Comment la Belgique impose-t-elle les propriétés détenues par ses ressortissants à l’étranger en matière de droits de donation et de succession ?
En matière de droits de succession, c’est en principe le patrimoine mondial détenu par un défunt résident belge qui est imposé en droits de succession en Belgique.
Afin d’éviter des situations de double imposition en matière de droits de succession, la Belgique n’a conclu que deux conventions préventives de double imposition, une avec la France et une avec la Suède.
Indépendamment d’une convention fiscale présente en matière successorale, les trois Régions de notre pays admettent, lorsque l'actif de la succession d'un habitant du Royaume comprend des immeubles situés à l'étranger qui donnent lieu à la perception, au pays de la situation de l’immeuble, d'un impôt successoral, que le droit de succession exigible en Belgique soit réduit à concurrence de l'impôt prélevé par le pays de la situation.
Pratiquement, pour obtenir cette réduction, il faut présenter chez le receveur auprès duquel est déposée la déclaration de succession la quittance dûment datée des droits payés à l'étranger, ainsi qu'une copie, certifiée conforme par les autorités étrangères compétentes, de la déclaration qui leur a été remise et de la liquidation qu'elles ont établie. Si les pièces justificatives ne sont pas déposées avant l'échéance des droits dus en Belgique, ceux-ci peuvent faire l’objet d’une restitution à demander dans les 2 ans de leur paiement.
Cette réduction prévue par le droit interne belge ne vaut que pour l’immobilier étranger détenu (en direct) et non pas pour les actifs mobiliers étrangers qui pourraient faire partie de la succession d’un habitant du Royaume, tels que les actions de sociétés immobilières étrangères par exemple, qui en l’absence d’une convention fiscale, peuvent donc bel et bien faire l’objet d’une double imposition. N’est-ce pas discriminatoire ? La réponse à cette question est positive selon un arrêt rendu ce 3 juin dernier par la Cour constitutionnelle (nr.2021/080) suite à une question préjudicielle posée par la Cour de cassation. En effet, la Cour constitutionnelle estime discriminatoire de ne pas pouvoir réduire les droits de succession dus en Belgique à concurrence des droits de succession payés à l’étranger sur des éventuels actifs mobiliers étrangers.
A voir comment les législateurs régionaux réagiront. Dans l’entretemps, les héritiers subissant une éventuelle double imposition dans un tel cas de figure pourront s’appuyer sur cette jurisprudence en cas de discussion avec l’administration fiscale.
En matière de droits de donation, il convient de distinguer les actifs immobiliers étrangers des actifs mobiliers étrangers détenus par un résident belge.
Si l’Etat de situation de ces biens mobiliers imposait également cette donation, un risque de double imposition se présente donc. La Belgique n’a conclu aucune convention préventive de double imposition en matière de droits de donation et aucun « crédit d’impôt » n’est actuellement prévu en droit interne belge afin de remédier à pareille situation.
Nous ne pouvons donc qu’encourager les législateurs régionaux à aligner le dispositif légal à la jurisprudence rendue par la Cour constitutionnelle en ce qui concerne les droits de succession et par cohérence également en matière de droits de donation.
Alain Van Geel – Associé (alain.vangeel@tiberghien.com)
Emilie Van Goidsenhoven – Associée (emilie.vangoidsenhoven@tiberghien.com)
Eléonore Maertens de Noordhout – Senior Associate (eleonore.maertens@tiberhgien.com)
Source : Tiberghien