L’immigration de sociétés en Belgique, une opération en vogue

L’immigration de sociétés étrangères en Belgique est une opération en vogue, comme en attestent les nombreuses décisions anticipées rendues en la matière. L’objectif d’un transfert de siège d’une société étrangère vers la Belgique consiste souvent à faire coïncider le lieu de résidence des administrateurs et des actionnaires (la Belgique) avec le centre de management et de contrôle ainsi que le lieu de direction effective de la société. Autrement dit, il s’agit de rapprocher géographiquement la société du lieu de résidence des administrateurs et des actionnaires belges.


Transfert vers la Belgique

Voici une société holding familiale luxembourgeoise détenue par des particuliers résidant en Belgique. Les filiales opérationnelles de la holding déploient leurs activités principalement en Belgique. Le transfert de siège de la société luxembourgeoise vers la Belgique permettra de faciliter la gestion de la société holding, de centraliser les intérêts patrimoniaux des actionnaires en Belgique et d’améliorer le cas échéant les synergies entre la holding et ses filiales belges. Cerise sur le gâteau : la sacro-sainte « substance » de la société holding en sortira renforcée, au grand bonheur des fiscalistes du groupe.



Continuités juridique et comptable

Pareil transfert de siège peut en principe s’opérer en continuité juridique : la société constituée sous l’empire du droit étranger (le Luxembourg) qui transfère son siège social en Belgique conserve sa personnalité juridique et est alors gouvernée par le droit belge après le transfert. Le principe de continuité comptable jouera en règle générale également, c’est-à-dire que la comptabilité pourra être transférée comme telle en Belgique. Il n’y aura donc pas de modification de la situation patrimoniale de la société, et ses actifs seront tout simplement transférés dans la comptabilité belge à la valeur pour laquelle ils figuraient dans les comptes de la société étrangère au moment du transfert.



Discontinuité fiscale

Sur le plan fiscal, le transfert de siège sera toutefois réalisé en discontinuité. Celui-ci sera généralement assimilé à une « liquidation » dans l’Etat de départ pour des besoins fiscaux. Il s’ensuit que les plus-values latentes sur les actifs seront en principe soumises à l’impôt des sociétés; c’est ce qu’on appelle dans le jargon « l’exit tax ».


Si l’«exit tax» peut être douloureux en cas de transfert de siège d’une société opérationnelle (taxation des plus-values latentes sur le goodwill, les marques, les brevets, le know how,…), il ne devrait généralement pas impacter les sociétés holdings.



Bénéfice de la directive mère-filiale : le step up

Ainsi, en cas d’immigration d’une holding luxembourgeoise en Belgique, les plus-values latentes sur actions (censées être réalisées lors du transfert) seront généralement exonérées sur le fondement du privilège mère-filiale luxembourgeois.


Lors de son arrivée en Belgique, la société pourra en principe réévaluer ses actifs à leur valeur réelle pour déterminer les plus-values taxables ultérieures. Le transfert de siège est, on le voit, susceptible de conduire à une asymétrie remarquable entre le bilan comptable (continuité) et le bilan fiscal ( réévaluation des actifs à valeur réelle, également dénommée « step up »)) !

Ce « step up » , qui s’applique aux transferts de siège postérieurs au 1er janvier 2019, a été instauré à la faveur de la loi de réforme de l’impôt des sociétés du 25 décembre 2017 (transposition en droit belge de la directive contre l’évasion fiscale). Il présente l’avantage d’éviter la double imposition des plus-values latentes : une première fois dans l’Etat de départ au moment du transfert de siège (« exit tax »), et une seconde fois dans l’Etat d’arrivée lors de la réalisation des actifs.


Setp up : une réponse pour les holdings familiales belges

Le « step up » fera le bonheur des holdings détenant des participations non éligibles au régime belge d’exonération des plus-values sur actions. Soit en raison du non-respect de la nouvelle condition de participation minimale. Exemple : une holding détenant des actions de sociétés cotées ou des participations minoritaires dans des sociétés non cotées, représentant moins de 10% du capital et ayant une valeur d’acquisition inférieure à 2,5 millions. Soit en cas de non-respect de la condition de taxation. Exemple : une holding détenant des actions dans des sociétés établies dans des « paradis fiscaux » (Gibraltar, Dubaï, Liechtenstein, Monaco, …) ou dans certaines SICAV.

Mots clés

Articles recommandés

Abus fiscal ou comment se faire "rattraper par la patrouille"...

Taxe caïman 2.1. Quelle est la validité de l’exit-tax ?

Transformer votre branche en actions