En une semaine, tout a changé pour les Européens. James Vance, le vice-président américain, a fustigé la démocratie européenne et soutenu des partis souverainistes dont l’objectif est la fragmentation de l’Union européenne, et probablement le démantèlement de l’euro.
Le président américain a lui aussi modifié le narratif de la guerre et conclu à une agression ukrainienne, accréditant les thèses russes et disqualifiant toute l’action européenne, pourtant encouragée par les Européens.
L’Europe est donc attaquée de l’intérieur et de l’extérieur par les États-Unis et la Russie. L'ordre de 1945 s'est effondré, définitivement..
Il n’y a pas d’autres mots : c’est pire qu’une catastrophe, c’est la fin de l’illusion d’un monde. C’est aussi la fin d’une illusion, car le narratif belliqueux des Européens n’était crédible que grâce à l’aide et à la protection américaines, ce qui le rendait donc facile à formuler. Quelle est la crédibilité de nos dirigeants alors qu’ils sont désormais vulnérables devant leurs propres opinions publiques ?
Vont-ils continuer à prôner le maintien de la guerre en engageant des dépenses colossales et, bien sûr, en rétablissant le service militaire, ou du moins quelque chose qui y ressemble ?
Car désormais, les dirigeants européens ont perdu leur légitimité extérieure et, en partie, intérieure. Et cela va alimenter la fragmentation de l’Europe.
Cette perte de crédibilité de nos dirigeants exige désormais un débat démocratique. Il n’est plus tolérable qu’un nombre limité de dirigeants décide de notre avenir militaire. D’ailleurs, il me semble évident que la Commission va devoir être modifiée. Il est impensable que nos dirigeants européens restent en place.
Bien sûr, on qualifiera les personnes partageant mon opinion de Munichois, en référence à l’abandon de Daladier et Chamberlain face aux exigences d’Hitler concernant les Sudètes en septembre 1938. On me rappellera aussi que certains disaient plutôt morts que rouges, en référence à la crainte du bolchevisme.
Mais voilà. J’ai fait mon service militaire comme officier dans un monde en paix, et je ne veux pas que ma fille de 24 ans connaisse la guerre. Et cela, je l’entends partout. Aucune de mes connaissances ne veut que ses enfants soient sacrifiés à la folie de certains.
Avec un effroyable réalisme, Paul Valéry disait : la guerre est faite par des gens qui ne se connaissent pas et qui s’entretuent pour des gens qui se connaissent, mais ne s’entretuent pas. Lors de son dernier discours à la Chambre des députés, le 24 juillet 1914, Jaurès avait dit : les peuples ne veulent pas la guerre. Ils sont jetés les uns contre les autres par de petits groupes d’hommes qui, en leur nom, préparent l’extermination.
Il faut désormais un débat démocratique, et pas simplement parlementaire.