
Ce n’est un secret pour personne, la pandémie a bouleversé nos habitudes de travail. Epiphénomène ou changement profond, opportunité ou menace ? Le phénomène pose énormément de questions et les réponses sont loin d’être définitives.
Si le télétravail était applaudi par les employés lors du premier confinement, tablant sur un meilleur équilibre vie privée /vie professionnelle, l’expérience a démontré ses limites.
Aujourd’hui, en (très) résumé, beaucoup de dirigeants de grandes entreprises l’encensent, ceux des PME s’inquiètent, les managers le critiquent et les employés commencent à déchanter.
Les divergences proviennent principalement du secteur d’activité de l’entreprise, son degré de digitalisation, des catégories socio-culturelles, de la complexité des tâches, de l’âge des collaborateurs et de l’importance des liens sociaux.
Une question qui intéresse particulièrement les dirigeants d’entreprise est celle de la productivité. Si au début ils avaient des craintes, aujourd’hui, ils se sentent rassurés, les avantages semblant supplanter les inconvénients.
Cependant, malgré les nombreuses études en la matière, dont celle de l’OCDE du 21 septembre 2021, il n’y a pas de réponse tranchée pour la bonne et simple raison qu’il n’y a pas de définition unique de la productivité.
Parle-t-on des économies réalisées en termes coûts (location immobilière, consommation d’énergie, …), de temps improductif (embouteillage, temps passer en voiture/transports en commun, …) ou de réelle productivité du facteur travail à savoir plus d’output pour un input constant ?
Et s’il existe des gains de productivité, sont-ils le fruit d’une véritable amélioration de l’efficacité, par exemple, grâce à des outils plus performants, ou se font-ils au détriment des salariés au travers de l’allongement du temps de travail ?
La seconde théorie trouve son écho dans une étude récente de Harvard qui révèle qu’à la suite de la mise en place du télétravail, le temps presté a augmenté en moyenne de 48,5 minutes soit près de 4 heures par semaine. Ceci représente plus de 10% d’un horaire hebdomadaire normal et tout ça « gratis pro-deo ».
Si cette théorie s’avère correcte, et que le télétravail n’est pas librement choisi par les collaborateurs, il est probable qu’il y ait un retour de manivelle, dû à l’épuisement, la détérioration de la qualité de vie, l’absence de reconnaissance ou de contreparties.
La clé d’une amélioration pérenne de la productivité passe aussi par la fréquence du télétravail.
Selon les recherches réalisées par les économistes, Antoine Bergeaud et Gilbert Cette, il existe un point idéal de productivité en fonction de l’intensité du télétravail. Ils démontrent que la productivité des salariés s’améliore lorsque le télétravail est faible et se détériore lorsqu’il est excessif. Trouver ce point d’équilibre « spécifique » pour chacune des entreprises est un défi majeur.
Ce sujet, complexe s’il en est, fera encore couler beaucoup d’encre et même si le tout au télétravail n’a pas (encore ?) la cote, la majorité des collaborateurs, managers et employés, aspirent aujourd’hui à travailler un jour ou deux par semaine de chez eux. Il semble qu’on se dirige donc vers un environnement de travail hybride qui mélange télétravail et présentiel.
Forcer le télétravail, volonté politique actuelle dictée par la situation sanitaire, risque d’avoir des conséquences négatives sur les performances économiques et financières des entreprises mais également sur la santé physique et mentale des équipes.
Si vous êtes dirigeants de TPE/PME et que vous voulez mettre en œuvre le télétravail, je vous invite à en parler ouvertement avec vos collaborateurs car comme dit l’adage auquel je crois fermement :«quand on m’impose, je m’oppose et quand on m’explique, je m’implique ».