L'accroissement des inégalités n'est pas un problème en Belgique

Il serait plus judicieux de se concentrer sur la pauvreté plutôt que sur les inégalités de richesses qui se sont considérablement réduites au cours de la dernière décennie.

Dans certains milieux, on a longtemps entretenu l'image alarmiste d'une augmentation spectaculaire des inégalités qui serait à l'origine de toutes sortes de problèmes dans notre société. Dans une interview récente, le psychologue Paul Verhaeghe a même affirmé: "Tout ce que nous vivons aujourd'hui est le résultat d'une inégalité socio-économique qui s'est fortement accrue".

Certains partis politiques ont aussi adopté ce point de vue. Pourtant, les chiffres n'attestent que très peu de cette forte augmentation des inégalités, bien au contraire.

En termes d'inégalité des revenus, la Belgique figure depuis longtemps parmi les cinq premiers pays industrialisés où l'inégalité est la plus faible. En outre, ces inégalités de revenus sont stables, voire en légère diminution, depuis des années.

En ce qui concerne la répartition des richesses, les récits catastrophistes ne tiennent pas non plus la route. Selon les nouveaux chiffres de la Banque centrale européenne, l'inégalité des richesses est à première vue élevée: les 10% les plus riches détiennent 55% de la richesse totale. Pour autant, ce chiffre est inférieur à la moyenne européenne. En outre, l'inégalité des richesses s'est considérablement réduite au cours de la dernière décennie.

Impôts sur le capital et droits de succession

Les histoires sombres qui entourent la forte augmentation des inégalités sont généralement utilisées pour "étayer" les plaidoyers en faveur d'une augmentation des impôts sur le capital et d'une plus grande redistribution. Mais la Belgique a également pris parti sur cette question depuis un bon moment. Aujourd'hui, selon les estimations de la Commission européenne, la Belgique se classe déjà au second rang européen pour ce qui est de la charge fiscale effective sur le capital.

En ce qui concerne les droits de succession, que d'aucuns présentent comme le principal moyen de réduire l'inégalité des richesses, la Belgique, avec la France, a déjà les recettes les plus élevées d'Europe aujourd'hui.

L'impôt sur la fortune a déjà été expérimenté dans un certain nombre de pays européens, mais a été aboli depuis longtemps dans la plupart d'entre eux. Selon une analyse récente du Bureau fédéral du plan, les pays qui ont essayé un tel impôt sur la fortune en ont tiré un revenu moyen de 0,18% du PIB. Au niveau belge, cela correspondrait à un milliard d'euros. En comparaison, le PTB réclame aujourd'hui une taxe sur les millionnaires qui rapporterait au moins huit milliards d'euros.

Se concentrer sur la pauvreté

Il est incontestable qu'une trop grande inégalité est préjudiciable à l'économie. D'un autre côté, trop d'égalité constitue également un problème. En réalité, on ne sait pas exactement où se situe le niveau optimal d'inégalité, mais par rapport à d'autres pays, la Belgique se situe déjà clairement du côté de ceux qui connaissent le moins d'inégalités.

Une inégalité trop élevée et croissante ne constitue pas à proprement parler un problème en Belgique. Il serait plus judicieux de se concentrer sur la pauvreté, plutôt que sur l'inégalité. Plus de deux millions de Belges sont aujourd'hui menacés de pauvreté ou d'exclusion sociale. Ce chiffre pourrait certainement être plus bas et nécessite, entre autres, un meilleur fonctionnement du marché du travail, une meilleure éducation et surtout une redistribution qui se concentre davantage sur ceux qui en ont réellement besoin. Nous ferions mieux de travailler à cela plutôt que de chercher à inventer encore de nouveaux symboles fiscaux inefficaces.

Cette chronique est également publiée dans LEcho.

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