On lit de plus en plus dans la presse et sur les réseaux sociaux que le régime fiscal des droits d’auteur serait « dévoyé » par les informaticiens qui abuseraient de ce régime (qui pour rappel est inscrit dans la loi ! ).
De manière plus générale , on cherche aujourd’hui à distinguer de manière caricaturale les vrais « artistes » et les autres secteurs illégitimes.
Comme s’il y avait une originalité de seconde zone à opposer à une originalité de première zone caractérisant les œuvres éternelles d’artistes du monde des arts ou des lettres. Cette vision me semble surtout dictée par des considérations d’ordre salarial et n’est pas objective.
En réalité, il est inexact de raisonner de la sorte car c’est méconnaitre les fondements juridiques élémentaires de la reconnaissance d’une propriété intellectuelle accordée aux logiciels .
Le droit d’auteur couvre indubitablement la création de solutions ou développements informatiques ou de modélisations de données. Si tel n’était d’ailleurs pas le cas, pourquoi aurions nous plusieurs centaines de rulings en la matière, comme le souligne d’ailleurs avec pertinence mon confrère
David De Backer
S’il l’on se réfère à la Directive 2009/24/ce du parlement européen et du conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur, on notera d’emblée que celle-ci indique que les programmes d’ordinateur sont inscrits au rang des œuvres littéraires et artistiques au sens de la Convention de Berne.
L’article premier de la Directive énonce : « Conformément aux dispositions de la présente directive, les États membres protègent les programmes d'ordinateur par le droit d'auteur en tant qu'œuvres littéraires au sens de la convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. Les termes « programme d’ordinateur », aux fins de la présente directive, comprennent le matériel de conception préparatoire. La protection prévue par la présente directive s'applique à toute forme d'expression d'un programme d'ordinateur.
Le droit d’auteur porte sur la création d’un logiciel, et cette œuvre de l’esprit s’exprime aussi à différents stades : lors de la création du cahier de charges qui précise les fonctionnalités du logiciel, lors de l’analyse fonctionnelle qui présente les différentes étapes de réalisation du logiciel et lors de l’analyse organique qui vise à forger l’algorithme du programme
La programmation est donc bien visée par la protection des droits d’auteur.
Le SPF Economie rappelle aussi l’étendue de la protection d’un logiciel qui ne se limite donc pas au seul travail de programmation.
Que l’on cesse dès lors d’abuser de l’expression « abus » quand il n’ y en a pas !
Source : Pierre-François COPPENS Conseil fiscal ITAA; Président et Fondateur de l'ADFPC, LinkedIn, octobre 2022