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​Il faut réenchanter ce pays.

Le sens premier d’un pays, c’est le patriotisme, non pas dans son acception militaire, mais dans celle d’un projet de société. Et un projet de société ne se construit pas dans la fracture politique ou citoyenne, mais dans la résonance commune et l’intelligence collective.

En Belgique, c’est un vœu pieux puisque le Royaume est artificiel, regroupant des populations linguistiquement et culturellement hétérogènes, n’ayant pu trouver que sa complexité intérieure pour se forger une identité.

Pour exister sans devoir tirer la synthèse de ses contradictions, la Belgique s’est placée dans l’impossibilité de se renouveler. Le pays s’est volontairement complexifié de l’intérieur, puisqu’aucune barrière, de nature géographique ou géologique, ne lui permet de se singulariser.

On avancera que la prise de décision politique est presque impossible en raison d’une représentation proportionnelle qui exige des compromis. Mais c’est peut-être aussi l’un des secrets du pays : la complexité institutionnelle assure, au prix d’une inefficacité incontestable et d’une gestion sous-optimale alourdie par le poids de l’administration, l’obligation permanente de consensus. Et c’est ainsi que les réformes sont rares et toujours marginales.

L’article 36 de la Constitution, qui stipule que le pouvoir législatif fédéral s’exerce collectivement par le Roi, la Chambre des représentants et le Sénat, s’applique dans la forme, mais pas dans le fond. Je crois d’ailleurs que le véritable moteur du pays est sa concertation sociale, qui régit les rapports de force entre les syndicats et le patronat. Le groupe des 10 est le mur mitoyen de la solidarité. Qu’il est d’ailleurs frappant de constater que les véritables dirigeants du pays ne découlent pas de la Constitution, puisque ce groupe des 10 et les présidents de partis en sont les véritables patrons exécutifs.

Au-delà du sentiment permanent que le brouhaha collectif étouffe l’action décisive, la Belgique reste d’ailleurs un État social de qualité et de liberté qui assure l’égalité des chances dans un contexte de solidarité. Et c’est peut-être là que se situe la merveille de sa réussite : son apparent manque d’ambition et sa cacophonie politique camouflent le souhait d’apaisement social et de tempérance économique que les pères fondateurs du royaume avaient finement anticipé.

C’est pour cette raison qu’il faut que nos gouvernements formulent un projet de société, plutôt que d’entretenir une profonde intranquillité et de marteler des objectifs budgétaires, d’ailleurs dérisoires à l’aune du grand tour.

Il faut parler à la population, écouter ses plus vulnérables, comprendre que 140 000 manifestants, ce sont autant de voix qui comptent, et que c’est plus que les adhérents des partis qui ont élu leurs présidents en escamotant la démocratie parlementaire.

Un pays, ce n’est pas un outil de marketing ni des réseaux sociaux. Ce sont des millions de vies et d’avenirs qui doivent s’éclairer.

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