Droit d'auteur et droit moral : qu'en reste-t-il en cas de cession?

Une création ne devient véritablement une « œuvre » que par sa communication au public. Cependant, une fois dévoilée, elle n’appartient plus tout à fait à son auteur. Celui-ci n’en est pas dépossédé uniquement eu égard à sa maitrise économique mais également d’un point de vue intellectuel. D’autres auteurs vont ultérieurement se réapproprier l’œuvre initiale, l’intégrer dans la leur, consciemment ou inconsciemment, la critiquer, l’interpréter,…[1]

C’est dans ces conditions qu’a vu le jour la théorie du « droit moral » permettant de protéger l’auteur contre la dépossession de son œuvre.

Cependant, ces droits moraux sont-ils absolus ?

La renonciation de l’auteur à l’exercice de son droit moral

L’article XI.165, §2, al.1er, du Code de droit économique (CDE) énonce :

« L'auteur d'une œuvre littéraire ou artistique jouit sur celle-ci d'un droit moral inaliénable. La renonciation globale à l'exercice futur de ce droit est nulle. Celui-ci comporte le droit de divulguer l'œuvre. Les œuvres non divulguées sont insaisissables. L'auteur a le droit de revendiquer ou de refuser la paternité de l'œuvre. Il dispose du droit au respect de son œuvre lui permettant de s'opposer à toute modification de celle-ci. Nonobstant toute renonciation, il conserve le droit de s'opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de cette œuvre ou à toute autre atteinte à la même œuvre, préjudiciables à son honneur ou à sa réputation. » (Nous soulignons)

En réalité, le droit belge opère une distinction entre la cessibilité du droit et l’aliénation de celui-ci. Le droit moral est certes « inaliénable » mais il n’en est pas pour autant « incessible ». Aussi bien, si l’auteur ne peut pas aliéner de manière définitive son droit, il peut, en revanche, renoncer à l’exercer, dans certaines conditions[2].

Le droit moral et ses limites

L’auteur d’une œuvre ne peut abuser de son droit moral, qui a pour principal objectif de préserver le lien qui existe entre l’auteur et son œuvre.[3]

Abuse de son droit d’auteur toute personne « qui userait de son droit moral d’une manière dépassant les limites de l’exercice normal de celui-ci par une personne prudente et diligente »[4]

Pour que le droit moral puisse être invoqué, la modification ou la reproduction de l’œuvre doivent être de nature à y porter atteinte.[5]

L’auteur ayant renoncé à son droit, qui serait victime d’une atteinte à son honneur ou à sa réputation par la reproduction de son œuvre, peut dénoncer cette atteinte mais doit prouver l’existence et l’étendue de son préjudice moral.[6]

Que vous soyez victime d’une violation de votre droit moral ou, au contraire, que l’on vous reproche d’avoir porté atteinte au droit moral d’un auteur, l’équipe du cabinet Centrius se tient à votre disposition pour vous conseiller et vous accompagner.

Me David BLONDEEL & Me Justine MABILLE

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[1] A. Berenboom, Le nouveau droit d’auteur (5ème éd.), Bruxelles, Larcier, 2022, pp. 279-280.

[2] A. Berenboom, op. cit., p. 293.

[3] M. Ch. Janssens, « Le droit moral en Belgique », Vol. 25 n° 1, 2013.

[4] Liège, 27 février 2009, Auteurs & Media, 2009, p. 629.

[5] A. Berenboom, op. cit., p. 294.

[6] A. Berenboom, op. cit., p. 295.

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