En 2026, les États-Unis fêteront leur 250ᵉ anniversaire.
Et cette nation sera progressivement détruite.
Et vous savez pourquoi je partage ce sentiment ? Parce que j’ai du sang américain dans mes veines, parce que j’y ai étudié, travaillé, aimé, et humé ce pays. Et que, pour des raisons intimes, sans doute génétiques, je le ressens comme une émotion primaire. Parce que ma famille était, avant la prohibition qui l’a a ruinée, une des plus respectables familles d’immigrés belges de Chicago.
Elle sera fracturée parce que ce pays, au sein duquel règne une violence économique, raciale et sociale profonde, n’en est pas vraiment un. C’est une terre d’aventuriers qui revendiquent chacun la possession d’armes.
C’est un pays qui n’est qu’un fragile assemblage d’États très différents et, pour certains, farouchement indépendantistes.
C’est un pays qui a connu une guerre civile, dont tous les stigmates furent effacés par la nécessité d’oublier les divisions au nom de valeurs morales supérieures : le Stars and Stripes et l’armée, bien sûr, qui en est la garante.
C’est un pays qui forge ses citoyens dans ce fameux melting pot américain, ce creuset de fusion qui conduit à ce que chaque Américain, indépendamment de son origine, considère – et mieux, revendique – que son ancêtre commun soit George Washington. Ce phénomène explique d’ailleurs le racisme profond et latent qui persiste, comme un écho à l’esclavagisme et à la ségrégation.
C’est un pays qui expulse ses convulsions internes dans des guerres lointaines, qu’il ne termine d’ailleurs jamais.
C’est donc un pays qui a dû, jour après jour, se construire en dépassant l’entropie qui l’effrite. C’est un pays qui, à coup d’images, se bat contre sa propre dissolution, puisque c’est un pays jeune, et surtout artificiel.
Et puis, voici Donald Trump, flanqué de techno-tyrans, qui décide de briser une nation. Le coup d’État est déjà révolu : il a commencé le 6 janvier 2021. Mais la fragmentation d’une nation, c’est la remise en question de tous ses fonctionnaires et de leur maintien en poste, c’est la politisation de l’armée, c’est la nomination de ministres dont la seule compétence est leur loyauté, c’est la délégation de l’exercice de l’État à Elon Musk, c’est le contournement du Congrès par des ordres présidentiels, et bien d’autres choses encore.
J’appelle cela une implosion.
Et c’est extrêmement grave, car il est évident que cette présidence, qui se prolongera bien au-delà de ses quatre ans, va immanquablement susciter un contexte de dictature, donc de résistance et de violence. Mais surtout, elle va contribuer à fracturer le monde occidental, qui trouvera dans la supposée efficacité trumpienne une solution à des problèmes émotionnels et mal posés.
Nos dirigeants ne comprennent rien à ce qui se passe là-bas.