2024 : extension des flexi-jobs, mais renforcement des conditions


Introduits par la loi du 16 novembre 2015 portant des dispositions diverses en matière sociale, les flexi-jobs permettent d’une part aux employeurs actifs dans certains secteurs (jusqu’en 2018 uniquement dans le secteur de l’Horeca), confrontés de par la nature de leur activité (généralement saisonnière ou liée aux conditions météorologiques) à des périodes de pic fluctuantes, de lutter contre le manque de main d’œuvre, et permettent d’autre part à certains travailleurs (et pensionnés) d’exercer une activité salariée complémentaire à des conditions (para)fiscales avantageuses.

Outre le but de stimuler le recours flexible à des travailleurs salariés, l‘objectif du législateur était de toute évidence de lutter contre le travail au noir.

Objectif de la Loi-programme du 22 décembre 2023

La Loi-programme a, notamment, pour objectif d’une part de mettre en place un meilleur cadre juridique afin d’empêcher les abus et usages inappropriés du régime des flexi-jobs et d’autre part de l’élargir à d’autres secteurs, également confrontés à des périodes de pic fluctuantes.

Principales nouveautés entrées en vigueur le 1er janvier 2024

1. Extension des secteurs visés

Les secteurs suivants étaient visés au 31 décembre 2023 :

  1. Industrie alimentaire (CP 118) pour les entreprises de commerce de détail de chocolat artisanal en magasin spécialisé et les boulangeries qui versent des cotisations au Fonds social et de garantie pour les boulangeries, pâtisseries et salons de consommation annexés ;
  2. Commerce alimentaire (CP 119) ;
  3. Commerce de détail indépendant (CP 201) ;
  4. Commerce de détail alimentaire (CP 202); Moyennes entreprises d’alimentation (CP 202.01) ;
  5. Sports (CP 223) ;
  6. Horeca (CP 302) ;
  7. Exploitation des salles de cinéma (CP 303.03) ;
  8. Spectacle (CP 304 - ! exclusions) ;
  9. Grandes entreprises de vente au détail (CP 311) ;
  10. Grands magasins (CP 312) ;
  11. Coiffure et des soins de beauté (CP 314) ;
  12. Établissements ou services de santé à l’exclusion des fonctions soignantes (CP 330) ;
  13. secteur publique des soins de santé (pour les activités déclarées sous les codes NACE visés par la loi) ;
  14. Travail intérimaire (CP 322), si l’utilisateur ressort d’un des secteurs précédents ;

Nouveaux secteurs visés depuis le 1er janvier 2024

  • Entreprises de garage (CP 112) ;
  • Industrie alimentaire (CP 118) : boulangeries industrielles et artisanales, pâtisseries artisanales, glaciers artisanaux et salons de consommation d’une pâtisserie artisanale ; brasseries et malteries ; industrie des boissons, maraîchère, fruitière, de la viande, de transformation et d’épluchage de pommes de terre ; produits laitiers ; chocolateries et confiseries ;
  • Entreprises de travaux techniques agricoles et horticoles (CP 132) ;
  • Autobus & autocars (SCP 140.01) ;
  • Déménagement (SCP 140.05) ;
  • Agriculture (CP 144) ;
  • Horticulture (CP 145) ;
  • Écoles de conduite de véhicules à moteurs (CP 200) ;
  • Pompes funèbres (CP 320) ;
  • Gestion immeubles, agents immobiliers et travailleurs domestiques (CP 323) ;
  • Évènementiel (pour les activités déclarées sous les codes NACE visés par la loi) ;
  • Sur demande de l’entité fédérée et après adoption d’un arrêté royal : Garde d’enfants, Enseignement, Sport et Culture (activités spécifiquement visées par la loi-programme) ;

Opting-in et opting-out

Les nouveaux secteurs visés - et uniquement ceux-ci - ont désormais la possibilité de conclure une CCT sectorielle interdisant (partiellement) l’usage des flexi-jobs, tandis que les secteurs non encore visés pourront conclure une CCT sectorielle introduisant l’usage des flexi-jobs.

Via AR après demande unanime de la (sous-)commission paritaire compétente.


