
Le premier acte de cette tragico-comédie sera social. Dans quelques semaines, nous allons assister à un déplacement forcé de dizaines de milliers d'âmes errantes. Chômeurs, malades de longue durée : on va transvaser ces cohortes d’une case Excel à une autre, vers des statuts aux contours aussi flous qu’une peinture impressionniste vue par un myope. Les présidents de CPAS et les mutuelles sont en hyperventilation : ils savent qu'ils ne sont pas prêts. Les bourgmestres, eux, commandent des barrières Nadar, non pas pour des festivals, mais pour contenir la détresse devant les guichets. Car c'est là que réside l'hypocrisie suprême : on demande à des naufragés, souvent en décrochage complet, de devenir des champions de la navigation bureaucratique. Croire qu’on transforme un exclu en travailleur par un tour de passe-passe administratif est une chimère : les entreprises n'embauchent pas par charité, et l'être humain n'est pas une marchandise fongible qu'on déplace d'un stock à l'autre.
Vient ensuite le bricolage de l’indexation salariale. C’est le grand flou artistique. Personne ne possède la même calculatrice, et chaque secrétariat social y va de sa prophétie. On s'apprête à voir fleurir des packages salariaux dignes de l'art abstrait, où le salaire net tentera de survivre au milieu de tombereaux de perplexité comptable.
Le clou du spectacle reste, évidemment, la fiscalité. Avec la taxation des plus-values qui vient s'empiler sur le doublement de la taxe sur les comptes-titres, le gouvernement réussit l'exploit de punir le risque au moment précis où le pays a besoin d'oxygène. C’est du génie… à l’envers. Le plus effrayant ? Le néant juridique. Aucune loi ficelée, aucune circulaire, juste un vide sidéral. On navigue à vue, sans boussole, dans un brouillard législatif à couper au couteau.
L’année 2026 ne sera pas celle de la réforme, mais celle de la confusion générale. À force de vouloir confondre vitesse et précipitation, la chaudière siffle.
On nous avait promis un gouvernement d'ingénieurs pour rationaliser le pays. Ironie du sort : devant ce chaos, ils vont devoir se reconvertir en urgence en poètes d’improvisation pour tenter de rimer avec le surréalisme.