De nombreux Belges détiennent une maison de vacances (non donnée en location) en France via une société civile immobilière française (SCI). Celle-ci dispose généralement de la personnalité juridique mais pas de la personnalité fiscale. Si ce type de société constitue un instrument idéal de planification patrimoniale dans un cadre franco-français, il soulève certaines questions sur la scène internationale.
Focus sur les principales évolutions en matière de SCI dans un contexte franco-belge (entre autres, la récente extension de la taxe Caïman et la prochaine entrée en vigueur du nouveau traité fiscal franco-belge).
Depuis le 1er janvier 2024, la SCI tombe, dans certaines circonstances, sous le coup de la taxe Caïman. Dans ce cas, l’associé de la SCI devra la mentionner dans sa prochaine déclaration fiscale belge comme une “construction juridique”, et ce, sous peine d’amende (6 250 euros par année et par construction juridique non déclarée). Il devra également solliciter un revenu cadastral “à la belge” pour l’immeuble logé dans la SCI et déposer annuellement une annexe spécifique à sa déclaration.
Parmi les autres incidences : le délai de contrôle des autorités fiscales belges passe de 3 à 10 ans ; les associés sont, en cas de déménagement hors de Belgique, redevables d’une exit tax de 30 % sur les bénéfices non distribués par la SCI. À ce stade, il n’est pas exclu que la plus-value latente sur la maison de vacances puisse également être soumise à cette exit tax.
La compatibilité de cette exit tax avec le droit européen (liberté de circulation des capitaux et/ou liberté d’établissement) interroge.
Actuellement, le revenu cadastral “à la belge” de la maison de vacances logée dans une SCI visée par la taxe Caïman, est uniquement pris en compte pour déterminer le taux d’imposition belge des autres revenus de l’associé soumis au taux progressif. La Belgique et la France ont conclu un nouveau traité fiscal franco-belge destiné à remplacer l’actuel traité. Selon les informations en notre possession, il devrait entrer en vigueur au plus tôt le 1er janvier 2026.
Suite à cette entrée en vigueur, l’associé sera redevable d’un impôt belge sur le revenu cadastral “à la belge” de l’immeuble logé dans la SCI. Cette taxation semble toutefois être un “effet indésirable” du nouveau traité. Des discussions entre les autorités belges et françaises sont en cours pour y remédier.
Le traitement fiscal franco-belge de la plus-value réalisée par un particulier résident belge lors de la vente des titres de sa SCI est controversé. Les autorités fiscales françaises prétendent pouvoir imposer cette plus-value. Le Conseil d’État français leur a, en quelque sorte, donné raison. Toutefois, tant la position administrative que l’arrêt du Conseil d’État sont fortement critiquables.
Le nouveau traité fiscal franco-belge mettra fin à ce flou. Il reconnaît à la France le droit d’imposer la plus-value réalisée par un résident belge lors de la vente des titres de sa SCI. Le vendeur sera redevable d’un impôt français de 19%, du prélèvement de solidarité de 7,5% et, dans certains cas, d’une taxe sur les plus-values immobilières élevées susceptibles d’atteindre 6% (soit, un coût total pouvant atteindre jusqu’à 32,5% de la plus-value). Des abattements sont accordés selon la durée de détention du bien.
La donation des titres de SCI prend obligatoirement la forme d’un acte notarié. Tout acte de donation mobilière notarié réalisé par un résident belge doit désormais être enregistré auprès des autorités fiscales belges. En l’absence de mesures préventives de double imposition, la donation des titres de SCI sera ainsi doublement imposée. Si la libéralité est réalisée par un parent en faveur de ses enfants, les autorités fiscales belges prélèveront des droits d’enregistrement de 3% ou 3,3% selon la Région compétente. Quant aux autorités françaises, elles prélèveront des droits de mutation dont le taux est progressif et peut atteindre jusqu’à 45%. La France connaît toutefois un système d’abattements et de décotes susceptible d’offrir des perspectives intéressantes. Il n’est pas exclu que la Belgique puisse prochainement adapter sa législation pour éviter cette double imposition.
Suite à ces nombreuses évolutions, l’associé d’une SCI veillera à faire réaliser, avant sa prochaine déclaration fiscale belge (exercice 2024), un audit de sa situation, et ce, pour déterminer s’il est tenu à des nouvelles obligations fiscales. Il est prudent de profiter de cet examen pour identifier les manières d’anticiper adéquatement, le cas échéant, les modifications apportées par le nouveau traité fiscal franco-belge impactant sa situation. Enfin, il est recommandé d’intégrer sa SCI dans sa planification successorale, et ce, notamment pour profiter pleinement des opportunités fiscales offertes actuellement par le droit français.