60quinquies du C. succ. En outre, elle doit contenir l’indication de l’identité des personnes bénéficiaires du tarif réduit.

En ce sens, l’article 42 du C. succ. relatif à la forme de la déclaration de succession est également adapté par l’ordonnance.

2.4.4. Modalités de calcul

2.4.4.1. Règles de globalisation

Comme exposé au 2.4.3.1., supra, le défunt peut désigner plusieurs personnes dans son testament en vue d’appliquer le nouveau tarif réduit. Il peut également désigner des personnes imposées à des tarifs différents.

Dans tous les cas, le tarif réduit portant sur un montant maximum de 15.000 euros, il convient de répartir ce montant entre les personnes désignées en proportion de ce qu’elles recueillent dans la succession.

Dans ce cadre, il convient de tenir compte des règles particulières de globalisation contenues à l’article 48, alinéas 4 et 5, du C. succ.

En effet, contrairement au tarif en ligne directe et entre partenaires (tarif I) et au tarif entre frères et sœurs (tarif II), l’article 48, alinéas 4 et 5, du C. succ. dispose que les tarifs III (entre oncles, tantes, neveux et nièces) et IV (entre toutes autres personnes) sont appliqués sur la somme des parts recueillies par les personnes imposées sous ce tarif dans la valeur imposable des biens.

Si, parmi les personnes désignées par le défunt pour bénéficier du tarif réduit, certaines sont imposés au tarif III et d’autres au tarif IV, il convient d’effectuer une double globalisation :

  • pour les personnes imposées au tarif III, ensemble ;
  • pour les personnes imposées au tarif IV, ensemble.

Ensuite, en application de l’article 70 du C. succ., le montant des droits de succession calculé sera réparti entre les ayants droits en proportion de ce qu’ils recueillent dans la succession.

Les travaux parlementaires donnent des précisions quant aux étapes de calcul à effectuer :

  • étape 1 : on calcule l’impôt avec application de la règle de globalisation ;
  • étape 2 : on identifie, dans le chef de chaque ayant droit repris dans la globalisation, le montant de l’impôt qu’il doit individuellement ;
  • étape 3 : on impute sur l’impôt dû individuellement par chacun la différence entre le montant qui correspond à la taxation de sa part dans les 15.000 euros au taux normalement applicable et le montant qui correspond à la taxation de sa part dans les 15.000 euros au taux de 3 %.

Mathématiquement, le calcul à effectuer dans le chef de chacune des personnes bénéficiant du tarif réduit pour lesquelles la globalisation est appliquée peut être présenté au moyen de la formule suivante :

Xr = X – [(A x t) – (A x 3 %)], qui peut être simplifiée comme suit : Xr = X – A x (t 3 %), où :

  • Xr = l’impôt dû après application de l’article 60quinquies ;
  • X = l’impôt normalement dû sans application de l’article 60quinquies ;
  • A = le montant sur lequel le tarif réduit doit être appliqué ;
  • t = le tarif normalement applicable à ce montant. (Doc., Parl. Rég. Brux.Cap., 20222023, n°A709/1, p. 20)

2.4.4.2. Exemples

(i) Personnes imposées au tarif II (entre frères et sœurs)

Exemple 1 :

X décède en laissant un patrimoine de 100.000 euros et un fils unique, F1. Il institue comme légataire, sa sœur, S1, à qui il lègue 50.000 euros qu’il désigne comme bénéficiaire de l’article 60quinquies du C. succ.

Les droits de succession avec application du tarif réduit sont calculés comme suit : [15.000 x 3% (= 450)] + [10.000 x 25% (= 2.500)] + [25.000 x 30% (= 7.500)] = 10.450 euros.

Exemple 2 :

X décède en laissant un patrimoine de 100.000 euros et un fils unique, F1. Il institue comme légataires, ses sœurs, S1 et S2, qu’il désigne comme bénéficiaires de l’article 60quinquies du C. succ. S1 bénéficie d’un legs de 30.000 euros et S2 d’un legs de 20.000 euros.

  • Répartition du montant de 15.000 euros entre S1 et S2 selon ce qu’elles recueillent dans la succession :
  • S1 : 15.000 x (30.000/50.000) = 9.000 euros ;
  • S2 : 15.000 x (20.000/50.000) = 6.000 euros.
  • Les droits de succession avec application du tarif réduit sont calculés comme suit :
  • S1 : (9.000 euros x 3%) + (3.500 x 20%) + (12.500 x 25%) + (5.000 x 30%) = 5.595 euros
  • S2 : (6.000 euros x 3%) + (6.500 x 20%) + (7.500 x 25%) = 3.355 euros.

