Registre UBO – Omission de mentionner les bénéficiaires économiques

Faut-il, dans le cadre d’un mandat de commissaire, en complément à une mention en seconde partie de rapport, signaler à l'Administration de la trésorerie l'infraction du registre UBO qui ne renseigne pas les bénéficiaires économiques de la société?

  1. La question suivante est posée :
    « Dans le cadre d’un mandat de commissaire, il a été constaté que le registre UBO ne renseigne pas les bénéficiaires économiques de la société. La société ne veut pas le mettre à jour. Faut-il signaler, en complément à une mention en seconde partie de rapport, l'infraction à l'Administration de la trésorerie notamment au vu de l'annulation obtenue auprès de la Cour constitutionnelle par les barreaux, dont la jurisprudence pourrait être considérée comme applicable mutatis mutandis au commissaire ? »
  2. D’abord il convient de rappeler que la collecte, la conservation d’informations et leur transmission au registre UBO est une obligation établie parl’article 1:35 du CSA, qui dispose ce qui suit :
    « Les sociétés et les personnes morales sont tenues de recueillir et de conserver des informations adéquates, exactes et actuelles sur leurs bénéficiaires effectifs. Les informations concernent au moins le nom, la date de naissance, la nationalité et l'adresse du bénéficiaire effectif, ainsi que, s'il s'agit d'une société, la nature et l'étendue de l'intérêt économique détenu par lui. Le bénéficiaire effectif fournit à l'entreprise ou à la personne morale dont il est le bénéficiaire toutes les informations dont cette entreprise et cette personne morale ont besoin pour satisfaire aux exigences visées dans ce paragraphe.
    L'organe d'administration transmet, dans le mois et par voie électronique, les données visées à l'alinéa précédent au Registre des bénéficiaires effectifs (UBO), créé par l'article 73 de la loi précitée, et ce, de la manière prévue par l'article 75 de cette même loi.
    Outre les informations sur le propriétaire légal, l'information sur le bénéficiaire effectif, visé à l'alinéa 2, est fournie aux entités assujetties, visées à l'article 5, § 1er, de la loi précitée, lorsque celles-ci prennent des mesures de vigilance à l'égard de la clientèle, conformément au livre II, titre 3, de cette même loi. ».
  3. S’il y a lieu de considérer que l’article 1 :35 précité a été violé, l’article 3:75, § 1er, 9° du CSA pourrait trouver à s’appliquer. Conformément à cette disposition, les commissaires doivent indiquer dans leur rapport : « qu'ils n'ont point eu connaissance d'opérations conclues ou de décisions prises en violation des statuts ou du présent code. S'ils ont eu connaissance de telles infractions, ils doivent en faire mention. Toutefois, cette mention peut être omise lorsque la révélation de l'infraction est susceptible de causer à la société un préjudice injustifié, notamment parce que l'organe d'administration a pris des mesures appropriées pour corriger la situation d'illégalité ainsi créée; ».
  4. En vertu de l’article 3:71 du CSA :« Sans préjudice de la limitation de la responsabilité conformément à l'article 24, § 1er, de la loi du 7 décembre 2016 portant organisation de la profession et de la supervision publique des réviseurs d'entreprises, les commissaires sont responsables envers la personne morale des fautes commises par eux dans l'accomplissement de leurs fonctions. Ils répondent solidairement tant envers la personne morale qu'envers les tiers de tout dommage résultant d'infractions aux dispositions du présent code ou des statuts.
    Ils ne sont déchargés de leur responsabilité, quant aux infractions auxquelles ils n'ont pas pris part, que s'ils prouvent qu'ils ont accompli les diligences normales de leur fonction et qu'ils ont dénoncé ces infractions à l'organe d'administration et, le cas échéant, s'il n'y a pas été remédié de façon adéquate, à l'assemblée générale la plus prochaine après qu'ils en auront eu connaissance. ».
  5. En ce qui concerne la notification de l’infraction à l’Administration, celle-ci ne découle pas du Code des Sociétés et des Associations mais elle était prévue par l’article 19, §1erde l’arrêté royal du 30 juillet 2018 relatif aux modalités de fonctionnement du registre UBO. Ce paragraphe a été suspendu ( [1] ) et ensuite annulé ( [2] ) par le Conseil d’Etat. Enfin, l’entièreté de cette disposition a été abrogée par un arrêté royal du 22 septembre 2020 modifiant l'arrêté royal du 30 juillet 2018 relatif aux modalités de fonctionnement du registre UBO.
    Il n’y a dès lors plus d’obligation pour les entités assujetties (en ce compris, le commissaire et le réviseur d’entreprises non-commissaire) de signaler à l’Administration de la Trésorerie toute différence qu'elles constateraient entre les informations reprises dans le registre et celles dont elles ont connaissance.
  6. De ce qui précède, l’ICCI est d’avis que le commissaire est tenu de mentionner en seconde partie de son rapport l’infraction à l’article 1:35 du CSA, sauf s‘il juge que la révélation de l'infraction est susceptible de causer à la société un préjudice injustifié, notamment parce que l'organe d'administration a pris des mesures appropriées pour corriger la situation d'illégalité ainsi créée .

Le commissaire peut, conformément à l’article 3:71, alinéa 2 du CSA, être déchargé de sa responsabilité, quant aux infractions auxquelles il n’a pas pris part, s’il prouve qu’il a accompli les diligences normales de sa fonction et qu'il a dénoncé ces infractions à l'organe d'administration et, le cas échéant, s'il n'y a pas été remédié de façon adéquate, à l'assemblée générale la plus prochaine après qu'il en ait eu connaissance.

Par contre, aucune notification à l’Administration de la Trésorerie ne doit être faite.


( [1] ) C.E., 11 avril 2019, n°244.231, cf.

( [2] ) C.E., 26 juin 2020, n°247.922, cf.

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Source : ICCI

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