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​Taxation des plus-values et départ à l’etranger (exit tax): quand le diable vous dit…!

En vertu des règles de droit fiscal international, les plus-values sur actifs financiers ne sont taxables que dans l’Etat de résidence.

L’avant-projet de loi qui circule ces jours-ci relativement à la taxation des plus-values sur actions contient dès lors une disposition qui assimile à une cession d’actifs financiers à titre onéreux « le transfert de résidence ou du siège de la fortune à l’étranger ». En d’autres termes, celui qui transfère sa résidence fiscale à l’étranger sera donc imposé au moment de son départ – et donc quand il est encore résident belge- sur ses plus-values latentes.

On aura compris que ceux que le texte en projet vise principalement sont les riches rentiers et les actionnaires importants de sociétés cotées ou non cotées qui songeraient à échapper à la taxe sur de futures plus-values en devenant fiscalement résident d'un autre Etat. Sauf que pour ceux-là, le signal de départ est à présent clairement donné car, quand le diable vous dit « Quittez mon enfer (fiscal) avant que je ne referme la porte », vous ne vous faites pas prier trop longtemps !

Or, si les actionnaires influents d’une société belge active à l’international ne résident plus en Belgique, il ne faudra pas s’étonner si le centre de décision de cette société ne reste pas en Belgique...

Cela étant, cette « exit tax » à la belge – qui n’était d’ailleurs pas prévue dans l’accord de gouvernement - va beaucoup plus loin que, par exemple, l'"exit tax" française. En effet, le texte en projet s’appliquerait notamment au pensionné qui veut partir vivre sous des cieux plus ensoleillés, au cadre qui est muté à l’étranger, au sportif ou à l’artiste qui mène une carrière internationale, au frontalier qui déménage de quelques km mais de l’autre côté de la frontière et plus généralement à tous ceux qui ont un peu de patrimoine financier et qui, pour des raisons familiales ou professionnelles parfaitement légitimes, choisissent ou sont parfois obligés de déménager à l’étranger.

Il est par ailleurs fondamentalement injuste - et éventuellement problématique aussi, en termes de trésorerie personnelle -, de devoir payer immédiatement un impôt sur un revenu non encore réalisé et qui ne le sera peut-être jamais.

Par son caractère excessif et disproportionné, d’une part, et parce qu’elle instaure une sotte de présomption irréfragable d’abus fiscal en cas de transfert de résidence à l’étranger, d’autre part (cf. l’arrêt n°138/2022 du 27 octobre 2022 de la Cour Constitutionnelle), cette "exit tax", indépendamment d’être néfaste, est probablement contraire au droit constitutionnel belge et, au regard du droit européen, pourrait éventuellement aussi être considérée comme une entrave à la libre circulation au sein de l’Union.

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