Après de longues négociations, la Belgique et les Pays-Bas ont signé une toute nouvelle convention préventive de double imposition le 21 juin dernier.
Elle vise à simplifier certains éléments de l’ancienne convention fiscale, parfois avec succès.
Après lecture de cette nouvelle convention, on peut relever six différences majeures, dont on espère une explication plus approfondie par la Belgique et les Pays-Bas.
L’article 10 de la nouvelle convention prévoit, en application de la directive mère-fille, que dès lors qu’une société « dont le capital est entièrement ou partiellement divisé en actions, qui est un résident de l’autre Etat contractant et qui détient directement au moins 10 pour cent du capital de la société qui paie les dividendes tout au long d’une période de 365 jours incluant le jour du paiement du dividende » reçoit un dividende d’une société résidente de l’autre état contractant, le dividende est exonéré dans l’Etat de résidence de la société bénéficiaire du dividende et taxé dans l’Etat de résidence de la société qui verse le dividende.
Le dividende versé par une filiale à sa mère est donc exonéré dans le pays de résidence de la mère et taxé dans le pays de résidence de la filiale, pour autant bien entendu que les conditions du régime RDT européen soient réunies. A défaut, le dividende sera également taxé dans l’Etat de résidence de la mère, avec un plafond établi à 15%.
La convention actuelle ne permettait pas encore une exonération totale dans l’Etat de résidence de la mère, de sorte qu’un impôt limité à 5% pouvait être prélevé.
Jusque-là, rien de bien surprenant, puisqu’il s’agit de l’application des normes européennes.
Les Pays-Bas ne peuvent plus prélever 10% d’impôt sur les intérêts payés par un emprunteur néerlandais à un créancier belge, contrairement à ce que prévoit la convention actuelle.
Actuellement, la convention peut être invoquée par les contribuables belges/néerlandais pour tout type d’impôt direct (impôt sur les revenus, impôt sur le capital, impôt sur la fortune, etc.).
Toutefois, la nouvelle convention limite son champ d’application à l’impôt sur le revenu.
Cela a une conséquence imprévue sur la taxe annuelle sur les comptes-titres.
En effet, la TACT est rangée, au sens des conventions fiscales, dans la catégorie des « impôts sur la fortune ». Or, la convention actuellement en vigueur prévoit que seul l’Etat de résidence du contribuable peut prélever ce type d’impôt.
Cela signifie qu’aujourd’hui, un résident néerlandais possédant un compte-titres en Belgique échappe à la TACT en invoquant la convention fiscale, puisque seule les Pays-Bas sont autorisés à prélever un impôt sur sa fortune.
Malheureusement, à l’avenir, cette opportunité ne sera plus accessible. En effet, l’impôt sur la fortune n’étant plus inclus dans le cadre de la nouvelle convention, le contribuable néerlandais ne pourra plus se prévaloir de celle-ci afin d’éviter l’application de la TACT. Il devrait logiquement délocaliser celui-ci…
Il est précisé dans le protocole additionnel (paragraphe 12) que « Les revenus et avantages tirés d’investissements collectifs via des fonds fermés en compte commun (CFC fermés) (« besloten fondsen voor gemene rekening » (besloten FGR’s)) ou via des fonds communs de placement (FCP) (« gemeenschappelijke beleggingsfondsen » (GBF’s)) établis dans l’un des États contractants ainsi que des fonds à compartiments établis dans l’un des États contractants et composés de plusieurs CFC fermés ou FCP sont alloués aux participants investissant par l’intermédiaire de CFC fermés ou FCP au prorata de l’importance de leur participation dans le fonds ».
Le fonds peut revendiquer le bénéfice de la convention lui-même en faveur de ses participants.
Un régime spécifique est prévu pour les travailleurs néerlandais qui perçoivent leur salaire en Belgique.
En effet, dans certains cas, le pouvoir d’imposition est attribué à la Belgique en vertu de la convention (article 23 de la convention).
Ces travailleurs sont habitants des Pays-Bas, ce qui implique qu’ils paient des cotisations de sécurité sociale aux Pays-Bas (Chapitre 2 de la « Wet financiering sociale verzekeringen »).
Etant taxés en Belgique, leurs salaires sont soumis aux taux progressifs par tranches belges.
Un comparatif est dès lors fait entre d’une part, la somme de l’impôt belge, de l’impôt néerlandais et des cotisations de sécurité sociale néerlandaises et/ou des primes de cotisations sociales belges éventuellement dues et, d’autre part, la somme de l’impôt néerlandais et des primes de cotisations de sécurité sociale néerlandaises. Dès lors que la première somme obtenue est supérieure à la deuxième, une réduction d’impôt sera accordée au contribuable néerlandais.
Il s’agit donc de comparer la situation de ce contribuable entre ce qu’il aurait dû supporter s’il avait travaillé aux Pays-Bas et ce qu’il doit supporter en raison du fait qu’il exerce son activité en Belgique, et de compenser le surcoût que lui occasionne l’exercice de son travail en Belgique.
En vertu du droit interne néerlandais, les plus-values latentes des actifs d’un contribuable néerlandais précédant son déménagement en Belgique sont imposables. C’est le cas par exemple pour les plus-values sur actions.
Dans ce cas, la Belgique n’est pas autorisée à réimposer ce montant ultérieurement (article 13, paragraphe 5).
Le même principe est prévu pour la retenue à la source effectuée sur les dividendes (article 10, paragraphe 9) ou les intérêts (article 11, paragraphe 7) : lorsqu’une société néerlandaise paie des dividendes ou des intérêts à un résident belge personne physique, le droit interne néerlandais permet aux Pays-Bas de retenir à la source un précompte sur ces sommes. Heureusement, ce n’est le cas qu’à partir du moment où le résident belge était avant résident néerlandais. Il faut donc une émigration d’un résident néerlandais vers la Belgique.
La nouvelle Convention prévoit que ces dividendes ou intérêts ne sont taxables que pendant dix ans (l’année du versement étant exclue du calcul des dix ans). En d’autres termes, les Pays-Bas pourront opérer une retenue à la source sur un dividende ou un intérêt payé par une société résidente néerlandaise à un résident néerlandais, et ce encore dix ans suivant l’année du déménagement de ce résident néerlandais en Belgique.
Cette règle concerne les administrateurs et les actionnaires, lesquels devront prendre toutes les précautions nécessaires à garder la preuve de la date de leur déménagement en Belgique.
Malheureusement, l’article sur les pensions n’a pas changé, si ce n’est qu’il devient l’article 16 (ancien article 18).
En outre, aucune solution n’est proposée pour les travailleurs transfrontaliers qui pratiquent le télétravail, contrairement à ce qui est prévu dans la convention belgo-luxembourgeoise.
A l’heure actuelle, le texte n’est pas encore en vigueur, puisqu’il faut l’approbation des parlements belges et des Chambres haute et basse néerlandaises avant que le texte soit officiellement applicable.
La date d’entrée en vigueur n’est à ce jour pas encore fixée, mais l’on devine que cela risque de prendre beaucoup de temps, vu les nombreuses habilitations parlementaires requises.