Nouvelle taxation des plus-values et estate planning: l’ombre de l’exit tax en cas de donation à un non-résident
Temps de lecture: 3 min |29 avril 2025 à 04:04
Denis-Emmanuel Philippe
Avocat - Associé @ Bloom Law
Un nouveau projet de loi introduit une taxation spécifique des “plus-values internes” au taux de 33 %, en remplacement de l’ancien régime applicable aux plus-values dites “spéculatives” ou “anormales”. Cette réforme soulève des questions importantes, notamment pour les opérations de transmission d’entreprises familiales impliquant des holdings de reprise détenues par les enfants du cédant.
La nouvelle taxation spécifique des plus-values internes
Le nouvel article 90, alinéa 1er, 9°, a) du CIR prévoit :
L’imposition au titre de revenus divers des plus-values réalisées lors de la cession d’actions, parts ou parts bénéficiaires,
Par un cédant qui exerce, seul ou avec son conjoint, ses descendants, ascendants ou collatéraux jusqu’au deuxième degré, un contrôle direct ou indirect sur le cessionnaire,
Le taux distinct de 33 % est appliqué (article 171, 1°, a) du CIR).
L’objectif poursuivi par le projet de loi
Aujourd’hui, les plus-values spéculatives ou anormales sont déjà taxées à 33 %.
Avec la réforme plus large sur les actifs financiers, toutes les plus-values normales seront taxées à 10 %.
Problème identifié : sans mesure spécifique, certaines plus-values internes pourraient échapper à une taxation lourde.
Solution apportée :
Un régime spécifique pour les plus-values internes, maintenu à 33 %.
Dispense pour l’administration fiscale d’apporter la preuve que la vente relève d’une gestion anormale ou constitue un abus fiscal (art. 344, §1er CIR).
Contrôle du cédant sur la holding de reprise : un critère décisif
La taxe de 33 % s’appliquera si le cédant exerce seul ou ensemble avec des proches un contrôle direct ou indirect (au sens de l’article 1:14 du CSA) sur la holding de reprise.
Conséquence pratique :
Non visée : la vente à une holding contrôlée exclusivement par les enfants du cédant, sans influence du vendeur.
Visée : la vente à une holding où le cédant détient encore un pouvoir de contrôle, même partiel.
Confirmation dans l’exposé des motifs : en cas d’absence de contrôle du cédant, le régime des participations substantielles pourrait éventuellement s’appliquer, mais pas la taxation automatique à 33 %.
Vente d’actions à une holding propre (contrôlée par le cédant) : pas de ruling favorable.
Vente d’actions à une holding détenue par des tiers (y compris enfants, membres de la famille) :
Acceptable, à condition que le cédant n’exerce pas un contrôle juridique ou de fait sur la holding de reprise.
Pour un approfondissement de cette position, voir l’article co-publié avec A. Nollet dans le TFR (2023, n°646).
Conclusion
La nouvelle taxation des plus-values internes à 33 % vise clairement à cadrer les opérations de transmission intra-familiale sous forme de vente à une holding.
Les cédants devront être particulièrement vigilants quant à leur position d’actionnaire et à leur influence sur la structure de reprise, sous peine de voir leur plus-value fortement taxée. Cette réforme confirme aussi la tendance actuelle à renforcer la sécurisation juridique des opérations de transmission, tout en limitant les optimisations fiscales internes.
Mots clés
Service des Décisions AnticipéesDonationPlanification successoraleExit TaxPlus-values sur actionstaxation des plus-valuesPlus-values internesNon-résidentsHoldingPlanification patrimonialeLuxembourg