​L’air du monde est instable !

Le prophétique Malraux, que de Gaulle qualifiait de moralisateur de l’événement, disait que l’histoire comptait plus que la vie.

L’histoire n’a pas de début, car chaque rupture ou période morne trouve son origine dans un événement qui en a précédé un autre, et ainsi de suite. C’est ainsi que l’homme s’est dispersé, au cours de dizaines de milliers d’années, au gré de sa recherche de survie et des événements de tous types. Le cœur du monde s’est tant de fois déplacé : de Mésopotamie vers la Grèce et Rome, tandis que d’autres régions lointaines, tant en Chine qu’en Amérique centrale et du Sud, développaient des civilisations avancées, parfois englouties.

Aujourd’hui, nous faisons face à un sujet obscur, qui est ce sentiment, pourtant séculairement transporté, de l’imminence de conflits dont nous avions oublié les essences.

Tout s’enlace. Après avoir été l’URSS, la Russie veut retrouver ses vassaux, eux-mêmes issus des accords de Yalta et de Potsdam, après un conflit, auquel elle espérait pourtant échapper par un pacte, dont l’origine est probablement à trouver dans les tristes passions d’un peuple allemand épuisé par ses propres troubles politiques et les contraintes d’un traité de 1919, conclu au terme d’une guerre qu’elle avait certes déclarée suite à des jeux d’alliances liés à la lente désintégration de l’empire austro-hongrois. La guerre ukrainienne a donc plus d’un siècle.

Et que penser des États-Unis, au-delà qu’ils furent, par deux fois, mais à reculons, les sauveurs de l’Europe occidentale. Avons-nous oublié que ce pays-continent est fondé sur l’amnésie de l’origine de ses ressortissants dans cet immense « melting pot » qui conduit chaque Américain à consacrer George Washington comme l’ancêtre commun dans le mépris des pays dont il est originaire ? Car les États-Unis ne furent pas uniquement peuplés par des aventuriers, mais aussi par les damnés et les oppressés d’autres terres. Faut-il s’étonner de leur isolationnisme désormais embrasé par les excès d’un système économique qui repousse, chaque jour un peu plus, les limites de la vulnérabilité, dans ce qu’ils croient être l’aboutissement sociétal ?

Et pouvons-nous dissocier les multiples revendications de populations immigrées, parfois grisées par des folies religieuses, alors que la décolonisation, teintée d’évangélisation forcée, ne reflua qu’il y a une soixantaine d’années, avec toutes les guerres qu’elle sema ?

Il est impossible de tirer la moindre synthèse de cette histoire qui entretient ses fluences. Il n’y a pas de point de départ ni d’aboutissement. Il est trop tôt et trop tard pour tout. Il devient trop tard pour notre environnement, car nous sommes mûs par une insatiable rage de destruction qui nous pousse à exterminer les autres et la nature.

Alors que faire ? Probablement être un révolutionnaire pacifiste, comme Jaurès. Il fut assassiné en juillet 1914 par un nationaliste français qui fut acquitté. Car l'histoire n'a pas de tribunal.

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