L’origine étrangère : un frein à l’emploi à Bruxelles

La première étude scientifique sur l’origine des chercheurs d’emploi bruxellois démontre qu’il est plus difficile de trouver un emploi quand on est d’origine étrangère, même avec des qualifications.


Pour la 1ère fois, la Région bruxelloise dispose d’un monitoring de la diversité centré sur les chercheurs d’emploi. À la demande de Didier Gosuin, ministre bruxellois de l’Economie, de l’Emploi et de la formation professionnelle, view.brussels, l’observatoire bruxellois de l’emploi et de la formation, a réalisé une étude inédite qui intègre la variable de l’origine dans toutes ses analyses.


Dans cette étude, intitulée « Profil et trajectoire des chercheuses et chercheurs d’emploi en Région de Bruxelles-Capitale. Monitoring selon l’origine nationale » l’origine est à chaque fois prise en compte. Cette dimension est croisée avec d’autres données comme le genre, le degré de formation ou encore le lieu de résidence.Afin de vous présenter les constats frappants de cette étude, vous êtes invité ce jeudi à 4 juillet 12h au Boulevard Saint-Lazare 10, au rez-de-chaussée. Merci de confirmer votre présence au plus tard le mercredi 3 juillet avant 15h.


5 constats interpellants
1. Les inégalités à l’emploi sur base de l’origine présentent une dimension massive et structurelle.
  • Les populations d’origine non-UE subissent un phénomène aigu de sur-chômage et de sous-emploi. Par exemple, le taux de chômage des personnes d’origine maghrébines et des afro-descendants est 3 à 4 fois plus élevé que celui des belgo-belges.
  • Les jeunes d’origine subsaharienne ont le plus de difficultés à trouver un travail. Ils sont les plus nombreux à ne pas avoir d’emploi 36 mois après leur inscription chez Actiris, malgré leur présence plus importante dans les formations.


Taux de chômage en RBC selon l’origine et le genre (4ème trimestre 2015)



Le temps passé au travail en 3 ans change significativement selon les origines.



2. Diplôme égal en poche, les personnes d’origine extra-européenne ont plus de difficultés à trouver un emploi.

A niveau d’études équivalent, elles présentent des taux d’insertion à l’emploi moins élevés que les belgo-belges.


3 ans après leur inscription, quel pourcentage de jeunes à l’emploi?



3. La non-reconnaissance des diplômes étrangers touche davantage les personnes d’origine subsaharienne


Quel pourcentage de jeunes diplômés de l’étranger mettent plus de 2 ans à décrocher un emploi long (>3 mois)?




4. Les femmes d’origine non-UE sont plus vulnérables

Elles sont confrontées à une triple vulnérabilité. Elles ont une probabilité plus grande :

  • d’être au chômage
  • d’être sans revenu de remplacement (allocation de chômage) lorsqu’elles sont sans emploi
  • une fois à l’emploi, d’être confinées dans des métiers faiblement rémunérateurs, peu gratifiants, exigeants physiquement (horeca, soins, nettoyage)


Le sous-emploi est plus marqué chez les jeunes femmes d’origine maghrébine et turque. Pourtant elles sont en moyenne plus diplômées que leurs homologues masculins. Cela peut s’expliquer par des freins à l’emploi. Le port du foulard notamment qui génère des discriminations spécifiques.


Le fait qu’elles sont plus souvent à la tête d’une famille monoparentale pèse sur leurs chances de trouver un travail.