(ii) Personnes imposées au tarif III (entre oncles, tantes, neveux et nièces) ou au tarif IV (entre toutes autres personnes)

X décède en laissant un patrimoine de 250.000 euros et un fils unique, F1. Il institue comme légataires, ses neveux, N1 et N2, qu’il désigne comme bénéficiaires de l’article 60quinquies du C. succ. N1 bénéficie d’un legs de 60.000 euros et N2 d’un legs de 30.000 euros.

Le montant de 15.000 euros sur lequel porte le tarif réduit est réparti comme suit entre N1 et N2

  • N1 : 15.000 x (60.000/90.000) = 10.000 euros
  • N2 : 15.000 x (30.000/90.000) = 5.000 euros
  • Etape 1 : calcul du droit de succession avant application du tarif réduit

En application de la règle de globalisation de l’article 48, alinéa 4, du C. succ. les droits de succession, avant application du tarif réduit, sont calculés comme suit : (50.000 x 35%) + (40.000 x 50%) = 37.500 euros.

  • Etape 2 : calcul du droit de succession dû individuellement

Ce montant est à répartir entre N1 et N2 en proportion de la part qu’ils recueillent dans la succession conformément à l’article 70 du C. succ. :

N1 : 37.500 x (60.000/90.000) = 25.000 euros.

N2 : 37.500 x (30.000/90.000) = 12.500 euros.

  • Etape 3 : Imputation sur l’impôt dû individuellement par chacun de la différence entre le montant qui correspond à la taxation de sa part dans les 15.000 euros au taux normalement applicable et le montant qui correspond à la taxation de sa part dans les 15.000 euros au taux réduit de 3 %

L’impôt dû après application de l’article 60quinquies du C. succ. :

N1 : 25.000 [(10.000 x 35%) – (10.000 x 3%)] = 21.800 euros.

N2 : 12.500 [(5.000 x 35%) – (5.000 x 3%)] = 10.900 euros.

(iii) Concurrence entre personnes imposées au tarif III et personnes imposées au tarif IV

X décède en laissant un patrimoine de 250.000 euros et un fils unique, F1. Il institue comme légataires, ses neveux, N1 et N2, et ses amis, A1 et A2 qu’il désigne comme bénéficiaires de l’article 60quinquies du C. succ. Chacun bénéficie d’un legs équivalent de 25.000 euros.

Le montant 15.000 euros sur lequel porte le tarif réduit est réparti comme suit entre N1, N2, A1 et A2 :

  • N1 : 15.000 x (25.000/100.000) = 3.750 euros ;
  • N2 : 15.000 x (25.000/100.000) = 3.750 euros ;
  • A1 : 15.000 x (25.000/100.000) = 3.750 euros ;
  • A2 : 15.000 x (25.000/100.000) = 3.750 euros.
  • Etape 1 : calcul du droit de succession avant application du tarif réduit

Pour N1 et N2, en application de la règle de globalisation de l’article 48, alinéa 4, du C. succ. les droits de succession avant application du tarif réduit sont calculés comme suit : 50.000 x 35% = 17.500 euros.

Pour A1 et A2, en application de la règle de globalisation de l’article 48, alinéa 5, du C. succ. les droits de succession sont calculés comme suit : 50.000 x 40% = 20.000 euros.

  • Etape 2 : calcul du droit de succession dû individuellement

Pour N1 et N2, le montant de 17.500 euros est à répartir entre eux en proportion de la part qu’ils recueillent dans la succession conformément à l’article 70 du C. succ. :

N1 : 17.500 x (25.000/50.000) = 8.750 euros.

N2 : 17.500 x (25.000/50.000) = 8.750 euros.

Pour A1 et A2, le montant de 20.000 euros est à répartir entre eux en proportion de la part qu’ils recueillent dans la succession conformément à l’article 70 du C. succ. :

A1 : 20.000 x (25.000/50.000) = 10.000 euros.

A2 : 20.000 x (25.000/50.000) = 10.000 euros.

  • Etape 3 : Imputation sur l’impôt dû individuellement par chacun de la différence entre le montant qui correspond à la taxation de sa part dans les 15.000 euros au taux normalement applicable et le montant qui correspond à la taxation de sa part dans les 15.000 euros au taux réduit de 3 %

L’impôt dû après application de l’article 60quinquies du C. succ. :

N1 : 8.750 [(3.750 x 35%) – (3.750 x 3%)] = 7.550 euros.

N2 : 8.750 [(3.750 x 35%) – (3.750 x 3%)] = 7.550 euros.

A1 : 10.000 [(3.750 x 40%) – (3.750 x 3%)] = 8.612, 5 euros.

