Depuis quelques temps, l’administration fiscale semble avoir l’attention particulièrement attirée par les propriétaires de plusieurs biens immobiliers et procède à des contrôles et des rectifications qui ont pour base n’ont pas les revenus immobiliers eux-mêmes, mais leur qualification fiscale. L’administration fiscale semble désormais, de manière régulière, considérer que la détention et la gestion, même à titre personnel, de nombreux immeubles, constitue en soi une activité professionnelle.
Il s’en déduit que dans cette hypothèse, les revenus générés par ces immeubles, qu’il s’agisse des loyers ou d’éventuelles plus-values, sont qualifiés par l’administration fiscale de revenus professionnels, et taxés au taux progressif par tranches, ce qui a bien entendu des conséquences fiscales plus que funeste pour leurs propriétaires, lesquels sont taxés sur une base réelle, tout en pouvant revendiquer dans cette hypothèse la déduction au titre de charges professionnelles des amortissements d’immeubles, des intérêts hypothécaires ainsi que des autres travaux frais et charges grevant la location. Mais le fisc s’intéresse plus aux revenus qu’aux charges et se contente souvent de taxer le revenu brut, ce que le contribuable peut bien évidemment contester.
La notion même d’activité professionnelle n’est pas définie dans le code des impôts les revenus. De manière générale, on s’accorde à dire qu’une activité professionnelle est constituée par un ensemble répété d’opérations de même nature, lesquelles, par leur répétition, leur importance, leur volume et leur organisation, confèrent à l’activité un caractère professionnel.
Il va sans dire que, face à une notion si floue, l’analyse du caractère professionnel ou non d’une activité immobilière soutenue diverge notablement selon qu’elle émane des contrôleurs fiscaux ou des contribuables qui considèrent qu’il s’agit de la simple gestion de leur patrimoine privé.
Plusieurs décisions de jurisprudence ont été récemment rendues par divers cours et tribunaux fiscaux du pays sur ce point, avec des résultats variables dans la mesure où l’analyse d’une telle qualification professionnelle ou privée est avant toute une question d’espèce.
Un faisceau d’éléments entre en ligne de compte : le mode d’acquisition des immeubles, leur mode de financement (le recours massif au crédit étend bien entendu un indice négatif), le nombre d’immeubles détenus, le fait que des transformations importantes ont été opérées avant de les mettre en location … , bref un faisceau d’indices qui, pris isolément, sont insuffisants à assurer avec certitude la qualification privée ou professionnelle d’un revenu, mais dont l’analyse globale peut faire pencher la balance de l’un ou l’autre côté.
Par ailleurs, le fait d’exercer à titre principal un métier lié à l’immobilier (entrepreneur, architecte, agent immobilier …) semble particulièrement focaliser l’attention de l’administration, ce qui est en soi très contestable : n’est-il pas normal de gérer intelligemment son patrimoine immobilier en investissant à titre privé dans ce que l’on connaît le mieux ?
En guise de conclusion, il n’est pas douteux que l’admiration fiscale dispose de nettement plus de possibilités de connaître la consistance de votre patrimoine immobilier de manière globale qu’elles ne l’avait auparavant, et qu’elle entend bien utiliser cette information pour analyser en profondeur l’activité immobilière et ses diverses modalités, dans le but avéré de taxer au titre de revenus professionnels, de manière notablement plus lourde qu’elle ne l’a fait historiquement, les revenus des multipropriétaires immobiliers.
Toute activité immobilière soutenue devra être examinée à l’aune de cette nouvelle donne, les propriétaires devant par ailleurs être conscients du fait que l’administration fiscale a des droits certes, mais ne les a pas tous et qu’il est souvent possible de contester avec succès des prises de position très contestables de certains contrôleurs sur ce point.
Thierry Litannie
Avocat spécialisé en droit fiscal (LAWTAX Avocats)