5. Il y a des liens forts entre habitat, origine et chômage

Il y a 2 corrélations importantes :

  • L’une entre les variables de territoire et d’origine : Les chercheurs d’emploi d’origine turque, maghrébine, subsaharienne et de l’UE de l’Est résident plus souvent dans le croissant pauvre de Bruxelles que leurs homologues d’origine belge
  • L’autre entre le quartier de résidence et la probabilité d’accéder à l’emploi. L’intensité d’emploi des jeunes est systématiquement plus faible dans le croissant pauvre qu’ailleurs en Région bruxelloise


Pistes de recommandation
  • Systématiser l’usage de la variable origine dans les statistiques du chômage et l’inscrire dans une perspective évolutive.
  • Développer une approche qualitative d’analyse des discriminations sur base ethnique et raciale.
  • Accroître la représentativité au sein des institutions publiques.
  • Accroître l’impact des outils existants de lutte contre les discriminations à l’emploi et de promotion de la diversité.
  • Renforcer les actions de lutte contre les discriminations et de promotion de la diversité mises en œuvre au niveau des accords-cadres sectoriels.
  • Renforcer le dispositif de contrôle en permettant de réaliser des testings de manière plus proactive.
  • Reconnaître les qualifications des personnes diplômées à l’étranger à travers la simplification et la gratuité de l’équivalence des diplômes d’une part et le recours plus fréquent à la validation des compétences d’autre part.
  • Au niveau interfédéral, élaborer un plan ambitieux et contraignant en matière de lutte contre le racisme et évaluer la stratégie d’intégration des Roms.


Un mot sur la méthodologie

  • Construction de la variable « origine »


La définition de l’origine est identique à celle du Monitoring socio-économique produit par le SPF Emploi et Unia. Sont considérés comme d’origine étrangère ceux qui:

· avaient une nationalité étrangère à leur naissance

· avaient une nationalité étrangère au moment de l’étude

· ou ceux dont au moins 1 des parents a la nationalité étrangère.


  • Composition des cohortes de chercheurs d’emploi


Les analyses ont été effectuées sur des chercheurs d’emplois inscrits entre 2013 et 2016. Le but étant de pouvoir analyser leur parcours endéans les 3 ans.


Sources : Actiris et BCSS, calculs view.brussels


Didier Gosuin, ministre bruxellois de l’Economie, de l’Emploi et de la Formation professionnelle : « À Bruxelles, nous faisons face à un réel problème de discrimination à l’embauche. C’est pourquoi, en 2016, j’ai doté la Région d’un Plan de Lutte Contre la Discrimination en 10 mesures, parmi lesquelles se trouvait la réalisation d’un monitoring de la diversité. Aujourd’hui, cette étude nous permet de poser le débat des inégalités ethnique et raciale sur le marché de l’emploi, mais surtout d’émettre des pistes de recommandations concrètes pour œuvrer à un accès égalitaire à l’emploi pour tous les Bruxellois ».


Grégor Chapelle, directeur général d’Actiris : « A Bruxelles, les trois quarts de la population sont d’origine étrangère. Ce monitoring démontre que les inégalités à l’emploi sur base de l’origine présentent une dimension massive et structurelle. Il est temps d’agir radicalement : les discriminations ralentissent notre économie et augmentent le mismatch. Actiris est prêt à relever ce défi : nos conseillers en diversité sont là pour accompagner gratuitement tous les employeurs dans leur évolution vers une entreprise aussi diverse que notre Région ! »


Cathy Van Remoortere, directrice de view.brussels et des services de diversité d’Actiris : « La diversité et l’inclusion sont au coeur de l’histoire qu’Actiris souhaite écrire dans les prochaines années. Comment suivre de près et répondre aux besoins de notre environnement cosmopolite et en constante mutation? Optimiser l’expérience client est fondamental. Le guichet anti-discrimination d’Actiris accompagne les chercheurs d’emploi qui se sentent discriminés à l’embauche et le service diversité soutient les employeurs souhaitant renforcer la diversité sur leur lieu de travail. Les deux services ont été réformés, disposent d’une large expertise et sont prêts pour nos clients ! »


Khadija Senhadji, responsable de l’étude : « Les conclusions de ce rapport sont traversées par une nécessité : celle de mettre un terme aux mécanismes et traitements inégalitaires qui ont cours sur une base ethnique et raciale dans le secteur de l’emploi et dont on connait l’existence depuis plus de deux décennies. Seule une volonté politique forte de s’attaquer à la dimension structurelle de ces discriminations permettra la mise en œuvre de mesures réellement efficaces. »


Source : https://press.actiris.be



Mots clés

Articles recommandés