A2 : 10.000 [(3.750 x 40%) – (3.750 x 3%)] = 8.612, 5 euros.

2.5. Abrogation de l’article 68 du C. succ.

Cette disposition avait pour effet qu’en cas de renonciation à une succession, à une disposition testamentaire, ou à une institution contractuelle par la personne devant normalement hériter, le droit de succession ou le droit de mutation par décès dû par la personne qui hérite par suite de la renonciation, ne peut être inférieur à l’impôt qui aurait été dû par le renonçant.

Elle pouvait constituer un frein aux renonciations et surtout au « saut de génération » par lequel certains héritiers renoncent en vue d’avantager leurs propres enfants. C’est notamment le cas lorsque les petitsenfants héritent directement de leurs grandsparents par la suite de la renonciation de leurs parents à la succession.

L’abrogation de l’article 68 du C. succ. implique, désormais, que l’imposition aux droits de successions aura lieu en tenant compte de la situation civile telle qu’elle se présente à l’administration fiscale sans qu’il faille vérifier si la renonciation entraîne une diminution d’impôt.

2.6. Abrogation de l’article 69 du C. succ.

Cette disposition est analogue à l’article 68 du C. succ., mais vise les cas spécifiques de renonciation à la communauté par les héritiers d’une femme mariée en communauté sous le régime juridique précédant la réforme du droit matrimonial instaurée par la loi du 14 juillet 1976 relative aux droits et devoirs respectifs des époux et aux régimes matrimoniaux.

Cette disposition n’étant plus susceptible d’application pour les décès de femmes mariées survenus à partir du 29 septembre 1976, elle est abrogée.

2.7. Entrée en vigueur

Les modifications apportées au Code des droits de succession sont applicables aux successions ouvertes à partir du 1er janvier 2024.

3. Modifications du Code des droits d’enregistrement, d’hypothèques et de greffe

Le Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe est adapté à la nouvelle définition de la notion de partenaire telle qu’elle existe dans le Code des droits de succession (v. 2.2., supra) et son extension aux cohabitants de fait.

3.1. Tarif des donations enregistrées (art. 131 du C. enr.)

L’article 131 du C. enr. qui fixe le taux d’imposition applicable aux donations enregistrées est adapté à la nouvelle définition de la notion de partenaire.

Le tarif I, applicable en ligne directe, entre conjoints et entre cohabitants légaux est désormais étendu aux partenaires cohabitants de fait qui cohabitent avec le donateur de façon ininterrompue et forment avec lui un ménage commun depuis au moins un an (v. 2.2.1., supra).

3.2. Prise en compte du lien de parenté en cas d’adoption simple (art. 1322 du C. enr.)

L’ordonnance adapte le texte à la nouvelle définition de la notion de partenaire contenue dans l’article 131, § 1er, alinéa 3, du C. enr. et en étend l’application tant à la personne qui, au jour de la donation, était en situation de cohabitation légale avec le donateur au sens du titre Vbis du livre III du Code civil, qu’à la personne qui, au jour de la donation, cohabitait avec le donateur de façon ininterrompue et formait avec lui un ménage commun depuis un an. En outre, la durée de six années ininterrompues pendant laquelle les enfants adoptés sous le régime de l’adoption simple devaient avoir reçu les secours et les soins de l’adoptant ou de l’adoptant et de son partenaire ensemble (art. 1322, alinéa 2, 3°, du C. enr.) est désormais réduite à une année ininterrompue.

Ainsi, le texte stipule désormais qu’il peut être tenu compte du lien de parenté en cas d’adoption simple :

  • lorsque l’enfant adopté est un enfant du partenaire de l’adoptant ;
  • lorsque l’enfant adopté a, pendant une année ininterrompue, reçu de l'adoptant ou de l'adoptant et de son partenaire ensemble, les secours et les soins que les enfants reçoivent normalement de leurs parents.

3.3. Réduction du droit de donation (art. 135 du C. enr.)

Le champ d’application de l’article 135 du C. enr. est désormais étendu aux partenaires - cohabitants de fait qui ont au moins trois enfants en vie, n'ayant pas atteint l'âge de vingt et un ans au jour où l'impôt est acquis à l'Etat.

3.4. Modification de l’article 140/1 du C. enr.

La définition de la notion de partenaire que contenait l’article 140/1, § 2, , du C. enr. est supprimée car cette notion est désormais définie dans l’article 131 du C. enr.

3.5. Entrée en vigueur

Les modifications apportées au Code des droits d’enregistrement, d’hypothèque et de greffe sont applicables aux donations conclues à partir du 1er janvier 2024.


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