Pourquoi il ne faut pas taxer les « surprofits » des entreprises énergétiques

La ministre de l’énergie a annoncé, avec grand fracas, qu’elle préparait une taxe de 25 % frappant la marge brute des entreprises du secteur énergétique.

L’idée est de les « sanctionner » lorsqu’elles ont bénéficié de l’augmentation des prix des produits pétroliers et autres, alors que les citoyens supportent, eux, des hausses de prix.

On comprend que ce genre d’annonces est susceptible de bénéficier, sur le plan électoral, au parti de la ministre.

En revanche, cette proposition paraît impossible à appliquer en droit, et constituerait, si elle était néanmoins votée et appliquée, un dangereux précédent.

Elle est à notre avis impossible parce que, portant sur un secteur bien déterminé, elle serait quasi certainement considérée comme discriminatoire. Le législateur a le droit d’augmenter l’impôt des sociétés s’il le veut, mais cela porte alors sur toutes les sociétés, ou sur des sociétés identifiées sur la base d’un critère objectif, au sens de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle.

Cela ne semble pas être le cas s’il s’agit seulement des entreprises d’un « secteur ».

Si le comportement de ces entreprises était délictuel, on pourrait bien sûr établir des amendes, mais alors on ne pourrait le faire rétroactivement ici, il s’agit d’une volonté d’établir un nouvel impôt. Cela n’est pas impossible pour l’exercice en cours, mais si cela devait porter sur l’exercice précédent, il s’agirait aussi d’une mesure rétroactive et, pour l’exercice en cours, le gouvernement se heurtera au problème, évoqué ci-dessus de la discrimination.

On ajoutera quand même qu’il n’y a pas nécessairement lieu de stigmatiser toutes les entreprises d’un secteur, parce qu’elles bénéficient d’une augmentation des prix, dont elles ne sont pas l’origine. Il s’agit d’une espèce « d’effet d’aubaine » qui leur profite, de la même manière qu’en d’autres occasions, l’évolution du marché se révèle défavorable pour elles. Cela fait partie des risques de l’entreprise.

Il serait au contraire dangereux que l’Etat puisse, après coup ou en cours d’exercice, désigner à sa guise des « boucs émissaires » qui seraient spoliés parce qu’ils font de bonnes affaires au cours d’une année déterminée. C’est pour cela qu’une telle taxe, inspirée pour des motifs démagogiques, est peut-être annoncée en sachant qu’elle ne serait pas viable, constituerait un précédent dangereux.

Typhanie AFSCHRIFT, juillet 2022

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