La Cour constitutionnelle s’est prononcée le 18 novembre 2021 sur le recours en annulation partielle de la loi du 20 juillet 2020 portant des dispositions diverses relatives à la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et à la limitation de l’utilisation des espèces (ci-après loi du 20 juillet 2020).
L’annulation est demandée de l’article 32, al. 1er, 1°, n), et des articles 153 à 170 de la loi du 20 juillet 2020. Cette loi a transposé la cinquième directive anti-blanchiment.
Il est reproché aux dispositions attaquées de violer articles 10 et 11 de la Constitution, lus en combinaison ou non avec la liberté d’entreprendre, en ce que le contrôle des conseillers fiscaux non certifiés est confié à l’IEC.
La Cour décide premièrement qu’il n’y a pas lieu de traiter de manière identique au regard de chaque aspect de la réglementation présentement attaquée :
La directive (UE) 2015/849 prévoit que les États membres exigent des autorités compétentes qu’elles assurent un suivi effectif du respect de la directive et qu’elles prennent les mesures nécessaires à cet effet.
En ce qui concerne les experts comptables externes et les conseillers fiscaux, les États membres peuvent permettre que ces fonctions soient exercées par un « organisme d’autorégulation », c’est-à-dire un organisme qui représente les membres d’une profession et joue un rôle pour édicter des règles les concernant, assurer certaines fonctions de contrôle ou de surveillance et veiller au respect des règles les concernant.
En soumettant les conseillers fiscaux certifiés au contrôle de l’IEC, le législateur belge a fait usage de la marge d’appréciation qui lui est laissée par la directive (UE) 2015/849.
L’IEC est, vis-à-vis de ces conseillers fiscaux, un organisme d’autorégulation au sens de l’article 3, point 5, de la directive (UE) 2015/849. L’IEC veille notamment au bon accomplissement de la profession de conseiller fiscal certifié par des spécialistes, dans le respect des règles applicables en matière d’accès et d’exercice de cette profession et, en particulier, dans le respect de l’obligation de secret professionnel.
Vis-à-vis des conseillers fiscaux non certifiés, l’IEC ne peut être considéré comme un organisme d’autorégulation. Il ne joue aucun rôle structurel dans l’élaboration ou le contrôle du respect des règles applicables aux conseillers fiscaux non certifiés. Les conseillers fiscaux non certifiés ne sont pas soumis aux mêmes règles que les conseillers fiscaux certifiés et ne sont pas non plus soumis à la même obligation de secret professionnel.
La Cour constitutionnelle rappelle que c’est la qualification en tant qu’organisme d’autorégulation d’un groupe professionnel déterminé qui permet de confier le contrôle de ce groupe professionnel à un organisme.
La réglementation attaquée a pour effet que les conseillers fiscaux non certifiés, du fait de l’obligation d’inscription au registre public, certes sur une liste séparée, sont tenus de devenir membres de l’Institut.
Il est raisonnablement justifié de soumettre les conseillers fiscaux non certifiés, tout comme les conseillers fiscaux certifiés, à un contrôle préventif en matière de blanchiment. Il n’est pas raisonnablement justifié de confier à l’IEC ce contrôle préventif à leur égard et de leur imposer l’obligation de devenir membres de cet Institut, sous peine d’une interdiction professionnelle.
Il y a lieu d’annuler les articles 153 à 170 ainsi que l’article 32, al. 1er, 1°, n), de la loi du 20 juillet 2020.
La Cour maintient les effets des dispositions annulées jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle réglementation adoptée par le législateur et au plus tard jusqu’au 31 mars 2022 inclus.