Provision pour garantie de loyer dans le cadre de la vente d'un bâtiment non loué

Décision individuelle relevant du droit comptable n° 2020/003 du 24 juin 2020


Synthèse


La comptabilisation d'une provision pour risque de vide locatif à l’occasion d'une opération consistant en la vente d'un centre logistique avec obligation de location intrinsèque et temporaire, selon la méthode décrite dans la demande, est conforme aux articles 3:11 et 3:28 à 3:33, AR CSA.


Publication anonyme


La demande vise à savoir si le traitement comptable de l’opération décrite ci-dessous est conforme au droit comptable belge. Le demandeur souhaite en particulier que l'on confirme que la comptabilisation dans le chef de la société X d'une provision selon la méthode décrite dans la demande est conforme aux articles 3:11 et 3:28 à 3:33 de l’arrêté royal du 29 avril 2019 portant exécution du Code des sociétés et des associations (ci-après : AR CSA).


  • Image fidèle – principe de comptabilisation d'une provision


Les comptes annuels doivent donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de la société. Dans cette optique, conformément à l’article 3:11, AR CSA, il doit être tenu compte de tous les risques prévisibles, des pertes éventuelles et des dépréciations qui ont pris naissance au cours de l’exercice auquel les comptes annuels se rapportent ou au cours d’exercices antérieurs.


La société X a l'intention de construire un centre logistique et de le vendre à une tierce partie qui ne fait pas partie de son périmètre de consolidation, et lui promet un rendement locatif garanti durant N années.

Dans le cas d'un simple contrat d'entreprise, le résultat réalisé correspond à la différence entre le prix de vente et les coûts de construction. Les bâtiments qui peuvent être vendus loués avec un contrat de location avantageux ont une valeur plus élevée sur le marché que les bâtiments sans contrat de location. Comme indiqué par le demandeur, le centre logistique n’est pas encore loué à la date de la conclusion de la convention de vente.


Au moment de la conclusion, la plus-value initiale supplémentaire découle à part entière de la garantie de loyer offerte par la société X. La plus-value comptabilisée dans le chef de la société au moment de la convention de vente, qui implique une réalisation, n’est donc pas encore entièrement réalisée en raison de la garantie de loyer offerte. Le fait d’enregistrer purement et simplement la plus-value ne donnerait pas une image fidèle du patrimoine de la société. Le risque lié à cette garantie de loyer doit être repris de façon adéquate dans les comptes annuels de la société X. Il convient alors de constituer des provisions, conformément aux articles 3:11 et 3:28 à 3:33, AR CSA et en accord avec l’avis CNC 2018/25, en respectant les conditions suivantes :

  • le risque ou la charge doit être nettement circonscrit quant à sa nature ;
  • le risque ou la charge doit être probable ou certain à la date de clôture de l’exercice, mais indéterminé quant à son montant ; et
  • le principe de rapprochement doit être pris en considération.

Le risque comprend, en raison de la garantie de loyer octroyée à l’acquéreur, le paiement de la totalité des loyers par la société X si des locataires ne sont pas trouvés à temps. Le risque peut donc être nettement circonscrit.

De plus, le risque est probable étant donné que la société X doit chercher différents locataires et qu’elle devra payer elle-même les loyers tant qu’elle n’en aura pas trouvé. Il s'agit en outre d'un bâtiment entièrement neuf d'une superficie considérable, qui sera mis sur le marché de la location dans son ensemble. Le risque de vide locatif est donc probable. Par contre, le montant exact est incertain à la date du bilan.


Le modèle d'imputation développé pour les coûts liés à la garantie de loyer par le demandeur, en l’espèce les coûts de vide locatif, implique que les coûts de vide locatif portant sur une année donnée, doivent être imputés au résultat de la même année. Ceci permet de respecter le principe de rapprochement.


  • Modèle d’imputation à appliquer


En ce qui concerne le montant de la provision à constituer, le Collège tient tout d'abord à préciser qu'il ne se prononce pas, dans la présente décision, sur :

  • le taux de vide locatif à appliquer dans le modèle développé pour un bâtiment logistique « mature » ;
  • l’estimation de la différence entre la valeur de vente du centre logistique loué, en l’espèce avec le rendement locatif garanti, et la valeur de vente estimée en cas de simple contrat d’entreprise.

L'organe d’administration de la société X a développé le modèle d'imputation décrit ci-après pour déterminer la provision à constituer. Au cours de l’année de la vente du centre logistique, la société X constituera une provision basée, d'une part, sur le loyer annuel et, d'autre part, sur la durée de la garantie de loyer et une estimation du taux de vide locatif moyen d'un bâtiment logistique « mature ». La provision est déterminée par la multiplication du loyer annuel par le taux de vide locatif attendu durant cette année. Chaque année, ce taux de vide locatif est graduellement revu à la baisse.


L'organe d’administration de la société X prévoit que ce taux moyen de vide locatif sera atteint dans un délai d’environ H années. Cette hypothèse est notamment étayée par le délai et le montant des garanties bancaires et de la garantie de groupe demandée. Ceci confirme indirectement que l'acquéreur part également du principe que le bâtiment atteindra un taux d'occupation normal après une période d’environ H années.

A partir de l’année H+1, une provision sera encore constituée pour les années restantes de la garantie de loyer sur la base du taux moyen de vide locatif d'un centre logistique « mature ». La détermination de ce taux moyen de vide locatif ne fait pas partie de cette demande.


  • Vérification annuelle


Le montant de la provision sera réexaminé chaque année par rapport à son efficacité et son exactitude. Si le taux de vide locatif effectif s’avère être supérieur ou inférieur au cours d'une année déterminée, la position de l’année en question sera adaptée en fonction du taux de vide locatif effectif et la provision sera progressivement diminuée sur la base de ce pourcentage. Le taux de vide locatif effectif sera calculé sur la base de la proportion entre, d'une part, le produit du nombre d'unités louées et des durées de location des unités louées et, d’autre part, le produit du nombre total d'unités et de la durée résiduelle de la garantie de loyer.


Le Collège tient à souligner que, si à un moment donné, le taux de vide locatif s'avère supérieur aux estimations reprises dans le modèle présenté, les adaptations nécessaires doivent être apportées sans délai au modèle afin de respecter le principe de prudence.


Le Collège de la CNC décide que, dans les circonstances particulières concrètes décrites par le demandeur :

  • la constitution d'une provision visant à couvrir le risque de vide locatif, qui est indissociablement liée à la vente décrite ci-dessus, est conforme aux articles 3:11 et 3:28 à 3:33, AR CSA si la provision est constituée et progressivement diminuée sur la durée couverte par la garantie, selon la méthode avancée dans la présente décision ;
  • le Collège ne se prononce pas, dans la présente décision, sur le taux de vide locatif à appliquer pour un bâtiment « mature »


Source : CNC, DIDC du 5 octobre 2020

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