Faillite personnelle du dirigeant : nécessité d’une intervention législative

Lorsqu’une personne physique est déclarée en faillite, elle bénéficie, sauf exceptions, de l’effacement de ses dettes, ce qui la libérera envers ses créanciers du solde de celles-ci.

Afin de bénéficier également de l’effacement réservé aux personnes physiques, certains dirigeants de sociétés déclarées en faillite tentaient de déclarer en même temps leur faillite personnelle. Ces dirigeants s’étaient en effet souvent portés caution d’engagements de leur société.

Selon l’arrondissement judiciaire où la question se plaidait, l’issue pouvait être toutefois très différente. Certains juges estimaient en effet que le dirigeant d’une société en faillite pouvait faire aveu de faillite tandis que d’autres juges estimaient que le dirigeant d’une société en faillite ne pouvait tout simplement pas être lui-même déclaré en faillite.

Très concrètement, en fonction du lieu du siège social de votre société, vous étiez en tant que dirigeant plus ou moins bien loti, avec des conséquences importantes sur votre redressement économique futur.

C’est dans ce contexte que la Cour de cassation est intervenue par un arrêt du 18 mars 2022. Cet arrêt était censé uniformiser le droit. Il ressort de cette décision que seul le dirigeant ayant organisé l’exercice de sa mission en utilisant des moyens financiers, matériels et humains propres peut être assimilé à une entreprise et peut donc être déclaré en faillite.

Bien que cette intervention ait le mérite de clarifier les critères permettant à un dirigeant de demander sa faillite personnelle, elle laisse à notre sens encore trop de pouvoir d’appréciation aux juges qui, selon les arrondissements judiciaires, rendent toujours des décisions différentes. Certains magistrats estiment en effet que le simple fait, pour un dirigeant, d’avoir un PC portable, un smartphone et un bic est suffisant pour être assimilé à une entreprise. D’autres considèrent que le simple d’être affilié à une caisse sociale pour indépendants et de payer des cotisations sociales est suffisant pour être assimilé à une entreprise. D’autres magistrats sont toutefois beaucoup plus exigeants…

Malheureusement, la loi du 7 juin 2023 transposant la directive européenne n° 2019/1023 en matière d’insolvabilité n’a apporté aucune précision à ce sujet.

La situation critiquable dans laquelle nous nous trouvions avant cet arrêt subsiste toujours aujourd’hui. Il vaut donc mieux faire faillite dans certains arrondissements judiciaires plutôt que dans d’autres.

C’est donc pour cela qu’une intervention législative explicite, mettant définitivement fin aux décisions divergentes des cours et tribunaux, nous semble plus que nécessaire.

Nous restons à votre entière disposition si vous ou votre entreprise rencontrez des difficultés et si vous vous posez des questions sur l’opportunité de faire aveu de faillite.

Pour le Cabinet,

Julien BUY – Avocat en droit des affaires

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