Les mesures de lutte contre le coronavirus restreignent nos déplacements et nos possibilités de contacts physiques. Cela rend naturellement la tenue des assemblées générales ou des réunions des conseils d’administration plus compliquée, voire impossible.
`Un arrêté royal de pouvoirs spéciaux publié le 9 avril dernier[1] adapte de manière exceptionnelle et temporaire le Code des sociétés et des associations (CSA) en permettant notamment d’avoir recours à certaines procédures alors même que les statuts ne les prévoiraient pas. Ces mesures sont d’application du 1er mars 2020 jusqu’au 3 mai 2020, mais cette période pourrait être prolongée.
Elles s’appliquent aux réunions convoquées entre le 1er mars et le 3 mai 2020, aux réunions qui doivent être tenues entre le 9 avril et le 3 mai, ainsi qu’aux réunions qui auraient dû être tenues entre le 1er mars et le 9 avril mais qui n’ont pas pu l’être.
Ces mesures visent toute société ou association, personne morale, tout organisme de placement collectif revêtant la forme contractuelle, ainsi que toutes personnes morales constituées par ou en vertu d’une loi ou d’un régime particulier qui disposent d’un organe d’administration ou d’une assemblée générale (ci-après, dénommés les « entités »).
L’arrêté royal permet soit de reporter la tenue des assemblées générales, soit, si l’organe d’administration décide de les maintenir, d’assouplir les règles du CSA afin de pouvoir organiser celles-ci dans le respect des mesures prises contre le Covid-19. Des mesures sont également prises pour les réunions du conseil d’administration. C’est ce que nous examinerons ci-après.
Les assemblées générales des entités peuvent se tenir si elles suivent des modalités compatibles avec les mesures prises en réponse à la pandémie de Covid-19.
A cet effet, l’arrêté royal permet notamment à l’organe d’administration d’interdire toute présence physique d’actionnaires, de membres de l’assemblée générale, ou de leurs mandataires. Alors même que les statuts ne le prévoiraient pas et donc, en dérogation au CSA, il peut alors être fait usage de moyens de communication à distance (conférence téléphonique ou vidéo par exemple).
L’article 6 prévoit également que l’organe d’administration peut imposer, même en l’absence d’une autorisation statutaire, que les actionnaires ou les membres exercent leurs droits exclusivement :
(i) En ce qui concerne le vote à distance :
Pour les sociétés anonymes, l’arrêté prévoit que l’organe d’administration met à disposition un formulaire ou publie celui-ci sur son site internet conformément à l’article 7:146 du CSA.
Pour les autres entités, l’arrêté royal invite celles-ci à se référer à leurs dispositions statutaires et en l’absence de celles-ci, aux règles applicables à la société anonyme.
(ii) En ce qui concerne le vote par procuration :
L'arrêté permet à l'organe d'administration d'imposer que les procurations soient accordées à une personne déterminée (en respectant les règles de conflits d’intérêts), étant entendu qu’elles doivent alors contenir des instructions de vote spécifiques pour chaque proposition de décision. Ceci permet d'organiser l'assemblée générale en cercle fermé.
Si la société ou l’association avait déjà reçu une procuration valable contenant des instructions de vote spécifiques mais pour laquelle le mandataire n’est ni l’entité ni une autre personne désignée par son organe d’administration, les décisions exprimées dans cette procuration seront prises en compte sans que ce mandataire ne doive être présent.
En ce qui concerne le droit des actionnaires de poser des questions, l’organe d’administration peut également imposer que seules des questions écrites lui soient posées et que les actionnaires lui communiquent les questions au plus tard le 4e jour précédant l’assemblée générale. Si l'entité choisit de permettre aux actionnaires ou aux membres de suivre la réunion à distance, elle peut répondre aux questions à ce moment-là. Elle peut également répondre à ces questions par écrit, auquel cas elle communiquera les réponses au plus tard le jour de la réunion. Les sociétés cotées le font sur leur site web, les autres entités le font de la manière la plus appropriée.
Pour les décisions devant être constatées par un acte authentique, la présence d’une seule personne devant le notaire pour signature est suffisante.
Rappelons encore qu’en tout état de cause, il est possible[2], même si les statuts ne prévoient pas expressément cette possibilité, de remplacer la tenue d’une assemblée générale par une procédure écrite, sans réunion physique des actionnaires. Cela nécessite toutefois que les décisions soient prises à l’unanimité des actionnaires. Cette procédure ne peut pas être utilisée pour les décisions qui doivent revêtir la forme d’acte authentique.
L’article 7 de l’arrêté prévoit que l’organe d’administration peut reporter l’assemblée générale ordinaire à une date ultérieure même si celle-ci a déjà été convoquée. Il doit alors en informer toute personne ayant le droit d’y participer. Les sociétés cotées ayant déjà convoquée l’assemblée doivent être attentives au fait qu’il faut effectuer cette démarche d’information au plus tard le 4e jour avant la date prévue.
Cette faculté de report permet d’ajouter dix semaines aux délais suivants :
Il est également possible de reporter les assemblées générales extraordinaires, à l’exception de celles convoquées en application de la procédure de la sonnette d’alarme, de celles convoquées par le commissaire, et de celles convoquées à la demande d’actionnaires ou de membres de l’assemblée.
Enfin, l’article 8 de l’arrêté précise que les réunions du conseil d’administration peuvent aussi se tenir au moyen de techniques de communication permettant une délibération à distance.
En tout état de cause, s’il n’est pas possible d’organiser un système de discussion, l'organe d'administration peut valablement et en toutes circonstances prendre une décision par écrit si elle est acceptée à l’unanimité.
[1] Arrêté royal n° 4 du 9 avril 2020 portant des dispositions diverses en matière de copropriété et de droit des sociétés et des associations dans le cadre de la lutte contre la pandémie Covid-19.
[2] Sauf évidemment si les statuts excluent cette faculté.
Source : Avocats Lenoir