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La future taxe belge sur les plus-values mobilières: contours et enjeux

Présentation du projet

Le projet de taxation des plus-values sur actifs financiers a été présenté cette semaine par Jan Jambon, Ministre fédéral des Finances, dans le gouvernement « Arizona » conduit par Bart De Wever.

Le texte, qui n'est encore qu'à l'état d'avant-projet, sera soumis dans un premier temps à des débats au sein du gouvernement, avant d'être discuté au Parlement.

Une entrée en vigueur au 1er janvier 2026 est envisagée.


Portée de la taxation : des actifs financiers très largement définis

Le champ d’application de la taxe est particulièrement large. Seraient visés :

  • Les actions et autres valeurs assimilables ;
  • Les obligations et titres de créance négociables ;
  • Les options sur actions ;
  • Les parts d'organismes de placement collectif ;
  • Les instruments du marché monétaire ;
  • Les produits dérivés, y compris les options sur actions, les contrats à terme (futures, forwards) et les contrats d’échange (swaps) ;
  • Les contrats d'assurance-vie et de capitalisation (branches 21, 23 et 26) ;
  • Les crypto-actifs ;
  • Les devises.


Modalités d’imposition

Le projet prévoit un taux d’imposition général de 10 % pour les plus-values avec une quotité exonérée de 10.000 EUR.

Un régime progressif est instauré pour les plus-values sur participations significatives (au moins 20 %, en tenant compte des liens familiaux jusqu’au quatrième degré) :

  • Jusqu’à 1 million d’euros : exonération ;
  • De 1 à 2,5 millions d’euros : 1,25 % ;
  • De 2,5 à 5 millions d’euros : 2,25 % ;
  • De 5 à 10 millions d’euros : 5 % ;
  • Au-delà de 10 millions d’euros : 10 %.

Par ailleurs, les plus-values sur actifs financiers détenus depuis plus de dix ans seraient totalement exonérées.


Suppression de la taxe Reynders : une simplification bienvenue

La réforme prévoit également la suppression de la "taxe Reynders", instaurée en 2006 par le ministre des Finances de l'époque, Didier Reynders.

Cette taxe complexe frappe les plus-values réalisées sur des fonds d'investissement investissant à plus de 10 % en titres à revenu fixe, imposant ainsi partiellement les fonds obligataires, mixtes et monétaires.

Le maintien de la taxe Reynders, combiné à une nouvelle taxation générale des plus-values, aurait créé une superposition délicate à aborder en pratique.

La suppression de la taxe Reynders et de l'article 19bis du Code des impôts sur les revenus (CIR 92) répond donc à un souci de simplification fiscale bienvenu.

Le taux de la taxe sur les primes d’assurance-vie serait abaissé de 2 % à 0,7 %. Cette taxe avait en effet pour objectif de « compenser » l’absence de taxation sur les plus-values.


Collecte de l'impôt : un défi pour les intermédiaires financiers

La collecte de la nouvelle taxe sera assurée principalement par les banques et les autres intermédiaires financiers, selon un mécanisme analogue à celui du précompte mobilier.

Mais l'étendue des actifs visés, la complexité des cas d'exonération et le traitement des moins-values laissent présager des difficultés pratiques importantes.

L’échec de la taxe sur les plus-values mobilières de 2016, abandonnée peu après sa mise en œuvre faute de faisabilité, reste un précédent instructif.


Une nouvelle exit tax pour encadrer la mobilité internationale

Le projet introduit également une "exit tax" applicable en cas de transfert de résidence fiscale hors de Belgique ou de donation d'actifs financiers à un non-résident.

L'objectif est clair : éviter qu'un contribuable ne réalise sa plus-value à l'étranger après avoir transféré sa résidence ou transmis ses avoirs, échappant ainsi à toute imposition en Belgique.

L'instauration d'une taxation immédiate des plus-values latentes permet de préserver l'assiette fiscale.

Quelques exemples concrets permettent de mieux comprendre la portée de cette mesure :

Jean, résident belge, décide de donner son portefeuille d’actions cotées à sa fille Marie, domiciliée en France. Cette transmission serait assimilée à une cession à titre onéreux, et Jean serait imposé immédiatement sur la plus-value latente.

Jacqueline, résidente belge, choisit de s’installer en Espagne pour y passer sa retraite. Avant son départ, elle serait imposée sur la plus-value latente de ses avoirs financiers.


Conclusion

Le projet de taxation des plus-values marque une réforme majeure de la fiscalité belge.

Il introduit aussi des mécanismes qui n'étaient pas nécessairement anticipés, comme une nouvelle « exit tax », dont les effets pourraient être sensibles en matière de planification successorale internationale, en particulier lors de donations à des donataires résidant à l'étranger.

Il faudra également observer attentivement la réaction du secteur bancaire, traditionnellement peu enthousiaste face aux lourdeurs de mise en œuvre de ce type de prélèvements. L'opposition qu'avait suscitée l'instauration avortée de la taxe sur les plus-values en 2016 reste dans toutes les mémoires.

Les débats au sein du gouvernement et du Parlement s'annoncent âpres, Conner Rousseau — président du Vooruit (ex-SP.A) — ayant déclaré que sans taxe sur les plus-values, il n'y aurait plus de gouvernement.

A suivre…​

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