Confronté à une demande d’indemnisation de la société de leasing, le travailleur devrait pouvoir botter en touche d’abord en disant qu’il ne répondra qu’à son employeur. Et ensuite, en refusant de prendre en charge les dommages pour un accident professionnel quand les conditions ne sont pas remplies.
Vu les conditions météos de la semaine dernière et de cette semaine, nombreux sont ceux qui auront glissé sur la neige et le verglas et abîmé leur précieux véhicule de société.
À la question de savoir s’ils doivent prendre en charge ces dégâts (au plan civil), on peut d’abord répondre que juridiquement la loi distingue selon que l’accident a lieu dans le cadre de l’utilisation privée du véhicule ou de son utilisation professionnelle.
En pratique, à moins que le travailleur n’ait commis des manœuvres frauduleuses, roulé en état d’ivresse ou de manière particulièrement dangereuse ou encore commis de manière répétée des erreurs de conduite ou des manquements aux règles du code de la route – et que l’employeur puisse le prouver – le travailleur est protégé contre toute indemnisation pour un accident "professionnel".
Problème, la plupart des "car policies" prévoient que l’employé soit d’office responsable des dégâts au bout d’un certain nombre d’accidents pris en charge (généralement deux ou trois). Avec pour résultat que la facture lui soit envoyée pour le montant total des dégâts ou en tout cas le montant de la franchise.
Et il faut reconnaître que les "leasers" sont particulièrement efficaces à ce petit jeu et facturent directement les travailleurs sans coup férir et sans état d’âmes.
Et surtout, pour les grandes flottes de véhicules, sans aucune intervention de l’employeur trop heureux de confier la gestion des accidents à la société de leasing, si ce n’est, évidemment, pour imposer une retenue sur le salaire du travailleur…
Premier souci avec ce genre de pratique, selon l’article 6 de la LCT, toute disposition contractuelle qui a pour effet d’aggraver les obligations de l’employé – par exemple en lui demandant de payer pour un accident professionnel sans dol, sans faute lourde ou sans faute légère occasionnelle — en violation des dispositions de la LCT – ici de la limite de responsabilité de l’article 18 — est nulle. Ce qui en pratique scelle le sort de telles règles.
Second problème, l’employeur ne peut effectuer de retenue sur le salaire que dans des cas bien précis et pour les dédommagements, n’autorise une telle retenue que dans les limites de l’article 18. Ce qui exclut toute retenue pour un accident de la vie privée ou pour un accident professionnel sans dol, sans faute lourde ou sans faute légère occasionnelle.
Plus fondamentalement, on regrettera de voir que les sociétés de leasing se permettent tout en réclamant impunément et sans que l’employeur n’y prête la moindre attention le moindre euro au travailleur.
D’autant que les méthodes de valorisation des dommages par ces sociétés aboutissent le plus souvent à des montants particulièrement élevés. Ces sociétés en tireraient des revenus supplémentaires bien confortables que l’on n’en serait pas surpris…
Or c’est oublier un peu vite que le contrat de leasing c’est la société employeuse qui le contracte et qu’il n’existe en soi aucune relation contractuelle entre le "leaser" et le travailleur.
Le seul qui peut s’adresser au travailleur est donc son employeur.
Confronté à une demande d’indemnisation du "leaser", le travailleur devrait pouvoir botter en touche en disant d’abord qu’il ne répondra qu’à son employeur. Et ensuite, en invoquant la limitation de responsabilité fixée par la loi et en refusant de prendre en charge les dommages pour un accident professionnel quand les conditions ne sont pas remplies.
Enfin, évidemment, ça c’est lorsque le travailleur ne craint pas qu’une telle opposition menace son emploi…