2. Renforcement des conditions dans le chef du travailleur ou pensionné

Les conditions d’occupation existantes sont maintenues, à savoir :

  • Le flexi-jobiste doit avoir été occupé, durant le trimestre T-3, chez un ou plusieurs employeurs à concurrence d’au moins 4/5ème d’une occupation temps plein[1]ou avoir acquis durant le T-2 la qualité de pensionné ;
  • Durant le trimestre au cours duquel un travailleur exerce un flexi-job, il ne peut être en préavis ni en période couverte par une indemnité de rupture ou une indemnité en compensation du licenciement à charge de l’employeur auprès duquel il exerce le flexi-job ;

tout en étant dorénavant complétées par de nouvelles conditions ayant pour but de contrer les abus du système consistant en un recours au flexi-job avec des travailleurs déjà au service de de l’entreprise :

Interdiction de cumul

Le flexi-jobiste ne peut être occupé au même moment et au sein de la même entreprise où il exerce le flexi-job, ni au sein d’une entreprise liée (ses filiales, ses sociétés mères et celles avec lesquelles elle forme un consortium), en vertu d’un autre contrat de travail pour une occupation d’au moins 4/5ème d’un emploi à temps plein ;

Délai de carence

Les travailleurs qui passent d’un emploi à temps plein à un emploi à 4/5ème temps devront respecter un délai de carence de trois trimestres avant de pouvoir travailler en tant que flexi-jobistes.


3. Formalités et obligations

Les formalités et obligations sont restées identiques, à savoir :

  • La conclusion de deux contrats, dont l’employeur doit conserver une copie sur le lieu de travail du travailleur concerné, à savoir :
    • Un contrat cadre
      Obligatoirement écrit, à durée déterminée ou indéterminée, le contrat-cadre doit être conclu au plus tard avant le début de la première occupation et doit contenir des mentions obligatoires (identité des parties ; manière et délai suivant lesquels le contrat flexi-job est proposé par l’employeur au travailleur ; sommaire description des fonctions ; rappel des conditions d’occupation du travailleur).
    • Un contrat Flexi-job
      Il est conclu, pour une durée déterminée ou pour un travail nettement défini, pour chaque occupation comme flexi-jobiste. Il peut être oral pour une occupation d’une journée.

( ! ) En cas de non-respect de ces formalités, il ne s’agira plus d’une occupation comme flexi-jobiste, mais d’une occupation ordinaire, entrainant la perte du traitement (para)fiscal avantageux

  • Introduction d’une déclaration Dimona « FLX » pour chaque période (max. un trimestre)[2] avec enregistrement des heures de début et de fin des prestations et d’une déclaration trimestrielle DmfA
  • Vérification trimestrielle par l’employeur si le travailleur remplit les conditions d’occupation comme flexi-jobiste


4. Augmentation du Flexi-salaire

Au 31 décembre 2023, le Flexi-salaire (indexé) s’élevait à minimum 11,81 €/h, sauf dans le secteur des soins de santé où il était majoré à 15,39 €/h (le cas échéant complété de suppléments, primes et avantages sectoriels) et le Flexi-pécule s’élevait à 7,67% du flexi-salaire.

Flexi-salaire depuis le 1er janvier 2024

Le salaire des flexi-jobistes est dorénavant aligné sur le barème salarial en vigueur dans le secteur (en l’absence de barèmes sectoriels, il sera aligné au RMMMG)

( ! ) Exception : au sein du secteur de l’Horeca, le salaire minimum de 11,81 €/h reste d’application.

Maintien du traitement (para)fiscal avantageux mais augmentation des cotisations ONSS patronales et limitation des montants défiscalisés


Employé

Employeur

+

Salaire brut[3] = salaire net (salaire non assujetti aux cotisations ONSS personnelles et non-imposable)

Augmentation de la cotisation ONSS patronale de 25 % à 28 %

Limitation du montant défiscalisé :

  • Travailleurs au moins à 4/5ème : 12.000,00 €/an
  • Travailleurs RCC (anciennement prépension) : 7.190,00 €/an.
  • Pensionnés : pas de plafond


5. Introduction de sanctions pénales

En cas d’occupation d’un flexi-jobiste alors que les prestations effectuées par celui-ci ne rentrent pas dans le champ d’application : Sanction de niveau 3 (amende administrative de 400,00 à 4.000,00 € ou amende pénale de 800,00 à 8.000,000 €)

En cas de non-respect des obligations relatives à la conclusion d’un contrat-cadre ou la conservation sur le lieu de travail des contrats : Sanction de niveau 2 (amende administrative de 200,00 à 2.000,00 € ou amende pénale de 400,00 à 4.000,00 €)


Notre avis

Voici une initiative louable du gouvernement avec l’objectif de flexibiliser le marché du travail, qui ne peut qu’être applaudie par les entreprises actives dans les secteurs visés, qui sont, tout comme le secteur Horeca, confrontées à des pics d’activité. Force est cependant de constater qu’elle n’est pas accueillie aussi favorablement par les organisations syndicales. Elles y voient une généralisation de ce qui devait rester une exception, au détriment de la concertation, de la sécurité sociale et de l’égalité entre les travailleurs. Selon les organisations syndicales cela semble servir les intérêts des fédérations patronales et vise à atteindre, à n’importe quel prix, le taux d’emploi de 80%.


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