De plus en plus de voix s'élèvent pour lutter contre les montages abusifs et la fraude fiscale au moyen de dispositifs de "name and shame". Prenons quelques dossiers qui ont défrayé la chronique au cours des derniers jours.
Cette affaire bien connue met en scène des héritiers et des chefs d'entreprises français et belges, qui ont caché au fisc des dizaines de millions d'euros à la faveur de montages agressifs/frauduleux reposant sur l'utilisation d'entités offshore.
En France, le Parquet national financier (PNF) a ouvert une enquête pour blanchiment aggravé de fraude fiscale. Plusieurs contribuables ont reconnu les faits de #blanchiment ou de blanchiment aggravé de fraude fiscale, et ont pu s'en sortir avec une peine de prison avec sursis et des amendes... mais pas un médecin parisien. Le tribunal correctionnel a ainsi refusé de valider la peine négociée avec le PNF, regrettant l’absence de peine complémentaire, telle que la publication dans la presse de la décision, de nature à permettre « un renforcement de la lutte contre la fraude fiscale »! (voir infra article paru il y a quelques jours dans Le Monde).
Comme l'a révélé la presse étrangère (notamment le Financial Times - voir aussi le lien infra), un big4 a partagé et utilisé des informations confidentielles obtenues dans le cadre d'une mission pour le gouvernement australien, en vue de conseiller des clients (notamment des sociétés US dans le secteur de la tech) à propos de nouvelles mesures anti-abus. Il a fait intervenir à cette fin des fiscalistes étrangers de son réseau (Singapour, US, Irlande, les Pays-Bas,...).
L'affaire commence à prendre de sérieuses proportions. Des sénateurs australiens insistent pour que soient dévoilés les noms des partners impliqués, ainsi que ceux des clients (!) qui ont reçu les informations. La pression monte. Le quotien britannique titre à ce sujet aujourd'hui : "PwC failing to name all 53 partners in tax leak scandal amount to 'coverup'".
Il faut veiller à conserver un juste équilibre entre les intérêts individuels et publics. Je me bornerai ici à relever un arrêt tout récent du 9 mars 2023 de la grande chambre de la CEDH, qui a estimé que la publication automatique d'informations personnelles concernant des contribuables redevables d'arriérés d'impôts portait une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée.
Oui à la transparence... mais certainement pas à tout prix. On peut se réjouir qu'il y ait des garde-fous...