La matière (aride) des prix de transfert (transfer pricing) ne doit pas être prise à la légère. Comme l'illustre la jurisprudence récente, elle peut trouver à s'appliquer à de nombreuses transactions intragroupes, et parfois dans des situations (totalement) inattendues.
Dans un arrêt du 28 février 2023, la Cour d'appel de Bruxelles a augmenté la base imposable d'une société belge B (article 26 du CIR), dans le cadre d'une augmentation de capital en nature faite par une société luxembourgeoise (A) dans une autre société belge (C). La société redressée n'était donc PAS partie à l'opération.
En l'espèce, A avait apporté sa créance contre C (pour une valeur d'environ 12mio€). Le noeud du problème: le prix d'émission des actions nouvelles de C octroyées à A dans le cadre de l'augmentation de capital était largement inférieur à leur valeur réelle (en raison de l'absence de prise en compte de plus-values latentes sur des actifs de C). Autrement dit, A a reçu un nombre excessif d'actions dans C. Par conséquent, B, qui est aussi actionnaire de C, s'est appauvri au profit de A: la valeur de la participation de B dans C a été réduite de 13mio à 3mio€. Cet appauvrissement (avantage anormal ou bénévole octroyé) a été rajouté à sa base imposable.
On voit qu'une société peut se faire redresser... alors qu'elle n'était pas formellement partie à l'apport en nature!
Dans un arrêt du 25 novembre 2022, la Cour de cassation a entériné le redressement de la base imposable d'une société belge (à hauteur d'environ 10mio €) qui avait cédé des créances à valeur nominale (alors que leur valeur économique était proche de zéro) à une société étrangère liée, sur le fondement de l'ancien article 207 (aujourd'hui l’article 206/3, § 1 du CIR, qui prévoit une base imposable minimale à l'ISOC). Pas sûr ici aussi que la société redressée avait tablé sur un tel redressement pour une cession de créances à ... valeur nominale.